L’article Développement psychologique d’un djihadiste publié récemment sur Point de Bascule permet de dégager les facteurs qui déterminent les individus à embrasser la cause de l’islam radical. Il nous donne aussi un aperçu sur les méthodes privilégiées par les organisations islamistes pour attirer et embrigader les jeunes musulmans.
Commentaire et analyse par Helios d’Alexandrie, qui se poursuivra dans un prochain article
Tawfik Hamid décrit la réalité religieuse en Égypte durant les années soixante; d’une part une religiosité plutôt superficielle, un attachement plus culturel que religieux à l’islam, et d’autre part l’emprise de croyances populaires (anciennes) sur les mentalités; «…j’ai absorbé ces croyances en grande partie de mon environnement plutôt que de mes parents. Elles étaient partagées par la plupart des enfants autour de moi.» La plus marquante est celle qui affirme la supériorité de l’islam sur le christianisme et qui justifie la ségrégation. Les enfants apprennent très tôt à juger et à déprécier les camarades de classe sur la seule base de leur appartenance et de leur pratique religieuse. Il est remarquable que cette réalité ait été celle d’une école chrétienne tenue par des religieuses; les jeunes musulmans qui y sont éduqués n’y développent pas nécessairement de l’estime ou de la tolérance envers les chrétiens. Le sentiment de supériorité intoxique très tôt les jeunes mentalités, il établit une base solide pour le fanatisme.
Mais un autre élément entre en jeu, la difficulté pour le jeune musulman d’acquérir une éthique personnelle en dehors du catalogue du halal (permis) et du haram (interdit): «Je savais aussi que mes transgressions seraient punies par la torture dans l’enfer éternel…on nous a enseigné que si nous n’étions pas de bons musulmans (surtout si nous ne faisions pas nos prières cinq fois par jour), un « serpent chauve » nous attaquerait dans la tombe». Voilà qui engendre l’angoisse et pousse les jeunes musulmans à une pratique religieuse de type obsessionnel. Elle les rend aussi très dépendants des imams auto-proclamés, ces derniers s’érigeant en véritables directeurs de conscience et juges sans appel sur tout ce qui est halal ou haram.
«L’idée de mourir en martyr offrait une parfaite échappatoire à l’effroyable angoisse du châtiment éternel. Mourir comme un shahid, en fait, était le seul acte qui garantissait pleinement le paradis après la mort.» L’auteur a acquis cette conviction à l’âge de 9 ans suite à une leçon d’arabe où les versets 169 et 170 de la sourate 3 lui ont été enseignés « Ne crois surtout pas que ceux qui sont tombés pour la Cause d’Allah soient morts. Ils sont, au contraire, bien vivants auprès de leur Seigneur qui les comble de Ses faveurs (d’être martyrs); ils sont heureux d’être reçus au sein de la grâce du Seigneur, et ravis que leurs compagnons de combat qui ne les ont pas encore rejoints ne connaîtront ni peur ni chagrin ».
On peut bien sûr s’interroger sur la pertinence d’enseigner ces passages du coran à de jeunes enfants. Si on se place dans le contexte politique de l’époque, on comprend que le gouvernement égyptien avait intérêt à préparer les jeunes esprits au sacrifice suprême. L’Égypte de Nasser, dans sa quête du leadership des pays arabes et dans sa confrontation avec Israël et l’occident impérialiste, consacrait une grande partie de ses ressources aux forces armées. Elle cherchait en même temps à mobiliser le peuple. Une propagande guerrière très nourrie lui était adressée où les thèmes nationalistes alternaient avec le djihad dans le sentier d’Allah, les versets qui s’y rapportaient était abondamment cités. C’est ainsi que le nationalisme arabe et le socialisme d’État ont pavé le chemin à l’islamisme.
