En 2015, le Journal de Montréal a identifié la Canadian Islamic Trust Foundation (CITF) comme la propriétaire de 4 édifices abritant des institutions islamiques au Québec. La CITF possède également d’autres édifices au Canada dont la mosquée Jami de Toronto au cœur du stratagème de transferts illégaux de fonds dévoilé par l’Agence du revenu du Canada.
Après l’ISNA Development Foundation en 2013 (ARC – PdeB), l’Agence du revenu du Canada (ARC) vient de révoquer les statuts charitables de deux autres filiales d’ISNA-Canada pour avoir transféré des fonds à une entité liée à une organisation terroriste et avoir émis des reçus illégaux. Il s’agit d’ISNA, Islamic Services et de la Canadian Islamic Trust Foundation
Ce sont les journalistes Stewart Bell (maintenant avec Global News) et Sean Craig qui ont rapporté la nouvelle.
En 2015, une enquête du Journal de Montréal a révélé que la Canadian Islamic Trust Foundation (CITF) possédait les édifices qui abritent quatre institutions islamiques au Québec. Ce sont le Centre culturel islamique de la Mauricie (Trois-Rivières), l’Association culturelle islamique de l’Estrie (Sherbrooke), Mosquée de Montréal (NDG, Montréal) et l’École musulmane de Montréal (NDG, Montréal).
Hugo Joncas (Journal de Montréal – 19 janvier 2015) : Reportage sur onze des institutions contrôlées par les Frères Musulmans au Québec
En juillet 2017, le Registre des entreprises du Québec indique toujours une relation entre la CITF et l’édifice situé au 7445 Chester à Montréal où logent les deux institutions de Montréal susmentionnées. Voir le dossier de la CITF au Registre archivé le 25 juillet 2017. Par contre, la mention de la CITF a disparu du dossier de la Muslim Community of Quebec (également située au 7445 Chester) au Registre des entreprises. Une version archivée en 2010 en faisait mention. La décision de la Cour supérieure de 2016 disculpant Djemila Benhabib de diffamation à l’égard de l’École musulmane de Montréal (située au 7445 Chester) mentionne brièvement l’article du Journal de Montréal qui établissait un lien entre cette école et la CITF.
Après le reportage du Journal de Montréal en 2015, un responsable de l’Association culturelle islamique de l’Estrie (qui contrôle la mosquée A’Rahmane de Sherbrooke) avait évoqué la possibilité de rompre les liens avec ISNA-Canada et sa filiale immobilière CITF. Par contre, un an plus tard, La Tribune de Sherbrooke notait que la mosquée A’Rahmane appartenait toujours à la CITF.
La CITF possède d’autres édifices au Canada dont la mosquée Jami à Toronto. C’est cette mosquée qui est au cœur du stratagème financier qui mena à la révocation du statut charitable des deux filiales d’ISNA-Canada.
La mosquée Jami (une organisation sans statut charitable) recueillait des fonds qu’elle envoyait à l’ISNA Development Foundation et cette organisation les transférait au Pakistan. Puis, ISNA, Islamic Services (une organisation avec statut charitable) émettait des reçus pour fins d’impôt illégaux aux donateurs, même si les fonds perçus ne lui étaient pas destinés.
L’Agence du revenu du Canada a expliqué sa décision dans une longue lettre archivée sur Scribd.com. La lettre est également disponible à la fin de l’article de Global News. Point de Bascule en a sauvegardé les pages les plus importantes (à droite de cet article) en résumant en rouge les principaux passages.
Dans le sommaire qui suit, les informations sans hyperlien proviennent de la lettre adressée par l’ARC à ISNA, Islamic Services le 30 mars 2017.
- L’ARC a mis à jour un stratagème par lequel la mosquée Jami de Toronto recueillait des fonds destinés à être acheminés à la Relief Organization for Kashmiri Muslims (ROKM) au Pakistan. La ROKM est la branche dite ‘caritative’ du Jamaat-e-Islami qui maintient une autre branche, armée celle-là (le Hizbul Mujahideen), impliquée dans le jihad armé au Cachemire.
- L’ARC indique qu’il existe un chevauchement entre les leaderships du Jamaat-e-Islami et celui de ses deux filiales au Pakistan.
- En 2013 (ARC – PdeB), l’ARC a révoqué le statut charitable de l’ISNA Development Foundation (IDF) pour ses transferts de fonds à la ROKM liée à l’organisation terroriste Hizbul Mujahideen. À ce moment-là, l’ARC avait mis en évidence le rôle joué par le Kashmir Relief Fund of Canada dans la cueillette de fonds destinés au ROKM au Pakistan. Le rôle identique joué par la mosquée Jami de Toronto n’avait pas été souligné à ce moment-là. Il est difficile de comprendre pourquoi il a fallu près de quatre années supplémentaires à l’ARC pour révoquer le statut charitable des partenaires de l’ISNA Development Foundation dans cette affaire.
