LE JIHAD DE TARIQ RAMADAN EXPLIQUÉ PAR SES SAVANTS MUSULMANS
Partie 1 de 3
Par Marc Lebuis et Étienne Harvey de Point de Bascule
Version adaptée anglaise publiée dans Human Rights Service le 3 mai 2010
Voir la [partie 2] et la [partie 3]
For English adapted version please click [HERE]
Introduction de HRS:
L’actuelle tournée nord-américaine de Tariq Ramadan a suscité un enthousiasme généralisé de la part des médias et des partisans de l’apaisement islamiste. Cependant, à Montréal, Point de Bascule a organisé une conférence de presse mettant en vedette plusieurs importantes sommités musulmanes de calibre international. Elles sont venues donner un portrait factuel de Tariq Ramadan qui contraste avec l’image feutrée que les médias visant le grand public ont l’habitude de lui attribuer. Voici le premier d’une série de trois articles de Marc Lebuis et Étienne Harvey, de Point de Bascule, qui présente Tariq Ramadan et ce qu’il représente à partir de ses propres déclarations et de celles des « savants » de l’islam qu’il admire.
Lors de son passage à l’émission française On n’est pas couché le 27 septembre 2009, Tariq Ramadan mentionna qu’il traite les textes fondamentaux de l’islam avec beaucoup de sérieux. C’est pourquoi il dit rechercher les conclusions des spécialistes de ces textes, les « savants musulmans » comme il les appelle, avant d’adopter une position particulière sur une question donnée. Ramadan exprima cette position alors que la question de la lapidation était discutée.
« (0:10) Le monde musulman se réfère à des textes. (…) (0:55) Ces textes-là sont des textes que les musulmans prennent au sérieux. J’ai trois questions à poser aux savants musulmans à travers le monde: que disent les textes, quelles sont les conditions qu’il faut pour appliquer ces textes et dans quel contexte social? Ces questions-là, elles sont fondamentales. (…) (1:18) Je suis contre l’application (de la lapidation) car ces trois conditions ne sont pas réunies. »
[Tariq Ramadan à l’émission On n’est pas couché – Extrait archivé sur YouTube]
Ainsi, Ramadan ne rejette pas le recours à la lapidation parce que c’est barbare mais parce que certaines conditions n’auraient pas été remplies. Et si l’on remplissait ces conditions, la lapidation deviendrait-elle soudain acceptable dans l’esprit de Ramadan? Aucun des participants à l’émission de télévision ne lui posa la question.
L’objet de cet article n’est pas de rouvrir le débat sur la lapidation mais plutôt d’utiliser l’approche suggérée par Ramadan dans l’extrait-vidéo pour mieux comprendre la mission que lui-même et l’organisation des Frères musulmans en général se sont donnés en Occident. Plus on approfondit les textes des exégètes de l’islam qu’il reconnaît, plus il apparaît clair que les fondements intellectuels de sa pensée sont incompatibles avec les principes sur lesquels la civilisation occidentale a été bâtie.
En guise d’introduction, voici six déclarations sur la mission générale de l’islam telle qu’elle a été expliquée par les savants de Tariq Ramadan. Ce dernier a endossé chacun d’eux en les citant ou en les identifiant comme des autorités reconnues de l’islam.
« L’islam cherche à détruire tous les états et les gouvernements opposés à l’idéologie et au programme de l’islam où qu’ils soient sur terre. (…) Le but de l’islam est d’instaurer un état fondé sur son propre programme et sa propre idéologie. (…) L’objectif du jihad islamique consiste à éliminer les systèmes non-islamiques et à les remplacer par un système islamique de gouvernement. L’islam n’entend pas limiter cette révolution à un seul état ou à quelques pays; le but de l’islam c’est de provoquer une révolution universelle. »
– Sayyid Abul Ala Maududi (1903 – 1979)
[Jihad in Islam, Beirut, The Holy Koran Publishing House, pp. 6 et 22 – Muhammadanism.org]
Tariq Ramadan identifie Maududi comme l’un des principaux représentants du courant dit « réformiste salafiste » auquel il appartient.
