L’enquêteur de la Commission canadienne des droits de la personne se fit demander quelle valeur il accordait à la liberté de parole dans ses enquêtes. Il répondit : « La liberté de parole est un concept américain. Je ne lui donne donc aucune valeur. Ce n’est pas ma responsabilité d’accorder de l’importance à un concept américain. »
Original English version – National Post (September 28, 2011)
Traduction française de Point de Bascule
Brian Storseth, un député conservateur d’arrière-banc désire l’élimination de l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. C’est la clause de la loi fédérale qui donne à la Commission canadienne des droits de la personne l’autorité d’entendre des plaintes pour discours haineux tenu sur internet. Nous souhaitons que la campagne de M. Storseth, député de Westlock-St. Paul en Alberta, réussisse. L’article 13 nuit au droit à la libre expression. Bien qu’ajoutée à la Loi en 2001 pour protéger des groupes vulnérables contre des sites internet qui promeuvent le racisme ou la violence, cette clause a surtout été invoquée par des activistes qui prétendent défendre les minorités pour faire taire ceux qui ne partagent pas leurs opinions.
Le plus gros problème avec l’article 13, c’est que ses modalités permettent aux commissaires de rendre des verdicts de culpabilité beaucoup trop facilement. Contrairement aux tribunaux réguliers où prévalent la présomption d’innocence, les règles de preuve et un interdit sur les preuves par ouï-dire, les tribunaux des droits de la personne permettent que les plaignants demeurent anonymes et les plaintes peuvent être déposées par des tiers qui n’ont aucun intérêt dans la cause elle-même. (Certains ont même développé un passe-temps lucratif qui consiste à déposer de telles plaintes). (Dans les tribunaux des droits de la personne), la preuve par ouï-dire est tout à fait acceptable, le fardeau de la preuve repose souvent sur l’accusé et des fonds publics sont défrayés pour payer les avocats des plaignants pendant que les accusés doivent payer pour leur propre défense.
Un autre défaut de l’article 13, c’est que ni la vérité, ni l’absence d’intention de blesser ne sont acceptées comme moyens de défense. Il est sans importance que le message diffusé sur internet soit véridique. Si l’arbitre détermine que le message « va vraisemblablement exposer un groupe identifiable à la haine ou au mépris », alors le propriétaire du site où apparaît le message est coupable.
En 2007, l’article 13 a été invoqué contre l’écrivain Mark Steyn pour du matériel publié par Maclean’s que quatre étudiants musulmans trouvèrent offensant. La même année, une clause semblable faisant partie de la loi albertaine sur les droits de la personne a été utilisée pour poursuivre Ezra Levant qui avait publié les caricatures du prophète Muhammad dans son magazine Western Standard disparu depuis. Dans les deux cas, il est clair que les plaignants tentaient de limiter un débat légitime sur l’extrémisme religieux.
Les craintes que l’élimination de l’article 13 mènera à une recrudescence de l’antisémitisme et à celle d’autres formes de discours haineux sont sans fondement. Les articles 318 à 320 du Code criminel interdisent déjà la propagande haineuse qui inclut « tout écrit, signe ou représentation visible qui préconise ou fomente le génocide ».
(…) Le problème des activistes promoteurs de censure c’est qu’il est difficile de prouver le discours haineux en cour. Les cours acceptent de réduire la portée des droits garantis par la Charte, tels la liberté d’expression, que dans les cas les plus rares. Il est peu probable que le discours anti-immigration qu’on retrouve sur internet ou une caricature incitera un vrai juge à fermer un site internet ou à imposer une amende à un blogueur. C’est la raison pourquoi les activistes préfèrent invoquer l’article 13 et ses équivalents provinciaux plutôt que le Code criminel.
Ainsi, dans un cas qui fit beaucoup de bruit contre un site présumé suprématiste blanc, l’enquêteur Dean Stacy de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) se fit demander quelle valeur il accordait à la liberté de parole dans ses enquêtes. Étonnamment, M. Stacey répondit : « La liberté de parole est un concept américain. Je ne lui donne donc aucune valeur. Ce n’est pas ma responsabilité d’accorder de l’importance à un concept américain. » Dans la même cause, il est allégué que les enquêteurs de la CCDP auraient permis au plaignant de consulter les fichiers contenant leur preuve et qu’ils publièrent des messages racistes sous de faux noms sur des sites internet puis attendirent de voir si les gestionnaires du site allaient les éliminer.
Dans un cas entendu en Alberta pour lequel un pasteur évangélique avait été accusé de mépriser les homosexuels, Lori Andreachuk qui mena l’enquête pour la Commission albertaine des droits de la personne déclara que « l’élimination du discours haineux a préséance » sur la liberté d’expression. En d’autres termes, éliminer le discours haineux est plus important que de protéger la liberté d’expression.
Référence: Lund v. Boissoin, 2007 AHRC 11 (CanLII)
Pendant que le projet de loi privé de M. Storseth franchira les différentes étapes du processus à la Chambre des Communes, il y en aura qui crieront que le combat contre le discours haineux est trop important pour permettre l’élimination de l’article 13. En réalité, les clauses de censure dans la législation des droits de la personne nuisent au combat contre la bigoterie vraiment dangereuse parce qu’elles nous laissent sous l’impression qu’il s’agit uniquement d’un exercice de rectitude politique qui perd d’ailleurs l’appui du public.
Il est de beaucoup préférable de laisser les vrais juges et les vrais avocats s’occuper de ces affaires plutôt que des cours-bidons (kangoroo courts). C’est ce qui arrivera si Brian Storseth arrive à convaincre ses collègues. Nous souhaitons qu’il réussisse.
Références supplémentaires
Le Devoir Commission canadienne des droits – S’attaquer aux gais, aux occidentales et aux juifs n’est pas nécessairement haineux 17 décembre 2008
Point de Bascule : Déclaration de Point de Bascule à propos de la plainte renvoyée par la Commission canadienne des droits 18 Décembre 2008
Point de Bascule Lettre de la Commission canadienne des droits de la personne à Marc Lebuis 17 Décembre 2008
National Post editorial board: The overt bias of Canada’s CHRC thought police 19 Décembre 2008
Point de Bascule Pourquoi j’ai déposé une plainte à la Commission canadienne des droits contre un imam salafiste de Montréal pour “propagande haineuse” 15 Avril 2008
Point de Bascule Jennifer Lynch sème encore plus le doute sur l’impartialité de la Commission 19 Juin 2009
Point de Bascule Le rapport Moon recommande l’abrogation des pouvoirs de censure de la Commission canadienne des droits 24 Novembre 2008
Point de Bascule La Commission canadienne des droits de la personne refuse d’enquêter sur la plainte de Marc Lebuis, directeur de Point de Bascule 17 Décembre 2008
Point de Bascule L’imam Al-Hayiti répond à la décision de la Commission des droits de renvoyer la plainte de Marc Lebuis 17 Décembre 2008