Dans son blogue du 23 mai sur le site du Journal de Montréal, Lise Ravary reproche au Musée des religions de Nicolet d’avoir été partenaire en 2011 de la conférence organisée par McGill et l’Université de Montréal qui adopta une proposition (article 12.4) visant à empêcher le dénigrement des religions.
Reprenant les propos de quatorze intellectuels de renom qui avaient signé une lettre commune pour s’opposer à cette proposition à l’époque, Lise Ravary la condamna, de même que la Déclaration générale dont elle fait partie, en écrivant que «la Déclaration universelle des droits de la personne par les religions du monde vise à interdire la critique de la religion».
Simon Jodoin lui réplique dans le Voir qu’en écrivant que l’article 12.4 vise à interdire la critique de la religion, alors que la formulation exacte de 12.4 est qu’il vise à en interdire le dénigrement, Lise Ravary accomplit un «tour de prestidigitation». Il ajoute ceci :
D’une déclaration affirmant le droit de ne pas voir sa religion «dénigrée», Lise Ravary conclue à une «interdiction de critiquer»… Comme si «dénigrer» et «critiquer» étaient des synonymes dans son esprit…
(…) Conclure que s’interdire de dénigrer signifie tout bonnement «interdire de critiquer», c’est simplement burlesque.
En adoptant cet article 12.4, la conférence McGill/UdeM visait à encourager les législateurs à adopter des lois condamnant le «dénigrement des religions». Or, tout le danger est là puisque ce que A considère être la critique légitime d’une religion peut facilement être considéré par B comme du dénigrement, particulièrement si B est un islamiste. Qui tranchera? Si B en a les moyens financiers, il peut poursuivre A pour l’intimider, l’inciter à ne plus critiquer sa religion ainsi que tous ceux qui partagent son opinion.
Voici la portion de la déclaration de 2011 signée par quatorze intellectuels de renom qui explique comment l’interdiction du dénigrement ouvre la porte à une interdiction de la critique pure et simple :
Si ce principe devait être adopté et codifié sous forme de loi, cela ouvrirait la porte à d’innombrables poursuites judiciaires pour blasphème et autres motifs car il suffirait d’affirmer qu’une critique de la religion constitue un dénigrement pour poursuivre en justice. En fait, cette Déclaration absout à l’avance toutes les religions de quelque critique que ce soit.
En 2011, d’autres analystes en sont venus à la même conclusion, dont Mario Roy et Richard Martineau :
Mario Roy (La Presse – 12 septembre 2011) : De droit divin
Est-il souhaitable que tout citoyen possède «le droit que sa religion ne soit pas dénigrée dans les médias ou dans les maisons d’enseignement»? Ainsi que le «devoir de (…) s’assurer qu’aucune religion n’est dénigrée dans les médias ou dans les maisons d’enseignement»?
Ce nouveau droit à l’immunité et ce nouveau devoir de police constituent l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme, telle que la conçoivent des théologiens notamment rattachés à l’Université McGill et à l’Université de Montréal. Ce projet d’amendement circule depuis une décennie. Et il a été à nouveau étudié lors de la Conférence mondiale des religions du monde tenue dans la métropole, mercredi dernier…
En plein XXIe siècle, sommes-nous en train de rêver?
Pas du tout. Des intellectuels occidentaux dont la carrière est entièrement construite sur le socle de la liberté d’expression réclament bel et bien l’amputation de cette liberté même. Ils prennent de cette façon le relais de l’Organisation de la coopération islamique (57 pays membres, dont l’Arabie saoudite, le Pakistan et l’Iran).
(…) Faut-il aller plus loin et criminaliser pour de bon la critique de la religion? Nos théologiens sont libres de faire joujou avec cette idée, mais le reste de la société ne doit permettre sous aucun prétexte qu’elle se matérialise.
Richard Martineau (Canoë – 7 septembre 2011) : Dieu n’aime pas la critique
Selon cette proposition, il serait interdit de reprocher quoi que ce soit aux religions. Pas de caricatures, pas de parodies humoristiques, pas de blagues, pas de regard critique, rien. Le moindre petit bémol serait considéré comme un blasphème grave, un appel à la haine et une atteinte à la liberté de culte. (…)
BIENTÔT, UNE LOI?
Vous me direz que je panique pour rien, que ce ne sont que des mots sur papier, une déclaration abstraite qui ne veut rien dire et qui n’aura aucun poids.
Détrompez-vous… Cette résolution visant à interdire TOUTE critique de la religion est le nouvel outil qu’ont trouvé les extrémistes musulmans pour faire taire leurs détracteurs. Ils la brandissent à toutes les conférences internationales.
Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU l’a même adoptée le 12 avril dernier, il y a cinq mois! Pire: en juillet dernier, à Istanbul, la Secrétaire d’État Hilary Clinton a rencontré l’Organisation de coopération islamique afin que cette résolution contre la diffamation des religions ait des bases légales et devienne une loi effective dans les pays signataires de la Déclaration des droits de l’Homme!!!!
Dans le passé, plusieurs personnes ont été poursuivies pour avoir exprimé des critiques légitimes de propos tenus par des leaders musulmans. Le cas de Mark Steyn et du Maclean’s vient immédiatement à l’esprit. L’adoption de lois fondées sur le principe adopté à Montréal en 2011 faciliterait encore un peu plus la tâche des islamistes.
En 2008, Maclean’s fut poursuivi pour avoir publié un extrait du livre America Alone de Mark Steyn (Google Livres) dans lequel il s’inquiétait des ambitions de l’islam radical et commentait sur les implications d’une arrivée massive de musulmans en Occident.
Mark Steyn : The Future Belongs to Islam (Le futur appartient à l’islam), Maclean’s, 20 octobre 2006
Dans son article, Steyn cita Muammar Kadhafi et le leader musulman Mullah Krekar, vivant en Norvège, qui prédirent que l’Europe allait devenir musulmane d’ici quelques décennies. Dans une interview à un important journal norvégien, le leader musulman Krekar affirma en 2006 que les musulmans se reproduisent «comme des moustiques» et qu’en conséquence, l’Europe deviendra islamique. Et pour ça, Maclean’s fut poursuivi pour islamophobie.
Steyn ne faisait que rapporter des propos qui avaient été publiés par un important journal norvégien. Accuser Steyn d’islamophobie, c’est un peu comme si on avait accusé Churchill de germanophobie dans les années ‘30 parce qu’il citait Hitler et se déclarait convaincu de ses intentions de réarmer l’Allemagne et de provoquer un conflit mondial.
Muammar Kadhafi lors d’une assemblée publique en 2006 à Tombouctou (Mali) : Les cinquante millions de musulmans vivant en Europe vont en faire un continent musulman d’ici quelques décennies. Allah mobilise la nation musulmane de Turquie et l’ajoute à l’Union européenne. Voilà un autre cinquante millions de musulmans. Il y aura cent millions de musulmans en Europe. L’Europe est dans une situation très difficile et les États-Unis également. Ils devraient accepter de devenir musulmans dans les années qui viennent ou alors de déclarer la guerre aux musulmans. (vidéo du discours)
Mullah Krekar au journal Dagbladet d’Oslo en 2006 : Nous sommes ceux qui allons vous changer. Regardez seulement comment les choses se développent en Europe. Le nombre de musulmans augmente comme celui des moustiques. Chaque femme occidentale dans l’Union européenne produit en moyenne 1,4 enfant alors que chaque femme musulmane dans les mêmes pays produit 3,5 enfants. Notre façon de penser se révélera plus efficace que la vôtre.
Après que la plainte contre Steyn et le Maclean’s ait été rejetée, le journal Canadian Arab News interrogea Khurrum Awan du Canadian Islamic Congress sur ses intentions d’en appeler. Awan avait témoigné en faveur des plaignants. Awan répondit le plus candidement du monde : «Nous ne prévoyons pas en appeler puisque nous avons atteint notre objectif stratégique qui était de faire augmenter le coût associé à la publication de matériel anti-islamique» (Canadian Arab News 9 décembre 2008 – Archives PdeB).
Selon un estimé d’Awan, Roger’s Publishing a dépensé 500 000$ uniquement pour se défendre contre la plainte déposée en Colombie-Britannique. Si on additionne les sommes que l’entreprise a dû payer pour se défendre contre les autres plaintes se rapportant au même article, on atteint les 2 millions $ (Canadian Arab News 9 décembre 2008 – Archives PdeB).
Comme l’explique Brooke Goldstein du Lawfare Project, les islamistes ont recours au jihad juridique (lawfare) lorsqu’ils jugent être désavantagés au plan militaire. Elle définit le jihad juridique comme un usage abusif des lois et du système judiciaire pour miner la règle de droit et la liberté d’expression dans les sociétés occidentales.
Références supplémentaires
Point de Bascule (Septembre 2011) : Dossier – Deuxième conférence sur les religions du monde (Montréal)
Point de Bascule (26 septembre 2011) : Jihad juridique : une réponse à Patrick Lagacé