[Tariq Ramadan, Western Muslims and the Future of Islam [New York, Oxford University Press, 2004, p. 26]« Dans l’islamisme, la guerre contre les infidèles est d’obligation divine, parce que cette religion s’adresse à tous les hommes et qu’ils doivent l’embrasser de bon gré ou de force. On a donc établi chez les musulmans la souveraineté spirituelle et la souveraineté temporelle, afin que ces deux pouvoirs (religieux et politique) s’emploient simultanément dans ce double but. Les autres religions ne s’adressent pas à la totalité des hommes; aussi n’imposent-elles pas le devoir de faire la guerre aux infidèles; elles permettent seulement de combattre pour (leur) propre défense. Pour cette raison, les chefs de ces religions ne s’occupent en rien de l’administration politique. »
– Ibn Khaldoun (1332 – 1406)
[Les prolégomènes, Partie I, Paris, Imprimerie impériale, 1863, p. 469 – Google Livres]
Tariq Ramadan qualifie l’apport intellectuel d’Ibn Khaldoun de « décisif » non seulement à l’islam mais à l’Europe et à l’Occident en général.
[Tariq Ramadan, What I believe, New York, Oxford University Press, 2010, pp. 83-84]« Quiconque a reçu l’appel du Messager (Muhammad) et n’y a pas répondu doit être combattu jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’association et que la religion soit entièrement à Allah. (Coran 2:193 et 8:39) »
– Ibn Taymiyya (1263 – 1328)
[The Religious and Moral Doctrine of Jihad – Texte reproduit par Rudolph Peters, Jihad in Classical and Modern Islam, Princeton, Marcus Wiener, 2008, p. 44 – Google Livres]
Tariq Ramadan a qualifié la contribution doctrinale d’Ibn Taymiyya à l’islam de « riche et importante ».
[Tariq Ramadan, Radical Reform, New York, Oxford University Press, 2009, p. 66]« Les mushrikun (mécréants) du Dar al-Harb (camp de la guerre) sont divisés en deux catégories: premièrement, il y a ceux que l’appel de l’islam a rejoints mais qui l’ont refusé et qui ont pris les armes. Le chef de l’armée peut choisir comment les combattre (…) selon ce qu’il juge être dans le meilleur intérêt des musulmans et le plus douloureux pour les mushrikun. (…) Deuxièmement, il y a ceux que l’invitation à l’islam n’a pas encore rejoints. De telles personnes sont rares de nos jours puisqu’Allah a propagé l’appel de son Messager. (…) Il est défendu de (…) lancer une attaque contre eux avant de les inviter à l’islam, de les informer des miracles du Prophète et de leur en exposer les preuves afin de les inciter à accepter l’invitation. S’ils refusent d’accepter malgré cela, la guerre est déclenchée contre eux et ils sont traités comme ceux qui ont été rejoints par l’appel de l’islam. »
– Habib Al-Mawardi (972 – 1058)
[The Laws of Islamic Governance – Texte reproduit par Andrew Bostom, The Legacy of Jihad, Amherst, Prometheus Books, 2005, pp. 27-28]
Tariq Ramadan reconnaît l’autorité d’al-Mawardi et s’y référa quand il aborda la gestion de la zakat (la contribution financière obligatoire des musulmans).
[Tariq Ramadan, Western Muslims and the Future of Islam, New York, Oxford University Press, 2004, p. 192]Dans son texte intitulé Le traitement des mécréants et des hypocrites par le Prophète depuis le début de ses activités de Messager jusqu’à sa mort, Ibn al-Qayyim expliqua que durant les premières années de l’islam, le traitement des non-musulmans passa par quatre étapes distinctes. Le niveau de coercition auquel les non-musulmans furent soumis s’accrut au fur et à mesure que les forces de l’islam augmentèrent. Comme continuent de le faire les islamistes contemporains, les « savants musulmans » des siècles passés adaptaient les tactiques du jihad aux conditions qui prévalaient sur le terrain. À la quatrième et dernière étape décrite par Ibn al-Qayyim, les musulmans doivent attaquer les non-musulmans pour la seule raison qu’ils n’adhérent pas à l’islam.
