Pays qui ont annoncé qu’ils ne participeraient pas à la conférence: Allemagne, Australie, Canada, Etats-Unis, Italie, Israël, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas.
La Suisse hésite: La ministre suisse des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey, a déclaré dimanche “ne pas être certaine” de prendre part à la conférence de l’ONU Durban II sur le racisme où son pays pourrait être représenté à un niveau moindre par crainte de dérapages.
GENEVE — Durban II vouée à l’échec avant même d’avoir commencé? Après le fiasco de la première édition, la deuxième conférence des Nations unies sur le racisme s’ouvre lundi à Genève sur fond de boycotts de plusieurs pays, dont les Etats-Unis et l’Allemagne, qui craignent qu’elle serve uniquement de plate-forme aux pays musulmans pour s’en prendre à Israël et interdire toute critique de la religion.
Après l’annonce samedi de la non-participation des Etats-Unis, le flou régnait dimanche quant à la présence de plusieurs pays européens à l’ouverture des débats lundi au Palais des nations à Genève. Si les Pays-Bas ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils boycotteraient la conférence, jugeant “inacceptable” le projet de déclaration finale, d’autres pays de l’Union européenne tentaient encore de faire bouger les lignes avant de faire connaître leur décision.
Après des consultations avec d’autres pays de l’Union européenne, l’Allemagne a annoncé dimanche soir qu’elle ne serait pas présente à Genève, de peur que la conférence “ne serve de “plate-forme pour d’autres intérêts”.
La France, elle, ne devrait faire connaître officiellement sa position que lundi matin, affirmait-on dimanche soir au Quai d’Orsay. En début d’après-midi dimanche, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner avait jugé “important de présenter un front commun de l’Europe”.
Un front européen rendu impossible par les boycotts des Pays-Bas, de l’Italie, et de l’Allemagne. De plus, la présidence tchèque de l’Union européenne a estimé que la décision de participer ou non revenait à chacun des Etats membres, et qu’une position commune pourrait ne pas être arrêtée.
Pour sa part, la Grande-Bretagne va envoyer en Suisse une délégation de diplomates dirigée par son ambassadeur aux Nations unies à Genève, Peter Gooderham. “A ce stade, nous allons y aller, mais nous surveillerons la conférence, nous ne voulons pas d’une déclaration finale qui soit faussée”, a expliqué un porte-parole du Foreign Office tenu à l’anonymat, précisant que Londres s’opposerait à “une tentative inacceptable de nier l’Holocauste”.
Durban II, également boycottée par Israël, la Nouvelle-Zélande, l’Australie et le Canada, a pour but de mesurer les progrès accomplis en matière de lutte contre le racisme depuis la première réunion de ce type il y a huit ans en Afrique du Sud. Mais, du fait de la présence de nombreux dirigeants musulmans, parmi lesquels l’Iranien Mahmoud Ahmadinejad, les pays occidentaux craignent que la conférence ne serve de forum mondial à la critique d’Israël, et s’opposent au concept de “diffamation de religion” que les pays islamiques ont un moment souhaité inclure dans la déclaration finale.
La première conférence de Durban avait été le théâtre de controverses du même type. Les Etats-Unis et Israël avaient claqué la porte avant la fin, hostiles à un avant-projet de déclaration qui critiquait l’Etat hébreu et assimilait le sionisme à du racisme. Ces deux éléments ne figuraient pas dans le communiqué final, qui s’était contenté d’évoquer la “détresse des Palestiniens” et le droit d’Israël à la sécurité. Le projet de déclaration de Durban II ne mentionne pas nommément Israël, mais conserve la référence à la “détresse des Palestiniens”.
De plus, pour de nombreux pays, le concept de “diffamation de la religion” équivaudrait à une interdiction de critiquer l’islam et représenterait, de fait, une limitation de la liberté d’expression. Les références directes à la “diffamation de religion” et à Israël ont toutefois été abandonnées le mois dernier lors des débats préparatoires, mais elles pourraient réapparaître dans le document final, à moins qu’un consensus ne soit trouvé entre toutes les parties.
Après avoir laissé planer le doute sur leur présence, les Etats-Unis ont annoncé samedi qu’ils ne se rendraient pas à Genève. Dimanche, Barack Obama a expliqué que le projet de communiqué final risquait de répéter Durban I, où “les gens ont exprimé un antagonisme envers Israël d’une manière qui a souvent été complètement hypocrite et contre-productive”.
La haute commissaire des Nations unies pour les droits de l’Homme Navi Pillay, qui présidera la conférence Durban II, s’est déclaré “choquée et profondément déçue” par la décision de Washington.
Le pape Benoît XVI a, quant à lui, salué la tenue de la conférence, disant espérer que les participants travaillent “avec un esprit de dialogue et d’acceptation réciproque, pour mettre fin à toutes les formes de racisme, de discrimination et d’intolérance”.