Le CIC réitère sa demande pour un espace dans Macleans lui permettant de réfuter Mark Steyn. Le fait pour un gouvernement (via une commission des droits) de forcer la publication de documents est une violation de la liberté de la presse. Au-delà de la loi, quel principe éthique ou norme sociale peut exiger d’un éditeur privé qu’il offre de la publicité gratuite au CIC ? Dans un pays libre, aucune publication ne devrait être tenue de remettre ses presses à ses détracteurs. – Editorial Board du National Post
Rappel des faits
Un groupe d’étudiants en droit musulmans de Toronto et le Canadian Islamic Congress (CIC) ont déposé une plainte devant trois commissions des droits de la personne contre le magazine Maclean pour la publication d’un article tiré du bestseller de Mark Steyn, America Alone. Maclean a affiché l’article sur son site Internet sous le titre : The Future belongs to Islam. Lisez Le Congrès islamique du Canada se sert de la Commission des droits de la personne pour faire de la censure
Le magazine a publié des pages de courrier des lecteurs réagissant à l’article. L’éditeur en chef Ken Whyte a même rencontré les étudiants en droit offensés pour voir ce qui ferait leur affaire.
Ils ont exigé un article de cinq pages, écrit par un auteur de leur choix, à être publié par Macleans sans édition ni retouche. Whyte a refusé, avouant qu’il préférerait voir le magazine faire faillite que se rendre à cette demande.
Le 9 avril, dans une démarche inhabituelle, la Commission ontarienne des droits de la personne a émis un communiqué annonçant qu’elle n’ouvrirait pas d’enquête sur la plainte, sa loi constitutive ne lui donnant pas le pouvoir de le faire. Dans le même communiqué, elle condamne toutefois Maclean et Steyn pour racisme et islamophobie. (ici) Lisez: Affaire Maclean et Steyn : le Globe fustige la Commission ontarienne des droits et aussi: Commissions des droits et censure : trahison de la position internationale du Canada. Les plaintes devant la Commission fédérale des droits de la personne et devant celle de la Colombie-Britannique procèdent toujours.
Les étudiants en droit et le CIC ont convoqué une conférence de presse appelant Maclean à un règlement du litige à l’amiable. L’Editorial Board du National Post consacre un édito à ce dernier développement.
Traduction de: National Post Editorial Board: The fight against censorship; Maclean’s Magazine vs. the Canadian Islamic Congress, par Yoni Goldstein, le 1er mai 2008.
L’éditorial Board du National Post: La lutte contre la censure: le magazine Macleans contre le Congrès islamique canadien
Est-ce une violation des droits humains d’appliquer le terme yiddish chutzpah au groupe d’avocats musulmans essayant de poursuivre le magazine Macleans devant divers forums des droits de l’homme pour avoir imprimé les opinions «islamophobes» du collaborateur Mark Steyn? Nous espérons que non: nous croyons qu’aucun mot anglais ne convient mieux aux plaignants.
Il y a trois semaines, la plainte engagée par le Congrès islamique canadien (CIC) a été renvoyée (quoique avec un déploiement sans précédent de regret) par la Commission ontarienne des droits de la personne. Comment Faisal Joseph, l’avocat du CIC et ses aides de Osgoode Hall répondent-ils à l’échec? En convoquant une conférence de presse et répétant à quelques détails près leur demande pour un espace substantiellement égal leur permettant de réfuter Mark Steyn. (Ils ont cédé, par exemple, sur leur insistance à être autorisés à contrôler la conception graphique des pages où leur réfutation serait publiée)
Non seulement cela, mais ils présentent leur demande comme un nouvel effort en vue d’une «conciliation raisonnable» – tout en s’engageant à aller de l’avant avec leurs menaces légales à l’extérieur de l’Ontario si Macleans n’est pas assez «raisonnable» à leur goût. «D’une façon ou d’une autre, ce sera traité, soit par voie d’entente soit par une décision imposée», a déclaré M. Joseph.
Admettons-le, ça prend un général audacieux pour demander à l’ennemi de se rendre si peu de temps après une bataille perdue. Mais il y a peut-être peu d’autre chose que le CIC et son équipe juridique pouvaient faire. Leur campagne contre Macleans a suscité un tollé de protestations contre les dispositions des lois fédérales et provinciales sur les droits de la personne qui transforment l’expression responsable d’opinions en sujets de quasi-litiges bidons devant des commissions dépourvues d’un semblant de règles de preuve et de procédure, et qui permettent à peine d’établir une défense de vérité. Les conservateurs se mobilisent, et les libéraux, pour la plupart, soit sont leurs frères d’armes soit ils maintiennent un silence embarrassé.
Seule une poignée de gauchistes radicaux – y compris Jack Layton, dont la lettre de soutien a été lue par M. Joseph hier à la conférence de presse – défendent la lutte du CIC contre Macleans comme une lutte naturelle et acceptable dans une civilisation démocratique à maturité. Ce n’est peut-être qu’une question de temps avant qu’ils se réunissent pour former une sorte de groupe du style George Galloway appelé «Gauchistes contre la Liberté de la presse» (ils pourraient s’appeler entre eux les «Chiens de garde GCLP»).
Ne nous y trompons pas: l’enjeu au cœur de ce débat, c’est la liberté de la presse. L’histoire et la jurisprudence des pays anglophones (est-ce qu’on enseigne encore le Alberta Press Act Reference dans les facultés de droit?) nous enseignent que le fait pour un gouvernement de forcer la publication de certains documents est une violation de cette liberté, tout comme ce serait le cas pour l’interdiction de les publier.
Dans un certain sens, c’est pire: un éditeur censuré, après tout, prend normalement la décision de remplir l’espace libre selon son propre jugement, mais celui sur qui on exerce une contrainte positive pour le forcer à publier voit effectivement sa presse saisie et utilisée à des fins qu’il pourrait ne pas approuver.
Les éditeurs de publications d’intérêt général offrent généralement, par courtoisie, des espaces pour la réfutation – ce qui est possible uniquement entre des parties qui agissent librement – et par respect pour les idéaux extrajudiciaires de débats robustes et d’humilité intellectuelle. Macleans offre beaucoup de cet espace,
ayant littéralement imprimé des dizaines de lettres opposées à l’article de M. Steyn. Le CIC ne saurait prétendre que des vues contraires n’ont jamais été diffusées. Ill peut seulement prétendre que ses propres opinions ne l’ont pas été avec le niveau de stridence qu’il recherchait.
Oubliez les détails de la loi pendant un moment. Quel principe éthique ou norme sociale peut possiblement exiger d’un éditeur privé qu’il offre de la publicité gratuite au CIC? Ou à quelqu’un d’autre? Même si leur prétention que Mark Steyn est un Muslim-basher était factuellement exacte, ce concept ne serait-il pas quand même à la fois odieux et peu pratique?
Dans un pays libre, aucune publication ne devrait être tenue de remettre ses presses à ses détracteurs. Nous nous attendons que Macleans suivra ce principe alors qu’il prépare sa réponse à la dernière manœuvre du CIC.
Voir aussi:
Affaire Maclean et Steyn : le Globe fustige la Commission ontarienne des droits
Commissions des droits et censure : trahison de la position internationale du Canada