PATIENCE
« Durant ses treize premières années comme Messager, Muhammad appela le peuple à se tourner vers Dieu en prêchant, sans se battre et sans exiger la jizya (taxe imposée aux non-musulmans). Il lui fut prescrit de se restreindre et de pratiquer la patience et la longanimité.»
PERMISSION DE SE DÉFENDRE
« Puis, il lui fut ordonné d’émigrer et plus tard la permission lui fut accordée de se battre.»
OBLIGATION DE SE DEFENDRE – INTERDICTION D’ATTAQUER
« Puis, il lui fut ordonné de combattre ceux qui l’avaient attaqué et d’épargner ceux qui ne lui avaient pas fait la guerre.»
OBLIGATION D’ATTAQUER
« Plus tard, il lui fut ordonné de combattre les polythéistes jusqu’à ce que la religion de Dieu soit complètement dominante.»
– Ibn Al-Qayyim (1292 – 1350)
[Zad al-Mitad – Passage cité par Sayyid Qutb, Milestones, Damascus, The Holy Koran Publishing House, 1978, pp. 94-95][Extrait d’Ibn Qayyim dans Milestones – Utilisez l’expression « For thirteen years » comme clé de recherche pour retrouver rapidement les passages dans le texte.]
Tariq Ramadan approuve le théoricien du jihad Ibn al-Qayyim et reprend sa formule selon laquelle « tout ce qu’on retrouve dans le Coran et la Sunna (les actions et les paroles de Muhammad) est en harmonie avec le bien de l’humanité ».
[Tariq Ramadan, Western Muslims and the Future of Islam, New York, Oxford University Press, 2004, p. 42 – Google Livres]« Il est obligatoire pour nous (musulmans) de se battre contre eux (les infidèles) après leur avoir transmis l’invitation (d’adhérer à l’islam) et ce, même s’ils ne se battent pas contre nous. »
– Hassan Al-Banna (1906 – 1949)
[Five Tracts, Translated by Charles Wendell, Berkeley, University of California Press, 1978, p. 147]
Tariq Ramadan a endossé l’héritage idéologique de son grand-père fondateur de l’organisation des Frères musulmans dans les termes suivants :
« J’ai étudié en profondeur la pensée de Hassan al-Banna et je ne renie rien de ma filiation. Sa relation à Dieu, sa spiritualité, son mysticisme, sa personnalité en même temps que sa pensée critique sur le droit, la politique, la société et le pluralisme restent des références pour moi, de cœur et d’intelligence.(…) Son engagement aussi continue de susciter mon respect et mon admiration. »
[Alain Gresh et Tariq Ramadan, L’Islam en questions, Sindbab, 2002, pp. 33-34 – Texte cité par Caroline Fourest, Frère Tariq: Discours, stratégie et méthode de Tariq Ramadan, Paris, Grasset, 2004, p. 19]
Les nouveaux alliés canadiens de Ramadan à la Muslim Association of Canada indiquent approuver la doctrine d’al-Banna dans les termes suivants: « La MAC adopte et fait tous les efforts pour appliquer l’islam tel que défini dans le Coran, les enseignements du Prophète (pbsl) et tel qu’il a été compris dans le contexte contemporain par le regretté imam Hassan al-Banna. La MAC considère cette idéologie comme la meilleure représentation de l’islam tel qu’il fut présenté par le Prophète Muhammad (pbsl). »
[http://www.macnet.ca/about-mac.php]
Jihad offensif et jihad défensif
Dans sa compilation On jihad (Sur le jihad), Hassan al-Banna a regroupé les principaux versets du Coran, les principaux hadiths et quelques textes d’exégètes consacrés au jihad. Rappelons que les hadiths consignent des paroles et des actions attribuées à Muhammad. Sur leur site internet, les alliés de Tariq Ramadan à la Muslim Association of Canada (MAC) dirigent leurs lecteurs vers le site islamiste youngmuslims.ca qui offre une importante bibliothèque virtuelle de classiques islamistes dont ce texte d’al-Banna.
