«La conférence mondiale de l’ONU sur le racisme, ou Durban II, est un test majeur pour les ambitions multilatéralistes du Président Barack Obama. Le texte du projet de déclaration finale diffusé la semaine dernière annonce une parodie des droits humains. Les États-Unis seraient avisés de s’abstenir d’y participer. La solution serait que l’administration Obama travaille plutôt à l’élaboration d’une plate-forme propice à une mobilisation multilatérale qui promeut les droits et libertés universels au lieu de les saper.»
Le texte du projet de déclaration finale de la conférence Durban II qui se tiendra à Genève en avril a été publié la semaine dernière. Ce texte a été négocié par un comité préparatoire dont la présidence est assumée par la Libye et la vice présidence par l’Iran, deux fossoyeurs de droits et libertés. Le Canada a déjà annoncé sa décision de ne pas participer à cette conférence.
Le texte en bref: Seul Israël est pris à partie. Les victimes d’atrocités dans des pays comme le Soudan (Darfour) et le Zimbabwe sont ignorées. La religion, plutôt que les individus, est érigée en titulaire de droits humains. Une hiérarchie des «victimes» est instaurée, l’islam et les minorités musulmanes en Occident étant placées au-dessus de toutes les autres. La liberté d’expression est soumise à la notion islamique de blasphème et limitée par les «sensibilités» d’autrui, ce qui signifie la mort de la liberté d’expression, fondement de la démocratie. Les mesures de lutte contre le terrorisme sont qualifiées de «racistes». Les droits des femmes sont menacés, l’accent étant mis sur le relativisme culturel au détriment des principes universels.
Traduction de: The UN’s insanity continues, par Anne Bayefsky, Daily News, le 30 janvier 2009. Anne Bayefsky est professeur au Touro College de New York et Fellow senior du Hudson Institute:
La conférence des Nations-Unis sur le racisme, ou Durban II, est un test majeur pour les ambitions multilatéralistes du Président Barack Obama. Durban I a été ce festival de haine antisémite qui s’est terminé trois jours avant le 11 septembre 2001. Durban II, l’équivalent onusien du «temps de la revanche», se tiendra à Genève en avril. La Ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, a invité Obama à s’abstenir d’y participer pour ne pas légitimer cette conférence et son message. Le Canada a décidé de ne pas y participer. Mais le nouveau Président américain n’a pas encore décidé si les États-Unis y participeront. Les enjeux de la conférence sont toutefois considérablement plus élevés depuis la divulgation ce mercredi du projet de déclaration finale.
Les propositions suivantes y ont été intégrées : (1) une patrie pour le peuple juif est une forme de racisme, soit une « loi sur le retour fondée sur la race », (2) Israël est coupable « d’apartheid », et (3) le fait que la Shoah ait coûté la vie au tiers de la population juive est une vérité contestable. La référence aux faits entourant la Shoah a été mise [entre crochets] parce que la Syrie et l’Iran ont remis en question le nombre de victimes juives alors que le consensus est la norme qui guide le processus décisionnel.
Au total, six dispositions cherchent à diaboliser Israël en le qualifiant d’«État raciste». Aucun des 191 autres pays membres de l’ONU n’est mentionné. L’objectif est évident: la défaite politique d’Israël dans la même veine que le régime d’apartheid d’Afrique du Sud, vu l’échec des tentatives répétées de vaincre Israël militairement.
Mais Israël n’est pas la seule cible des pays arabo-musulmans et de leurs alliés du tiers monde. Le projet de déclaration s’attaque directement à la liberté d’expression et à la lutte contre le terrorisme. La liberté d’expression devrait être limitée par de nouvelles lois qui interdisent les «représentations négatives, injurieuses ou dégradantes des religions et des personnalités religieuses » et les médias devraient se doter d’un «code d’éthique» à cet égard. Les efforts contre le terrorisme sont décrits comme « des obstacles dans le combat universel contre le racisme.»