Pourquoi un enfant issu d’une famille laïque et cultivée a-t-il développé cette hantise de la mort et de l’au-delà? Le père est décrit comme agnostique ayant épousé des idées philosophiques qu’il ne cherchait pas à imposer à son entourage et qui a encouragé ses enfants à cultiver leur esprit critique. On est possiblement face à une situation où le cheminement spirituel de l’enfant n’a pas été pris en charge par les parents. Le vide a été comblé par la religiosité ambiante et l’enseignement religieux à l’école.
Confrontés à la doctrine islamique officielle, les musulmans laïques se retrouvent constamment en position inconfortable. L’humanisme dont ils font preuve n’a pas d’ancrage dans les textes fondateurs de l’islam; ils ne peuvent donc réaliser l’harmonisation nécessaire entre leur foi et les valeurs qu’ils professent. À bien des égards, l’éthique primitive faite d’interdits et de menaces de l’enfer ne s’accorde pas bien avec l’éthique personnelle, le rejet des non-musulmans et les appels au djihad encore moins. Cependant les musulmans laïques n’ont pas osé prendre leurs distances des aspects les plus contestables de l’islam; le fait que le coran soit littéralement la parole d’Allah constitue dans ce cas un obstacle insurmontable. Face à un enfant obsédé par les visions de l’enfer et de plus en plus préoccupé par les obligations et les interdits, les parents se sont retrouvés impuissants à redresser la barre et incapables de proposer une alternative.
La foi dans l’islam est faite de certitudes absolues pour tout le contenu révélé même s’il est contredit par la réalité ou l’expérience. Elle entraîne inévitablement chez le croyant un changement profond de sa façon de voir les choses et une restructuration de la vie sociale. …« Allah m’a ordonné de combattre et de tuer tous les non-musulmans jusqu’à ce qu’ils disent, « il n’y a pas de Dieu sauf Allah ». Suite à la lecture de ce hadith, je me suis résolument tourné vers Nagi (ami chrétien), et lui ai dit : « Si nous voulons appliquer l’islam correctement, nous devrions appliquer ce hadith pour toi. » À ce moment j’ai soudain commencé à voir Nagi comme un ennemi plutôt que comme un ami de longue date ».
Bien avant que se manifestent avec éclat les sentiments d’intolérance et de haine à l’égard des chrétiens, les jeunes musulmans traversent une période où leur vision du monde se contracte graduellement pour se conformer au contenu révélé. Le jeune croyant s’adapte de moins en moins à la réalité, il refoule ses élans naturels et ses sentiments, modifie son attitude et son comportement pour adapter sa réalité aux exigences de l’islam.
L’influence du groupe est souvent déterminante: «Ce qui a davantage endurci mon attitude sur cette question a été l’avis que j’ai reçu de nombreux camarades de classe musulmans dévoués, qui m’ont mis en garde contre l’amitié avec des chrétiens. Ils ont fondé leurs conseils sur le verset suivant : « ô les croyants ! Ne prenez pas pour alliés les Juifs et les Chrétiens ; ils sont alliés les uns des autres. Et celui d’entre vous qui les prend pour alliés, devient un des leurs (un infidèle). Allah ne guide certes pas les gens injustes. ». (Coran 5:51)…. je me suis senti obligé comme musulman de limiter mes relations avec mes amis chrétiens. L’amour et l’amitié que je ressentais pour eux avaient été transformés en manque de respect, simplement parce que je tenais à obéir aux commandements de ma religion.» Les germes du suprématisme islamique et de la ségrégation se trouvent là; les non-musulmans sont des êtres à la fois pervers et inférieurs du fait de leur incroyance, ils sont rejetés par Allah et doivent par conséquent être rejetés par les croyants. S’il n’obéit pas à cette injonction, le jeune musulman risque à son tour d’être rejeté.
