Récemment, un parent québécois originaire d’Algérie, Jugurten, affichait sur notre site le message suivant en relation avec le nouveau cours d’éthique et culture religieuse qui sera implanté dans toutes les écoles du Québec à compter de l’automne:
J’ai fait 8 000 km, sans un sou, pour mettre mes deux enfants à l’abri de l’islam. J’ai fait le vide autour de moi et j’ai éliminé de mes relations toute personne susceptible de leur dire du bien de cette religion. Voila maintenant qu’on va la leur servir à l’école.
On leur dira que christianisme et islam c’est le même message, mais dit différemment. On leur dira que Jésus et Mohammed se valent et qu’ils sont tous les 2 des chics types et que chrétiens et musulmans ne devraient pas se chicaner. On ne leur dira pas qui cherche chicane. On leur dira que juifs et musulmans sont des fréres qui ont tort de se chicaner et qu’ils devraient vivre en harmonie en Palestine comme en Andalousie et patati et patata.
Tôt ou tard, mes enfants connaitront mon opinion ou me poseront des questions. Je passerai alors à leurs yeux pour un menteur et un méchant. J’avais tout le loisir de vivre cette situation en Algérie, sans avoir besoin de traverser un océan. Me revoilà revenu à la case de départ, après 8000 km et des années de labeur. Mon Dieu, non ! ça ne va pas recommencer. Je suis épuisé.
Peut-être que le mécanisme de «l’objection de conscience» pourrait être utilisé avec succès au Québec par des parents comme Jugurten. Un blogue québécois a traduit en français des articles sur le sujet rapportés par la presse espagnole. Des parents espagnols s’objectaient au cours d’éducation civique imposé aux enfants, quoique pour des motifs très différents de ceux décrits par Jugurten. Il reste que la notion d’«objection de conscience», vue comme un droit fondamental, pourrait être invoquée pour une variété de motifs si elle était introduite dans notre droit.
Glané sur le blogue Pour une école privée libre au Québec
Mercredi 23 avril 2008
Espagne — Victoires pour les objecteurs de conscience au cours d’Éducation civique
Suite du feuilleton espagnol et de l’imposition par le Parti socialiste d’un nouveau programme d’Éducation civique qui heurte tant d’Espagnols.
Le 4 mars, la Cour supérieure de justice d’Andalousie (CSJA) a donné raison à des parents de Bollulos del Condado (province d’Huelva) qui envisageaient de réclamer pour leur enfant l’objection de conscience au programme d’Éducation civique (EC). Une résolution du gouvernement régional andalou leur avait refusé le droit à cette objection, mais les parents en avaient appelé au Tribunal supérieur régional. La décision de la Cour des contentieux administratifs de la CSJA reconnaît finalement qu’il « existe bien un droit à l’objection de conscience qui s’exerce pour la protection des droits indiqués. »
Le jugement établit qu’un enfant peut ne pas suivre le programme et demeure exempté de l’examen correspondant. Le tribunal fonde son jugement sur la jurisprudence de la Cour suprême, du Tribunal constitutionnel et sur les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme. Il souligne également que l’objection de conscience « fait partie intégrante du droit fondamental à la liberté idéologique et religieuse reconnue par l’article 16.1 de la Constitution espagnole et, comme l’a indiqué cette cour à diverses reprises, la Constitution s’applique directement, plus particulièrement en matière de droits fondamentaux ».
La CSJA considère « raisonnable » le fait que les parents puissent désapprouver une partie du programme, pour des raisons philosophiques ou religieuses, car les objectifs dudit programme tel que stipulés dans la Loi organique 2/2006 consistent « à former les jeunes citoyens à des « valeurs communes ». De surcroît, les arrêtés royaux 1631/06 et 1513/06, qui précisent les enseignements minimaux, font usage de concepts indubitablement idéologiques ou religieux comme la morale, la conscience morale et civique, l’évaluation morale, les valeurs ainsi que les conflits sociaux et moraux. »
Les représentants du gouvernement d’Andalousie ont déclaré qu’ils ne changeront pas de politique en ce qui a trait au programme controversé et en ce qui concerne leur manque de respect des objecteurs. Ils ont également affirmé qu’ils porteraient la décision de la CSJA devant la Cour suprême.
Le 12 mars, la CSJA a également prononcé un arrêté par lequel il suspend préventivement l’obligation d’assister aux classes d’Éducation civique pour un élève de La Carolina (province de Jaén). Avec ces deux dernières décisions, voilà déjà quatre décisions de la CSJA contraires au programme d’Éducation civique que désire imposer le Parti socialiste espagnol.
La ministre de l’Éducation de la Communauté madrilène, Lucia Figar, a pour sa part déclaré que toutes les objections de conscience au programme d’EC seraient acceptées à Madrid et qu’elle déclarera « exempts de suivre le programme et de passer l’examen correspondant » les élèves qui craignent ce programme.
