Le commissaire Gérard Bouchard a rabroué un participant qu’il a accusé de tenir «des paroles très injurieuses à l’endroit des immigrants».
Voici les paroles en question telles que tenues par Régis Simard, un ingénieur à la retraite:
« Je dénonce l’aplaventrisme des immigrants devant leurs leaders religieux. Les Québécois ont appris à respecter et à se faire respecter. On ne peut accepter que des immigrants se soumettent à des rites rétrogrades. On a mis le petit catéchisme de côté et on demande aux immigrants d’en faire autant. […] J’ai vécu dans le fondamentalisme religieux catholique et je prône la laïcité »
Bouchard aurait répondu «Vous les qualifiez de rétrogrades. Vos propos sont sans nuances. De quel droit osez-vous vous prononcer sur tous les immigrants ? Que connaissez-vous d’eux ?»
Monsieur Simard a soutenu que les jeunes filles se voilaient pour poser un geste politique. À ce moment Gérard Bouchard lui a indiqué la porte en disant : «Ce que vous nous servez, ce sont des préjugés. Dans un débat public, vos propos sont inacceptables. Je vais vous demander de céder votre place à quelqu’un d’autre.»
Pourtant, les propos tenus par cet intervenant reflètent une inquiétude exprimée dans les médias et les lignes ouvertes. Le franc-parler d’un homme ordinaire ne plaît visiblement pas à Monsieur Bouchard.
Rien dans les propos de Monsieur Simard rapportés dans les médias ne pourraient être tenus pour diffamatoires ou haineux en cour. Il semble que la liberté d’expression ait ses limites à la commission Bouchard-Taylor. Cette limite se définit par un discours poli qui plane au dessus de l’expression populaire.
Qualifier de préjugé une opinion politique qui diverge de la sienne est fort maladroit. On serait tenté de renvoyer à Bouchard la même question. Que connaît-il lui-même des jeunes filles voilées qu’il défend? Le port du voile pour des motifs politiques est documenté et fait parti des mise en garde de nombreuses musulmanes féministes qui se battent contre la montée de l’idéologie islamiste en Occident – voir l’excellente entrevue de Chahdortt Djavann sur le voile.
Quand bien même il s’agirait de préjugés, un préjugé n’est jamais que l’expression d’une crainte populaire. Cette commission publique n’a pas le mandat de juger de la qualité des interventions mais celui de saisir le pouls d’une population.
Nous invitons le commissaire Bouchard à constater que le discours cru de Monsieur Régis Simard peut être présenté de manière tout à fait éloquente en écoutant l’excellente entrevue de Bill Moyers avec le polémiste américain Bruce Bawer. Évidemment, on espère que Monsieur Bouchard n’en soit pas rendu au point de censurer les intellectuels des États-Unis.
Cet incident ainsi que le récent commentaire de Charles Taylor publié dans the Guardian démontrent à quel point les deux commissaires ne sont pas aptes à accomplir la tâche qui leur a été assignée.
Source: Bouchard rabroue un participant, Journal de Québec, 19 septembre 2007