Le chemin qui mène de l’islam à l’islamisme est très court. La frontière entre les deux est à toutes fins pratiques inexistante. L’école prépare le jeune musulman à l’islamisme mais c’est à l’université qu’il s’engage définitivement dans cette voie. Le monde a été surpris d’apprendre que les terroristes du 11 septembre étaient tous détenteurs de diplômes universitaires. Certains d’entre eux avaient une maîtrise ou préparaient leur doctorat – les derniers attentats déjoués en Angleterre étaient planifiés par des médecins, l’un d’eux est neurochirurgien. On peut à juste titre parler de paradoxe islamiste; l’emprise de l’obscurantisme sur les mentalités est proportionnelle au niveau de scolarité. Plus les islamistes sont instruits, moins ils réfléchissent par eux-mêmes.
Ce phénomène s’explique en partie par l’origine non-islamique de la science. En s’engageant dans des études supérieures, le musulman s’aventure sur un terrain largement défriché par les incroyants. D’une certaine façon il se trouve en territoire occupé et contrôlé par l’ennemi. Or la science, comme toute chose créée, vient d’Allah – l’acquérir chez les incroyants est permis, s’instruire est aussi une autre façon de s’approprier les armes de l’ennemi pour mieux le combattre – mais cela exige une vigilance de tous les instants pour ne pas se laisser contaminer par l’esprit critique et pour éviter de tomber dans l’admiration des sociétés où la science s’est développée …«car toutes leurs œuvres ici-bas seront vaines et tout ce qu’ils auront accompli sur Terre sera sans valeur.» (Coran 11:15-16).
Faire comme les incroyants, s’appuyer sur la science pour réfléchir, examiner, critiquer alors que la réponse a été définitivement donnée par Allah dans le coran constitue une forme d’apostasie: «… l’acte même de la pensée (fikr) transforme quelqu’un en infidèle (kufr)…Ton cerveau est comme un âne, [un symbole d’infériorité dans la culture arabe] qui peut seulement te mener à la porte du palais du roi [Allah]. Pour entrer dans le palais une fois que tu as atteint la porte, tu dois laisser l’âne [ton esprit inférieur] dehors. » Un musulman vraiment dévoué ne pense plus mais obéit automatiquement aux enseignements de l’islam». L’interdiction de penser s’impose avec d’autant plus de force que les personnes visées par cette interdiction sont mieux outillées pour réfléchir. Elle remonte d’ailleurs aux origines de l’islam. Durant la dizaine d’années où il a prêché à la Mecque, Mahomet n’a connu que des frustrations, ayant été constamment confronté au scepticisme et aux quolibets de ses concitoyens (c’est pourquoi, une fois vainqueur, il pris autant de plaisir à décapiter ceux qui s’étaient moqués de lui). Cette « expérience douloureuse » l’a convaincu d’établir la crédulité et l’obéissance aveugle comme critères de supériorité dans le domaine de la foi.
L’islamisation naît de la peur de l’au-delà. La damnation est promise aux non-musulmans et aux musulmans non-observants ou transgresseurs. Cette angoisse conduit à l’observance méticuleuse des obligations et au rejet non moins obsessionnel des interdits. Le rejet et la haine des incroyants deviennent par conséquent des obligations religieuses. L’islamisation s’appuie également sur les récompenses promises au croyant et sur le statut infiniment supérieur qui lui est octroyé. Renoncer à ses propres sentiments et à sa capacité de juger est la condition pour accéder au statut de « bon musulman ». S’islamiser c’est se déshumaniser, voilà sur quelle base on devient un islamiste prêt à être enrôlé dans le djihad.
Le djihad violent est largement médiatisé. En tant qu’instrument de domination, il remplit le rôle d’adjuvant au djihad non violent. C’est ce dernier qui nous touche de plus près via les tentatives d’islamisation de notre société. Par conséquent, il devient important de comprendre comment on devient islamiste et pourquoi cette idéologie constitue un véritable danger pour les sociétés libres et démocratiques.
L’analyse se poursuivra dans un prochain article
Par Helios d’Alexandrie
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