- La mosquée Jami fait partie de l’infrastructure d’ISNA-Canada mais elle ne bénéficie pas d’un statut charitable auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Pour contourner cet obstacle, des reçus pour fins d’impôt étaient émis par une autre filiale d’ISNA-Canada avec statut charitable, soit ISNA, Islamic Services.
- L’ARC réfère à cette pratique illégale comme étant la production de reçus par un tiers (‘Third-party receipting’). Dans sa lettre du 30 mars, l’ARC indique que «[Traduction] Le but du système d’enregistrement des organismes charitables en vertu de la Loi vise à assurer que seulement les organisations enregistrées puissent émettre des reçus officiels [pour fins d’impôt]. L’intégrité du système est lourdement compromise quand une organisation enregistrée entre en collusion avec une organisation non enregistrée pour fournir un allègement fiscal pour des dons qui ne sont pas destinés à l’organisme charitable enregistré. Cette pratique est connue comme la production de reçus par un tiers. Un organisme charitable enregistré ne doit pas émettre de reçus pour des dons destinés à un organisme non enregistré ou permettre à une organisme non enregistré d’utiliser son numéro d’enregistrement [pour émettre des reçus].»
- Bien que le site internet de la mosquée Jami soutienne qu’ISNA, Islamic Services détienne le titre de propriété de l’édifice où loge la mosquée, l’ARC a conclu, qu’au contraire, c’est la CITF qui est la propriétaire des lieux. L’ARC ajoute que «[Traduction] les décisions relatives à l’organisation et aux finances de la mosquée Jami […] incombent à la Canadian Islamic Trust Foundation.»
- Dans sa lettre du 30 mars 2017, l’ARC indique également que le Hizbul Mujahideen, la filiale du Jamaat-e-Islami associée à la ROKM, est reconnu comme une organisation terroriste par le Conseil de l’Union européenne et le gouvernement indien.
- Le 26 juin 2017, le Département d’État américain a ajouté le leader du Hizbul Mujahideen, Syed Salahuddin, à sa liste de terroristes reconnus / Today après qu’il ait menacé de multiplier les attentats-suicide au Cachemire et de transformer la région «en un cimetière pour les forces indiennes».
Au départ, ISNA-Canada a été établi comme une filiale de l’Islamic Society of North America (ISNA) basée à Plainfield (Indiana). Après la révocation du statut charitable de l’ISNA Development Foundation par l’Agence du revenu du Canada en 2013, l’ISNA basée aux États-Unis avait publié un message / Archive.Today indiquant que «Traduction] il n’y a plus de relations d’autorité entre les organisations américaines et canadiennes [de l’ISNA] depuis quelques décennies malgré leurs noms semblables.»
Par contre, au moment de publier cet article (à la fin juillet 2017), l’ISNA (basée aux États-Unis) indique que son conseil de direction compte un vice-président pour les États-Unis et un vice-président pour le Canada. Ce dernier est Pervez Nasim. M. Nasim est également secrétaire du conseil d’ISNA-Canada.
Mohamed Bekkari, président de la Canadian Islamic Trust Foundation (une des organisations dont le statut charitable vient d’être révoqué par l’ARC) siège également au conseil de l’ISNA basée aux États-Unis.
Dans un passé récent, il y a eu plusieurs autres cas de chevauchements entre les leaderships de l’ISNA au Canada et aux États-Unis. Dans le cas d’Abdalla Idris Ali, il a d’abord participé au leadership de l’ISNA aux États-Unis avant de devenir l’actuel directeur exécutif d’ISNA-Canada. Il a été président de l’ISNA basée aux États-Unis durant cinq ans (1992-1997) et membre de son conseil de direction en 2006.
Les transferts financiers attestent indéniablement de la proximité entre le Jamaat-e-Islami, ISNA-Canada et ses filiales. Cependant, pour la majorité des observateurs qui n’ont ni les ressources, ni les pouvoirs de l’Agence du revenu du Canada d’imposer la divulgation de documents administratifs clés, il est quand même possible de détecter les influences étrangères sur des organisations islamistes basées en Amérique du Nord en examinant leurs influences idéologiques : qui est invité aux conférences des organisations islamistes nord-américaines, quels exégètes islamistes étrangers promeuvent-elles, etc.
À titre d’exemples, des situations survenues il y a quelques années pouvaient déjà permettre aux observateurs attentifs de conclure à l’existence de liens entre le Jamaat-e-Islami et l’infrastructure nord-américaine de l’ISNA.
2000 – Lors d’une conférence d’ISNA-Canada, Ingrid Mattson a endossé le fondateur du Jamaat-e-Islami, l’idéologue islamiste Syed Maududi (1903-1979), en déclarant qu’il avait probablement produit le meilleur tafsir (commentaire coranique) disponible en langue anglaise. C’est dans ce tafsir, à l’explication du verset 4:24, que Maududi justifie le viol des prisonnières de guerre. C’est ce genre d’explications doctrinales qui incita l’État islamique à encourager le viol à grande échelle des prisonnières de guerre yézidies en Irak ces dernières années.
