TRADUCTION FRANÇAISE DE POINT DE BASCULE
Auteur : Rand Paul, sénateur républicain
Référence : Fox News, Opinion, le 17 octobre 2018
Titre original : Sen. Rand Paul: It’s time to rethink America’s relationship with Saudi Arabia — It is not our friend / Archive.Today – Webarchive
Il est temps de repenser la relation entre les États-Unis et le royaume de l’Arabie saoudite.
La majorité des Américains ne sont pas surpris que nous aidions à armer, former et voir même soutenir le gouvernement de l’Arabie saoudite. Les Saoudiens ont longtemps acheté et payé beaucoup de politiciens pour construire et maintenir une façade pro-américaine modérée afin que cette image soit diffusée et mise en valeur à travers le monde.
Mais cette façade n’est tout simplement pas la réalité. Il est temps d’utiliser notre avantage pour forcer un changement dans le royaume de l’Arabie saoudite. Nous pouvons commencer par couper notre aide militaire et la vente d’armes au Royaume.
Le sort du dissident journaliste saoudien, Jamal Khashoggi, représente bien des choses qui sont brutales et terrifiantes pour ceux qui rapportent des informations sur les Saoudiens. Ce qui doit aussi être un fait, à la lumière de ce qui nous est révélé sur le régime saoudien, est un point de bascule dans notre relation; en tant qu’Américain, nous devons prendre une pause et nous demander qu’est-ce que nous avons apporté et soutenu.
Le sort de Khashoggi risque de surprendre bien des Américains, mais ce n’est rien de nouveau. Selon The Guardian, un rapport de l’ONU révèle que plus de « 3 000 allégations de tortures ont été documentées » contre l’Arabie saoudite entre 2009 et 2015. Le rapport note aussi qu’aucune poursuite judiciaire officielle n’a été faite pour cette conduite.
J’ai tenté d’exposer cette situation depuis des années. Plusieurs autres au sein du gouvernement américain le savent, mais ne l’admettront pas ou tenteront d’éviter le sujet. C’est un fait que le Royaume d’Arabie saoudite est le plus important commanditaire de l’islam radical sur la planète et aucune autre nation ne s’y rapproche, même de très près.
Depuis les années 1980, plus de 100 milliards de dollars ont été « dépensés pour exporter » le Wahhabisme (le type d’islam qui contrôle l’Arabie saoudite et qui est le plus omniprésent dans les madrasas). Selon le magazine Foreign Policy, on estime qu’entre « 10 à 15% des madrassas sont affiliées à des groupes extrémistes religieux ou des groupes politiques, » alors que le nombre de madrassas en place tant au Pakistan qu’en Inde s’est accru exponentiellement – d’à peine 200 à 40 000 uniquement au Pakistan.
Même le Département d’État notait lors de l’administration Obama que l’Arabie saoudite était la « la principale source de financement de groupe terroriste sunnite mondialement », et que le Qatar et l’Arabie saoudite « fournissaient clandestinement le financement et du soutien logistique à ISIL ainsi qu’à d’autres groupes radicaux sunnites».
Bien sûr, ceci n’a rien de nouveau puisque les 28 pages classifiées “secrètes” du rapport de la Commission 9/11 peuvent aussi vous le dire.
Les Saoudiens ont exporté cette idéologie radicale à travers le monde. Ils ont aussi commis des crimes de guerre dans leur conflit contre le Yémen – une guerre pour laquelle les contribuables américains sont utilisés, à leur insu, comme des compères.
La guerre au Yémen, menée avec des armes et l’appui logistique américain, a tué des dizaines de milliers et, selon le Washington Post, a aussi laissé un autre 8 million de victimes de plus « au bord de la famine », dans ce qui est qualifié de « la pire crise humanitaire au monde ».
Le blocus du Yémen par l’Arabie saoudite y contribue largement. Le Yémen doit maintenant faire face à ce que le Post décrit également comme « la pire épidémie de choléra de l’histoire, avec plus d’un million de personnes infectées ».
De plus, un rapport de l’ONU publié jeudi, indique que 20% des civils tués, causés par la coalition saoudienne dans cette guerre sont des enfants.
L’Arabie saoudite a de lourds antécédents d’abus des droits humains, et son traitement des femmes est de notoriété publique. Mais il y a beaucoup plus sur l’Arabie saoudite qui n’est pas publiquement évoqué.
Selon Human Rights Watch, des 5 000 détenus qui sont rapportés dans les bases de données saoudiennes, plus de 3 300 ont été retenues plus de 6 mois “sans chef d’accusation ou ‘demande de contrôle judiciaire’ dont 2 949 sont détenus pour plus d’un an et 770 pour plus de trois ans ».
Nous avons affaire à un régime qui a aussi arrêté et détenu 500 personnes en un seul weekend en novembre pour des allégations de « corruption ».
Les preuves d’incarcération de masse abondent. Des détentions indéfinies, de la torture et l’absence complète d’état de droit et de procédures normales.
Quoi faire maintenant ? Que faisons-nous de ce pays d’importance politique qui, clairement, n’agit pas dans l’intérêt des États-Unis ou de ses propres citoyens ?
Nous pouvons commencer en arrêtant de soutenir les Saoudiens. Nous ne devrions plus leur faire parvenir un seul sou, un seul autre soldat, un seul autre conseiller, ou encore un seul autre contrat d’armes avec le Royaume.
Il y a ceux qui envisagent cette option et disent : « Et, qu’advient-il de nos emplois, n’y-a-t-il pas quelqu’un d’autre qui vendra des armes aux Saoudiens ? »
D’abord, permettez-moi de commencer par dire que ce n’est pas une assez bonne raison pour appuyer les actions carrément maléfiques perpétrées par les Saoudiens. Et, même en acceptant cela, il est risible de penser que le Royaume, qui depuis longtemps, a été dépendant de la formation et d’équipements militaires américains puissent soudainement changer de cap.
Ce que nous avons ici c’est du levier. Les Saoudiens ont besoin de notre aide et de nos armes. Et nous devrions nous assurer que ce besoin puisse causer des changements dans leur comportement.
Ce n’est pas assez de parler d’un ton ferme et ensuite donner aux Saoudiens ce qu’ils veulent. Nous devons forcer leur main en direction d’une véritable réforme, tant à l’intérieur du pays qu’à l’étranger.
Avec l’indignation causée par leurs récentes actions, il est maintenant temps pour des actions correctives bipartisanes.
Lectures complémentaires
Point de Bascule : FICHE Arabie saoudite / Saudi Arabia
Point de Bascule (23 novembre 2011) : Canada – Arabie saoudite : Deux exemples de situations qui rendent inappropriée la participation du Dr. Philippe Couillard à la surveillance du SCRS