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Joseph Facal : «Hier, à Paris, s’est tenue une réunion des pays occidentaux cherchant à endiguer le terrorisme. Le Canada n’y était même pas invité».
Auteur : Joseph Facal
Référence : Journal de Montréal, 21 janvier 2016
Titre original : La lâcheté vertueuse / Archive.Today
Quand on est féru d’histoire, on voit que, si les faits changent, les attitudes demeurent.
Au début de 1938, Hitler est au pouvoir depuis 5 ans. Il a réarmé l’Allemagne. Il a ouvertement exprimé ses intentions: l’expansion territoriale, la mise en esclavage des peuples conquis et la destruction complète des juifs.
Pourtant, ceux qui le prennent au sérieux et multiplient les mises en garde sont moqués. Churchill, le premier à avoir tenté de sortir l’Europe de sa torpeur, est isolé, perçu comme un vieil homme aigri et dépassé.
Les prétentieuses élites du temps, le premier ministre Neville Chamberlain en tête, minimisent, temporisent, relativisent.
L’histoire a donné un nom à cette politique suicidaire: «l’apaisement».
On se demande ce qu’on a bien pu faire qui stimule l’agressivité d’Hitler. Pour le calmer, on songe à lui redonner une partie des colonies perdues par l’Allemagne après 1918.
Vers l’abîme
Hitler, un fanatique, mais un maître des rapports de force, voit tout cela pour ce que c’est: de la faiblesse pure et simple. En mars 1938, il avale l’Autriche.
Il dit ensuite vouloir la région des Sudètes, qui est la partie germanophone de la Tchécoslovaquie. En face de lui, on fait des bulles.
À l’automne 1938, Chamberlain se rend à Munich et signe un bout de papier. En sacrifiant lâchement la Tchécoslovaquie, il assure avoir obtenu la «paix avec l’honneur».
Churchill lui répond qu’il a perdu son honneur, et qu’il récoltera la guerre de toute façon.
En mars 1939, Hitler ajoute la Moravie et la Bohème à ses conquêtes. En septembre 1939, il envahit la Pologne. La suite est connue.
Éberlué, Chamberlain dit ne pas comprendre qu’il faille se préparer à la guerre «pour une lointaine querelle entre des gens dont nous ne savons rien».
Ne me faites pas dire n’importe quoi. Je vois bien les différences entre ces événements et la progression, aujourd’hui, de l’islamisme violent.
Jadis, c’étaient des États avec des armées conventionnelles qui s’affrontaient.
Aujourd’hui, nous faisons face à un ennemi tapi dans l’ombre, même s’il contrôle des territoires, qu’il est soutenu par des gouvernements et des gens parmi nous, et qu’il parle ouvertement de domination mondiale.
Déni
Le parallèle à faire est au niveau des attitudes. On ne se réveille qu’au bord du précipice.
Hier comme aujourd’hui, on sent que le souci de ne pas déplaire, de ne pas choquer, de ne pas jeter d’huile sur le feu, se double d’aveuglement volontaire, de désirs que l’on prend pour des réalités et, disons-le, de trouille.
Vous n’aurez aucun mal à trouver des gens qui, hier, accusaient Churchill de mettre tous les Allemands dans le même paquet ou de faire le jeu de ceux qui ne faisaient pas les nuances requises. La cassette des «amalgames», quoi.
Dire qu’il faille faire des nuances, c’est enfoncer une porte ouverte. Tout le monde s’entend. Mais vient un temps où il faut savoir prendre la pleine mesure du danger auquel on fait face.
Hier, à Paris, s’est tenue une réunion des pays occidentaux cherchant à endiguer le terrorisme.
Le Canada n’y était même pas invité.
Références supplémentaires
Point de Bascule : FICHE Justin Trudeau
Point de Bascule (6 décembre 2010) : Jean-François Revel sur la difficulté des sociétés ouvertes à se défendre contre un ennemi intérieur
Point de Bascule (4 janvier 2016) : En 1938, Le Jour de Jean-Charles Harvey soulignait un parallèle entre le fanatisme de l’Allemagne nazie et «celui des grands jours de l’Islam».