Dans son livre Jihad in Islam / WebArchive (pp.6 et 22), Syed Maududi affirme que «[Traduction] Le but de l’islam est de provoquer une révolution universelle. […] L’islam cherche à détruire tous les états et les gouvernements opposés à l’idéologie et au programme de l’islam où qu’ils soient sur terre. […] Le but de l’islam est d’instaurer un état fondé sur son propre programme et sa propre idéologie.»
Après avoir publiquement endossé le fondateur du Jamaat-e-Islami, Ingrid Mattson a été vice-présidente de l’ISNA aux États-Unis, puis présidente de l’organisation de 2006 à 2010.
SEPTEMBRE-OCTOBRE 2000 – La revue Islamic Horizons (p.17) publiée par l’ISNA a rapporté positivement la visite aux États-Unis en juillet 2000 de Qazi Hussain Ahmed, le leader du Jamaat-e-Islami au Pakistan à l’époque.
24 MAI 2008 – ISNA-Canada a annoncé la participation de Qazi Hussain Ahmed, le leader du Jamaat-e-Islami au Pakistan à l’époque, à une table ronde en compagnie de Faisal Kutty et Munir El-Kassem lors de sa 34e conférence annuelle à Mississauga (Ontario). Les autorités canadiennes avaient refusé d’émettre un visa au leader du Jamaat-e-Islami à l’époque.
Cette conférence avait été commanditée par Human Concern International (HCI). En 1996, le Globe and Mail a rapporté que, lorsque le représentant au Pakistan de HCI et leader d’Al-Qaïda, Ahmed Saïd Khadr a été arrêté en relation avec l’attentat à la bombe à l’ambassade d’Égypte à Islamabad, c’est le Jamaat-e-Islami (JEI) qui lui a procuré les services d’un avocat.
Dans leur annonce de la révocation du statut charitable d’ISNA, Islamic Services et de la Canadian Islamic Trust Foundation, les journalistes Stewart Bell et Sean Craig ont rappelé la proximité d’ISNA-Canada, l’organisation qui chapeaute les trois filiales dont le statut charitable a été révoqué en 2013 et 2017, avec des politiciens de première importance dont Justin Trudeau, devenu premier ministre du Canada depuis son discours de 2013 devant une assemblée d’ISNA-Canada, et Ralph Goodale qui participa aux activités d’ISNA-Canada le 7 avril 2017 à titre de ministre de la Sécurité publique. La participation de M. Goodale est survenue plus de trois ans après que le statut de l’ISNA Development Foundation ait été révoqué en rapport avec son financement d’une entité liée à une organisation terroriste et quelques semaines à peine avant que le statut charitable de ses partenaires dans le stratagème financier illégal ne le soit.
À partir du moment où l’association d’une organisation ou d’une de ses composantes avec des entités liées au terrorisme devient connue du gouvernement, il est inacceptable qu’un ministre du gouvernement s’y associe. Il est d’autant plus inacceptable que le ministre responsable de la Sécurité publique s’y associe étant donné le projet de renversement des gouvernements non-islamiques clairement énoncé par Syed Maududi, l’un des maîtres à penser de l’infrastructure d’ISNA et le fondateur du Jamaat-e-Islami qui contrôle l’organisation qui a reçu les fonds qui menèrent à la révocation du statut charitable de trois filiales d’ISNA-Canada en 2013 et 2017.
Le projet du Jamaat-e-Islami et de ses partisans au Canada, tel qu’exprimé par Syed Maududi est le suivant : «[Traduction] [P]rovoquer une révolution universelle [et] détruire tous les états et les gouvernements opposés à l’idéologie et au programme de l’islam où qu’ils soient sur terre. […] Le but de l’islam est d’instaurer un état fondé sur son propre programme et sa propre idéologie.» (Jihad in Islam / WebArchive – pp.6 et 22)
Selon un des sites du gouvernement fédéral, une des responsabilités du ministère de la Sécurité publique consiste «à protéger le Canada et les Canadiens contre les menaces pour la sécurité nationale comme l’extrémisme, le terrorisme, l’espionnage et la prolifération des armes de destruction massive».
En s’associant à ISNA-Canada et en y donnant de la légitimité, le ministre de la Sécurité publique a dérogé à ses responsabilités.
https://www.facebook.com/isna.canada/posts/1464626433571879 / WebArchive – Archive.Today
Lectures complémentaires
Point de Bascule : FICHE Islamic Society of North America
Point de Bascule (24 septembre 2013) : L’ISNA Development Foundation voit son statut charitable révoqué pour avoir transféré des fonds vers une organisation terroriste au Pakistan