
«Dans l’affrontement entre l’Occident et l’Islam, nous sommes notre pire ennemi. Le projet islamiste ne mènerait nulle part si nos élites cessaient de se fendre en quatre pour paraître sensibles et raisonnables. Le monde occidental avec ses institutions de la démocratie, l’État de droit et ses libertés, va disparaître parce que ses propres élites pourraient ne pas être assez fières de ses réalisations pour le défendre de l’intérieur».
Walt Kelly, le dessinateur et satiriste avait fait dire à son fameux personnage Pogo: «Nous avons rencontré l’ennemi, et il est nous».
Dans l’affrontement entre l’Occident et l’Islam, ceci est de plus en plus vrai. Nous sommes notre propre pire ennemi.
Ceux d’entre nous qui se préoccupent de la survie de la civilisation occidentale sont parfois enragés par la manière dont les organisations musulmanes feignent l’indignation dans les médias à la moindre petite offense. Nous grinçons des dents quand ces organisations déposent des plaintes aux commissions des droits de l’homme contre les écrits de personnes telles que Mark Steyn et Ezra Levant. Nous mettons nos gouvernements en garde contre l’implantation de la charia et contre les enseignements insidieux des imams radicaux dans des mosquées et des centres communautaires islamiques sur notre propre continent.
Mais en réalité, les islamistes radicaux pourraient-ils prendre le contrôle sans la collaboration de nos élites ?
Certes, la plainte à la commission des droits de la personne de l’Alberta contre Levant a été déposée par quelque chose appelé le Islamic Supreme Council of Canada (ISCC), et celle contre Steyn par le Congrès islamique canadien (CIC), ce qui donne les apparences d’une attaque contre la liberté d’expression par des musulmans.
Pourtant, les deux plaintes seraient-elles allées quelque part en l’absence de l’appui d’agences du gouvernement financées par les contribuables et qui encouragent les groupes de pression à déposer des plaintes officielles contre leurs ennemis – et qui paient leurs frais ?
Imaginez la vie éphémère de ces genres de plaintes en l’absence des lois libérales adoptées par les politiciens occidentaux – et non par des activistes musulmans professionnels – qui leur accordent une légitimité?
Les Syed Soharwardy (directeur du ISCC) et Mohammad Elmasry (patron du CIC) de ce monde pourraient se répandre en injures auprès d’un ou deux reporters sympathiques sur les indignations que des Levant et Steyn causent à leur religion, mais sans le soutien des gouvernements occidentaux modernes et des fonctionnaires politiquement correct qui remuent leurs leviers, font couler l’argent des robinets et claquent leurs fouets, ces requérants seraient des arbres qui tombent dans la forêt avec personne pour les entendre. Pour la plupart des lecteurs, auditeurs et téléspectateurs, la réaction serait de tourner la page, de changer de station ou de chaîne.
Ce n’est pas le Canadian Council on American-Islamic Relations (CAIR-CAN) qui a envoyé Jeff Rubin, chef économiste de la CIBC, à des sessions de sensibilisation à l’islam il y a trois ans après qu’un rapport financier bancaire ait particulièrement offensé la pugnace et procédurière organisation musulmane. C’était les patrons peureux, politiquement correct de la CIBC.
Oui, CAIR-CAN, le CIC et le ISCC prennent plaisir à tirer pleinement parti des voies officielles qui leur sont ouvertes pour critiquer et intimider leurs adversaires, mais ils n’ont pas créé ces voies et il y a peu qu’ils pourraient faire si nos gouvernements et corporations politiquement corrects décidaient de les fermer demain.
Le meilleur exemple de ce que je veux dire nous est venu cette semaine du British Educational Communications and Technology Agency (BECTA).
Les éditeurs Shoo Fly de Newcastle ont réalisé une version électronique interactive très innovante de l’histoire Les Trois Petits Cochons – un livre en 3D conçu pour encourager les jeunes enfants à développer la pensée critique. Il a remporté plusieurs prix, mais n’a pas été approuvé par BECTA parce que «l’utilisation de porcs soulève des questions culturelles». En particulier, s’est fait dire Shoo Fly, «les juges ne conseilleraient pas ce produit à la communauté musulmane», parce que les images de cochon pourraient les troubler.
Les journaux britanniques ont été remplis instantanément avec des manchettes du genre «Politiquement Correct devenu fou! Les Musulmans dévorent le petit chaperon rouge.»
Mais, bien entendu, les musulmans n’ont rien fait de cela. En effet, le Muslim Council of Britain a déclaré au Daily Telegraph, «Nous ne sommes pas du tout offensés par cela», et a appelé les écoles britanniques à accueillir les livres.
Je ne dis pas que les musulmans radicaux sont sans danger pour notre mode de vie. Bien sûr, si on laissait faire les musulmans fondamentalistes nous serions tous convertis, ou à tout le moins de serviles dhimmis vivant à la merci d’un califat mondial. Les musulmans qui ont protesté dans le monde occidental il y a deux hivers contre les caricatures danoises de Mahomet n’ont pas été influencés par nos propres élites PC à descendre dans la rue en transportant des panneaux avec des slogans tels que «Mort à ceux qui déshonorent le Prophète».
Pourtant, leur vision fondamentaliste ne mènerait nulle part juridiquement, culturellement ou politiquement sans nos gouvernements, nos politiciens, nos bureaucrates et nos experts qui se fendent en quatre pour paraître sensibles et raisonnables.
Appelez ça le suicide par la tolérance. Le monde occidental avec ses institutions de la démocratie et l’État de droit, avec ses progrès de la science et de la médecine, la liberté individuelle, sa dévotion historique pour la raison et ses développements dans la culture et les arts va disparaître parce que ses propres élites pourraient ne pas être assez fières de ses réalisations pour le défendre de l’intérieur.
Source: Suicide by Tolerance, par Lorne Gunter, National Post, le 28 janvier 2008
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