ORIGINAL ENGLISH VERSION ON THE NATIONAL POST
TRADUCTION FRANÇAISE DE POINT DE BASCULE
Auteure : Équipe éditoriale du National Post
Référence : National Post, 19 octobre 2015
Titre original : National Post View: The real threat to speech is Quebec’s Bill 59 / WebArchive – Archive.Today
PEN International, l’organisation qui s’est donnée le mandat de défendre la liberté d’expression des écrivains, a récemment tenu son 81e congrès dans la ville de Québec. Chaque année l’organisation présente un portrait de la liberté d’expression du pays où elle tient son congrès. En conséquence, cette année c’est la situation au Canada qui était examinée.
Selon le rapport de vingt pages dévoilé mardi [le 13 octobre 2015] et publié sous l’égide de son président John Ralston Saul, l’organisation est préoccupée par «l’érosion du droit de s’exprimer librement» au Canada. Parmi les autres critiques, le rapport évoque une diminution du droit de manifester librement et donne en exemples les manifestations lors du G20 à Toronto en 2010 et les manifs étudiantes au Québec en 2012, le ‘baillon’ [‘gagging’] imposé aux communications des fonctionnaires sur le changement climatique, les programmes de surveillance que le Canada partage avec l’Agence de sécurité nationale (NSA) américaine et le manque de transparence en ce qui a trait à la Loi sur l’accès à l’information de 1982. Cette loi, considérée révolutionnaire lors de son adoption, est aujourd’hui critiquée pour son retard; le Canada occupant la 59e position dans le palmarès des 102 pays dotés de telles mesures.
Le rapport de PEN International est problématique pour deux raisons. Alors que les critiques du gouvernement Harper par PEN peuvent être entièrement justifiées, la divulgation du rapport quelques jours avant l’élection fédérale est difficilement conciliable avec la neutralité politique à laquelle une telle organisation (ou son président) devrait s’astreindre. [John Ralston] Saul écrit : «C’est aux citoyens canadiens de décider si les limitations imposées à leur liberté d’expression sont acceptables ou non. Et s’ils croient qu’elles sont inacceptables, et j’espère que c’est ce qu’ils croient, alors ils vont agir en conséquence.» Ça demanderait passablement d’efforts pour ne pas conclure que Saul espère que le rapport de PEN va contribuer à défaire le gouvernement Harper. Voilà une utilisation inappropriée de son autorité.
Le deuxième problème avec le rapport de PEN International c’est ce qu’il ne dit pas. Le rapport passe complètement sous silence ce qui est probablement la plus grave menace à la liberté d’expression au Canada aujourd’hui, soit le projet de loi 59 [présenté à l’Assemblée nationale du Québec en juin 2015]. Cette menace passa directement sous le nez des délégués de PEN International alors qu’ils étaient rassemblés dans la ville de Québec.
Le projet de loi 59 attribuerait de nouveaux pouvoirs à la Commission des droits de la personne du Québec (CDPDJ) pour combattre le discours haineux, en particulier le discours considéré islamophobe, en censurant ce qui prétendument promeut la «crainte de l’autre» sur internet. De façon inquiétante, ce projet de loi permettrait à la CDPDJ de poursuivre des sites internet qui diffusent des critiques d’aspects de l’islam ou de l’islamisme qui, selon elle, pourraient être jugés offensants.
Par exemple, un site dont les informations sont scrupuleusement documentées comme pointdebascule.ca et qui existe seulement pour présenter des individus et des organisations qui apportent un appui financier ou moral au terrorisme, et dont le travail est utile au SCRS, pourrait être forcé de fermer avec une telle loi et son directeur pourrait se voir imposer des amendes élevées. Un chroniqueur qui écrit au sujet des crimes d’honneur contre les filles et les femmes pourrait également être poursuivi et ce, même si ce qu’il ou elle écrit est ‘vrai’ et ‘d’intérêt public’. Ces moyens de défense dans des procès en diffamation ne seraient d’aucune utilité pour se défendre contre les dispositions du projet de loi 59.
Il est préoccupant que PEN International n’ait pas jugé bon de dénoncer le projet de loi 59 durant son congrès. Le projet de loi n’a d’ailleurs pas été mentionné par Saul ni dans sa lettre du mois de juillet, ni sur le site internet de PEN Québec. Quand on compare les autres critiques de PEN International au projet de loi 59, elles sont insignifiantes. Malheureusement, la partisanerie politique et l’indifférence volontaire aux éléphants dans la pièce ont jeté une ombre sur le dernier rapport de PEN International.
Références supplémentaires
Point de Bascule (21 décembre 2012) : Le Conseil national des musulmans canadiens / CAIR-CAN condamne Point de Bascule et utilise John Ralston Saul comme tête d’affiche pour légitimer le programme islamiste [Article en anglais]
Point de Bascule : FICHE Commission des droits de la personne du Québec / Plusieurs articles de Point de Bascule sur diverses facettes du projet de loi 59
Point de Bascule : FICHE Commission des droits de la personne du Québec / Références générales sur le projet de loi 59
http://www.pen-international.org/newsitems/mexican-american-writer-jennifer-clement-elected-first-woman-president-to-lead-pen-international-as-john-ralston-saul-steps-down-after-six-years/ / Archive.Today