À Madrid, comme dans tous les gouvernements régionaux gouvernés par le Parti populaire [droite], le programme d’EC ne sera enseigné qu’à partir de l’année scolaire prochaine. Dans l’attente de décisions judiciaires plus définitives, les communautés de Murcie et de Valence désirent également laisser le choix aux parents.
Lundi 5 mai 2008
La justice andalouse interdit une partie du programme d’éducation civique
Résumé d’articles d’El Pais et El Mundo.
SÉVILLE — La Cour supérieure de justice d’Andalousie (CSJA) a empêché l’utilisation, dans la communauté andalouse, de plusieurs expressions et références controversées utilisées dans le programme d’Éducation civique. Plusieurs de ces expressions font référence à la théorie du « genre », aux relations homosexuelles et aux questions d’options sexuelles. La Justice andalouse considère que ces mentions constituent « une invasion illicite » dans le domaine de la morale, du droit et de l’éthique.
Le jugement du tribunal des contentieux administratifs de la CSJA considère que ces contenus « nuisent aux droits fondamentaux des parents, car puisqu’il s’agit d’une matière obligatoire qui vise explicitement à former moralement les élèves, elle viole la liberté de pensée et de religion des citoyens ainsi que le pluralisme politique, valeurs supérieures de l’ordre juridique ». En mars, la CSJA a reconnu aux parents le droit à l’exemption du programme d’Éducation civique, un fait sans précédent, car ce cours « fait usage de concepts indubitablement idéologiques ou religieux comme l’éthique, la conscience morale ou les conflits moraux. »
Les arguments de la Cour supérieure andalouse
La Cour supérieure (CSJA) fait valoir qu’« en effet, le programme viole » le principe de neutralité idéologique parce que le règlement qui précise le programme « révèle clairement qu’il s’agit de transmettre nettement plus que les principes de liberté, de justice, d’égalité et de pluralisme politique repris dans la Constitution et que le programme dépasse l’apprentissage théorique et pratique des principes démocratiques de coexistence ».
La Cour précise qu’il faut, entre autres, supprimer les références à «l’idéologie du genre», à savoir l’idéologie de la construction sociale du rôle sexuel, à l’« attitude critique envers les stéréotypes homophobes » et aux paragraphes du programme qui disent vouloir favoriser un respect des « diverses préférences sexuelles » et vouloir rejeter « toute discrimination pour raison de genre » et enfin au fait que, selon le programme d’éducation civique, l’école «doit éviter la simplification de la définition des identités sexuelles».
Le tribunal déclare que « les parents ont le droit d’enseigner à leurs enfants une conception de la sexualité conforme à leurs convictions. » En cela, il récuse le programme d’éducation civique qui affirme que «l’identité sexuelle ne définit pas l’homme et la femme en tant que tels, mais qu’elle est le fruit d’une certaine conception culturelle ou d’un accident biologique ; c’est-à-dire que le sexe biologique ne définit pas une personne, mais que c’est plutôt l’affaire d’un choix sexuel délibéré».
En outre, la Cour déclare au sujet de l’affirmation selon laquelle les droits de l’Homme dépendent du contexte ou de la conjoncture historique et sont susceptibles d’être créés ou abrogés qu’« il s’agit d’un point de vue idéologique qui ne fait pas partie de la norme constitutionnelle ».
Toutefois, même si le tribunal considère que ces parties du programme sont incompatibles avec la neutralité obligée de l’État, il rejette les recours contre le reste du programme relatifs aux cellules mères ou à la liberté de chaque établissement de choisir les contenus de ce programme.
Les passages litigieux du programme abrogés
— « L’exercice responsable de ces droits et devoirs comportera une préparation aux défis soulevés par une société en mutation qui nécessite des citoyens et citoyennes disposés à une coexistence fondée sur le respect mutuel et une culture de paix et de la non-violence, capables de reconnaître et de respecter les différences culturelles et qui rejettent tout type de discrimination pour raison de naissance, de ressources économiques ou de condition sociale, de genre, de race ou de religion». Abroge « de genre » (Programme du primaire et du secondaire).
— « L’éducation doit viser au respect des diverses préférences sexuelles des personnes et des groupes sociaux ». Abroge « des diverses préférences sexuelles » (« options vitales » en espagnol). (Programme du secondaire)
— « Puisque la construction de l’identité [sexuelle] est une tâche complexe, il est nécessaire que la contribution de l’école à ce processus de construction évite toute simplification et analyse essentialiste et qu’elle assume plutôt une perspective complexe et critique ». Le paragraphe au complet est abrogé. (Programme du secondaire).
Jugement complet (en castillan)
Voir aussi:
Le multiculturalisme, un utopisme malfaisant