Un nombre grandissant d’étrangères financièrement aisées, provenant surtout de l’Afrique francophone, accouchent ici dans le seul but de garantir un passeport canadien à leur enfant. Plusieurs d’entre elles retournent dans leur pays sans même payer pour les services médicaux obtenus aux frais des contribuables canadiens. Ces femmes qui exploitent le système disent vouloir que leur enfant bénéficie éventuellement du système canadien d’assurance maladie et des subventions aux études universitaires.
Il y a une grave anomalie dans nos lois qu’il faut s’empresser de corriger. Il n’existe pas une telle chose qu’un droit fondamental pour tous les habitants de la Terre d’obtenir la citoyenneté canadienne, surtout pas en exploitant notre traditionnelle générosité.
Traduction de: Maternity ward tourists, par Tom Blackwell, National Post, le 20 février 2009
Un nombre grandissant de femmes enceintes en provenance de pays étrangers accouchent ici dans le seul but d’obtenir la citoyenneté canadienne, disent des médecins, ce qui soulève des questions sur une tradition de longue date en droit de l’immigration.
À Montréal, plusieurs de ces « touristes enceintes » ont omis de payer pour les services hospitaliers, privant les obstétriciens de rémunération. En Colombie-Britannique, une récente affaire d’abus d’enfant a mis au jour un service qui semble cibler les parents chinois pour leur permettre de donner naissance au Canada et assurer un passeport canadien à leur nouveau-né.
Ce phénomène n’est pas entièrement nouveau. Il y a quelques années, des rapports ont fait état d’une agence de Colombie-Britannique qui organisait des « voyages de maternité » pour les parents de la Corée du Sud. En 2005, la fille d’un général syrien a accouché ici et des rapports ont révélé que c’était pratique courante chez l’élite politique du pays.
Une récente série de cas à Montréal a privé des médecins de milliers de dollars de rémunération, et ils tentent d’attirer l’attention sur la question. Dans la plupart des cas, il s’agit de parents relativement aisés de pays francophones du monde en développement, a déclaré le Dr Gaétan Barrette, président de la Fédération québécoise des médecins spécialistes.
« Les obstétriciens ont observé une hausse récente du nombre de ces cas», a-t-il dit. « C’est assez étonnant. Des femmes viennent pour un accouchement, et elles reviennent une deuxième fois puis une troisième fois voir le même médecin aux mêmes fins. On a affaire à des familles [étrangères] dont tous les enfants ont un passeport canadien. »
Les mères racontent à leur médecin que cette pratique inhabituelle est un investissement dans l’avenir de leurs enfants qui pourront accéder à l’éducation et tirer profit de l’assurance-maladie au Canada plus tard dans la vie, dit le Dr Barrette.
« Nous avons affaire à des gens qui ont assez d’argent pour se payer un voyage au Canada, y prendre une petite vacance, avoir un bébé puis retourner chez eux. »
Toute personne née en sol canadien – sauf les enfants de diplomates – acquiert automatiquement la citoyenneté et a droit à des services comme l’assurance-maladie et les subventions à l’éducation universitaire. Bien que les visiteurs puissent se voir refuser un visa en raison de certains problèmes de santé, la grossesse ne constitue pas un motif de refus, a déclaré Nicholas Fortier, porte-parole de Citoyenneté et Immigration Canada.
En fait, les femmes enceintes disent parfois aux fonctionnaires canadiens que le but de leur visite est d’accoucher ici, dit-il. Dans ces cas, elles doivent prouver qu’elles peuvent subvenir à leurs besoins pendant leur séjour au Canada et couvrir les frais médicaux encourus, mais elles ne sont pas dissuadées de venir ici, a déclaré M. Fortier.
« Je ne suis pas au courant que c’est présentement un sujet de grande préoccupation», a-t-il dit au sujet du phénomène du « baby touristing ».
Le Canada fait partie des pays fondés sur l’immigration qui accordent la citoyenneté sur la base du jus soli – le droit du sol – un principe qui date de l’époque où ils ont voulu encourager les enfants des nouveaux arrivants à rester pour aider à construire le pays, a déclaré Sergio Karas, un avocat en droit de l’immigration à Toronto.
Certains pays ont toutefois ajouté des exigences, telles que celle voulant que l’un des parents ait un statut légal de résident au pays, a-t-il dit. La Nouvelle-Zélande a resserré ses règles à la suite de voyages pour fins d’accouchement dans ce pays.
Personne ne suggère qu’une femme enceinte devrait se voir refuser des soins médicaux. Mais certains critiques remettent en cause l’idée d’accorder automatiquement la citoyenneté aux nouveau-nés. Ils soulignent qu’un citoyen canadien adulte qui a vécu toute sa vie à l’étranger pourrait s’installer ici, profiter des services financés par les contribuables, et même parrainer ses parents en vertu du programme de réunification familiale.
«Ce sont des gens aisés qui ne veulent rien d’autre qu’une police d’assurance», a dit M. Karas, un avocat en droit de l’immigration de Toronto. « Je pense qu’il y a quelque chose de fondamentalement erroné dans ce concept … C’est purement égoïste. Il n’y a aucun avantage pour nous là-dedans. »
L’Hôpital général juif de Montréal reçoit plusieurs cas de « bébés passeport » chaque année, principalement en provenance du Maroc et d’autres pays africains de la francophonie, a déclaré Dr Louise Miner, directrice du service d’obstétrique de l’hôpital.
De nombreuses femmes viennent avec un «portefeuille rempli d’argent » et paient pour les services reçus. En fait, dans le cas des mères qui font des arrangements à l’avance avec un médecin, l’hôpital exige qu’elles paient à l’avance, dit-elle. Mais d’autres se présentent à l’hôpital pour la première fois quand elles sont en travail, et quittent sans payer, a dit le Dr Miner.
Elle a également des problèmes avec l’octroi automatique de la citoyenneté canadienne aux nouveau-nés. «Ces gens exploitent le système. »
Les obstétriciens sont censés être payé 400 $ pour un accouchement normal, mais ils ne reçoivent rien quand une ressortissante étrangère quitte sans payer, dit le Dr Barrette. Pour certains obstétriciens, cela s’est avéré « un fardeau financier important ».
Le cas survenu en Colombie-Britannique a été médiatisé quand un nouveau-né a été transporté d’urgence à l’hôpital ce mois-ci, souffrant apparemment du syndrome du bébé secoué. Les parents chinois ont raconté au Vancouver Province qu’ils étaient venus à Richmond pour contourner l’exigence d’un seul enfant par couple et pour garantir la citoyenneté canadienne à leur enfant. «Nous voulions que notre enfant ait un bon avenir», a dit le père.
Ils résidaient dans une maison de maternité qui semble accueillir des parents provenant de la Chine. Anna Marie D’Angelo, une porte-parole de la Vancouver Health Authority, a déclaré que l’agence ne réglemente pas ces installations et ne dispose pas d’informations sur leur clientèle. Elle suggère, cependant, que le tourisme de maternité n’est pas un gros problème, du moins à l’Hôpital de Richmond qui n’a accouché que trois ressortissantes étrangères l’année dernière.
À Toronto, un porte-parole du Mt. Sinai Hospital a déclaré que son institution n’avait pas eu beaucoup de cas de bébés passeport.
Pendant ce temps, un forum en ligne sur magicmaman.com, un site Internet basé en France, affiche des commentaires de trois femmes dont la nationalité n’est pas précisée et qui disent qu’elles prévoient venir au Canada pour avoir des bébés comme « touristes », et au moins une internaute a demandé des informations sur ce qu’il en coûte.
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