[La page des liens suggérés par la MAC – http://www.macnet.ca/Links/][Bibliothèque virtuelle islamiste – http://web.youngmuslims.ca/online-library.html?lsection=Concepts&orderid=][On jihad d’al-Banna – http://web.youngmuslims.ca/online_library/books/jihad/index.htm]
Parmi les versets qu’il cita pour expliquer le jihad, Al-Banna retint le 9:29 :
9:29 « Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre (les chrétiens et les juifs), jusqu’à ce qu’ils versent la capitation (jizya) par leurs propres mains, après s’être humiliés.»
La jizya est une taxe spéciale que les non-musulmans doivent payer pour avoir la vie sauve là où la charia est appliquée. En mai 2009, la presse indienne annonça qu’après avoir pris le contrôle d’une région dans le nord-ouest du Pakistan, les talibans imposèrent la jizya aux sikhs qui y vivaient. N’ayant pas obtenu l’argent qu’ils convoitaient, les talibans détruisirent plusieurs maisons et pillèrent de grandes quantités de biens.
[Times of India / 2 mai 2009]Al-Banna établit une importante distinction entre le jihad défensif et le jihad offensif. Il cita les imams Malik (c. 711 – 795) et al-Nawawi (1234 – 1278) pour préciser la différence. Le jihad défensif survient quand une population musulmane est attaquée chez elle tandis que l’offensif a lieu lorsque les musulmans attaquent les infidèles dans leurs propres territoires pour y faire triompher l’islam. Selon la doctrine traditionnelle de l’islam, les musulmans doivent participer à un jihad de type offensif au moins une fois par année.
Jihad offensif
« Le jihad dans la voie d’Allah dans le but d’honorer la Parole d’Allah Tout-Puissant à chaque année est un fard kifayah (un devoir collectif). Si certains le remplissent, les autres en sont exemptés. »
« Si (les non-musulmans) demeurent dans leurs propres territoires, alors le jihad n’est pas une obligation pour tous les musulmans. En autant qu’un nombre suffisant de musulmans y participent, les autres sont dégagés de ce devoir. »
Jihad défensif
« Si (les non-musulmans) envahissent l’un de nos territoires, sa population a l’obligation de les repousser de toutes ses forces. (…) Chaque esclave, pauvre, fils et débiteur doit se préparer pour la guerre même s’il n’en a pas la permission. »
« (Le jihad) devient un fard ‘ayn (une obligation individuelle) comme la prière et le jeûne, quand l’imam l’annonce et que l’ennemi attaque la population d’une région donnée. (…) Dans ce cas, il devient obligatoire pour les femmes et les esclaves même s’ils n’ont pas la permission de leurs maris et de leurs maîtres. Il est aussi obligatoire pour le débiteur même si son créditeur désapprouve. (…) Les parents ont le droit d’empêcher leur enfant de participer (au jihad) seulement s’il est fard kifayah (jihad offensif). »
[Five Tracts of Hasan Al-Banna, Translated by Charles Wendell, Berkeley, University of California Press, 1978, p. 148 – Disponible à youngmuslims.ca]Dans un document qu’il présenta en 1990 à un symposium islamiste qui s’est tenu en Algérie et qui visait à discuter des tâches qui confrontaient les islamistes pour la période 1990 – 2020, le leader spirituel des Frères musulmans Youssef Al-Qaradawi rappela que Hassan Al-Banna recourait souvent à la formule suivante pour indiquer son penchant pour le jihad offensif:
« Donnez-moi douze mille croyants et avec eux je conquerrai les montagnes, traverserai les mers et envahirai les territoires. »
[Priorities of The Islamic Movement in The Coming Phase (Les priorités du mouvement islamique à la prochaine étape), chapitre 3, section Belief Based Education is the Foundation (Une éducation fondée sur la foi sert de fondement) – Disponible sur witness-pioneer.org]Lire, voir et écouter:
Voir et écouter la conférence de Presse: La menace islamiste au Québec
Conférence Re-Salut à toi, Tariq Ramadan! Re-Salut à ses loyaux militants et admirateurs!
Partie 2/3 – La conquête de l’Occident par le jihad idéologique
Partie 3/3 – Tariq Ramadan à la télévision iranienne