L’ordre du jour identifie comme priorité la création d’une hiérarchie des victimes de violations des droits humains, les « minorités musulmanes » étant placées au-dessus de toutes les autres. L’ordre du jour décrit « la validation intellectuelle et idéologique de l’islamophobie » comme un phénomène «extrêmement troublant». L’«anti-arabisme» devient une forme d’intolérance envers une minorité religieuse. Les religions, plutôt que les individus, peuvent être diffamées. Le texte appelle à la préservation des «identités religieuses et culturelles» sans référence aux droits et libertés universels. Une condamnation générale de «toute promotion de la haine raciale ou religieuse qui incite à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence» est assortie du refus d’exiger une décision préalable par un tribunal compétent, indépendant et impartial aux termes d’un procès équitable et public.
En d’autres mots, Durban II n’est rien d’autre qu’une attaque frontale contre les droits et libertés universels par des fondamentalistes religieux.
Les membres de l’Union Européenne ont toujours participé aux travaux de Durban depuis 2001, approuvant ainsi la conférence et son ordre du jour. Bien que certains pays de l’UE se soient vigoureusement objectés aux propositions outrancières, ils ne sont pas parvenus à prévaloir. Comme les véritables démocraties sont une minorité à l’ONU et que l’Organisation de la conférence islamique domine le monde en développement, elles n’ont aucune chance de l’emporter par la seule force du nombre. C’est la raison pour laquelle les diplomates occidentaux insistent sur la règle du consensus.
La règle du consensus fait en sorte que les radicaux contrôlent le processus. Le résultat est que l’Iran, qui assume la vice présidence du comité préparatoire de Durban II, a fait valoir ses priorités en matière de « droits humains » plus que n’importe quel autre État au cours de la séance de négociation tenue la semaine dernière. Le président du comité préparatoire n’a pas arrêté de demander à l’Iran s’il était d’accord avec les propositions avancées, ou de suggérer à l’UE de s’entendre avec l’Iran. Lorsque la séance a pris fin vendredi, l’Iran a été le premier pays à exprimer sa satisfaction à l’égard des travaux préparatoires à la conférence d’avril. Bien que le président de l’Iran appelle ouvertement à un génocide et nie la Shoah, son représentant a dit : « Nous espérons continuer notre travail dans le même esprit. Merci monsieur le Président. »
Il est très important que la nouvelle administration Obama prenne conscience qu’il ne s’agit pas d’une conférence susceptible de faire triompher les États et les valeurs démocratiques. La réalité multilatérale fait en sorte qu’en l’absence d’une majorité des voix, l’UE acquiescera à la déclaration finale sans égard aux compromis exigés pour en arriver à un consensus. Le premier agneau sacrifié sera « Israël raciste », tout comme l’UE l’a permis à Durban 1. En fait, la première conférence de Durban, que les États-Unis et Israël ont quittée, est un bon indicateur de la stratégie de l’UE à l’ONU : l’UE n’est pas prête à quitter la conférence. Ce scénario est évidemment bien connu de la mouvance anti-droits humains. Par conséquent, ces derniers tiennent bon jusqu’à la toute fin de la conférence, et ils lancent alors une carotte à l’UE en guise de «compromis» pour ensuite les regarder tenir des conférences de presse pour leur auditoire local où ils feignent le succès de la conférence.
En somme, Durban II sera une mise à l’épreuve majeure des prouesses multilatérales de Obama. S’il décide d’y participer, il légitimera une parodie des droits humains. Les valeurs et les intérêts américains seront marginalisés tandis que les Européens s’accrocheront au devant de la scène en négociant avec les extrémistes anti-droits humains. En bout de piste, Obama devra soit abandonner les victimes des violations des droits humains, y compris les Juifs, soit quitter la conférence et désavouer le «consensus», ce qui aura pour effet de le marginaliser en ce début de son administration.
La solution évidente consiste à maintenir le statu quo des derniers sept ans et demi, soit la non participation des États-Unis au forum de Durban, tout en travaillant d’arrache-pied à l’élaboration d’une plate-forme plus propice à une mobilisation multilatérale. Il y a là une opportunité, si elle est habilement saisie, d’encourager un multilatéralisme qui promeut les droits et libertés universels plutôt que de les saper.
Voir aussi:
Le Canada dit non à Durban 2, vu le « cirque » de Durban 1
L’Organisation des Nations Islamistes Unies, par Supna Zaidi
L’enjeu de Durban II : la liberté d’expression, par Mark Dubowitz, Wall Street Journal