J’aimerai partager avec les lecteurs mes perceptions en ce qui concerne le problème que pose l’islam au monde occidental.
La peur ressentie par nombre d’occidentaux face à l’islam est fondée, cette peur toutefois les empêche de prendre conscience qu’en contrepartie, du côté des islamistes il existe une peur de l’occident qui, à l’évidence est plus grande et plus profonde.
La peur des occidentaux s’explique par la démographie galopante des musulmans et la diffusion de l’idéologie totalitaire des intégristes.
La peur des musulmans “modérés” (entendre par là les islamistes “pacifiques”) c’est de voir l’islam perdre toute pertinence en tant que source de la législation, mode d’organisation de la société et code de vie. Contrairement au christianisme dont les préceptes imprègnent le psychisme, même chez ceux qui l’ont abandonné, l’islam dégarni de ses contraintes rituelles et de son code de vie laisse peu d’empreintes dans l’esprit des gens. Car l’islam est essentiellement une religion faite de conformismes, elle laisse peu de place à la spiritualité, et bien qu’il existe un mysticisme musulman, il est davantage tributaire du christianisme que de l’islam.
La conscience individuelle tient peu de place dans l’islam, le musulman est celui qui se conforme aux directives précises en ce qui concerne la prière, le jeûne, le pèlerinage, les interdits alimentaires, les relations sexuelles et les gestes de purification. Accomplir les obligations et respecter les conditions de pureté cultuelle qui en garantissent la validité est l’expression même de la soumission à Allah dont les prescriptions, émanant de sa sagesse infinie, ne peuvent en aucun cas être questionnées. D’emblée la foi musulmane interdit de penser. J’en veux pour exemple l’interdiction du vin et des boissons alcoolisées, en boire constitue une transgression de la loi divine. Cependant après la mort, les pieux musulmans qui accèdent au paradis, peuvent boire du vin à volonté, il y a même des ruisseaux de vin qui coulent pour eux à perpétuité. Cette évidente contradiction ne pose aucun problème au musulman, si la vue d’une bouteille de vin peut provoquer chez lui une réaction de révulsion, en revanche il n’éprouvera aucun sentiment de culpabilité en s’imaginant levant le coude au paradis!
Cette interdiction de penser est source de confort psychologique, c’est le bénéfice immédiat de l’adhésion à cette religion. Il s’opère alors une sorte d’anesthésie de la conscience, le croyant, pour peu qu’il se conforme aux prescriptions, accède à la quiétude morale. Sa vie durant il s’évertuera à demeurer dans cette zone de confort que j’appellerai “le jardin d’Éden musulman”.
Cependant le cadre de la vie moderne et sa complexité ont ouvert des brèches dans la clôture du “jardin d’Éden”, les musulmans se sont mis à penser, ils ont aussi sauter la clôture et sont allés regarder ce qui se passait en Europe, ils se sont posés des questions et ont commencé à douter. Du coup la fragilité de l’édifice a été mise en lumière, de la fin de la première guerre mondiale jusqu’au choc pétrolier des années 70, le monde musulman semblait avoir pris le virage de la modernité, on ne rencontrait aucune femme voilée en public, les femmes s’habillaient à la mode du jour et portaient des bikinis sur la plage, la mixité dans les écoles et dans les transports en commun était totale, les relations hommes femmes se libéraient graduellement du carcan de la famille et de la tradition, la prière, le jeûne, la continence et les tabous alimentaires étaient de moins en moins observés, le mode de vie à l’occidental était la norme.
Parallèlement à cette modernisation la réaction islamiste prenait place en Égypte dès les années vingt, l’organisation des frères musulmans a vu le jour aux lendemains de la libération des femmes, elle est demeurée longtemps en marge de la scène politique, la démocratie libérale ayant durant plus de trente ans réussi à détourner l’électorat de la tentation totalitaire que ce mouvement incarnait et incarne toujours.
Avec le retroscope on peut aujourd’hui affirmer que l’islam s’atrophiait graduellement, même si l’attachement à la religion persistait, l’évolution semblait irréversible. Que s’est-il alors passé? D’où est venu ce renversement de vapeur qui a fait basculer le monde musulman dans l’intégrisme? La réponse à cette question n’est pas simple, plusieurs facteurs ont probablement interagi dans le processus, il est possible d’évoquer quelques hypothèses:
* – La démographie galopante et les problèmes économiques ont rendu le mode de vie à l’occidentale de moins en moins accessible à la majorité de la population, d’où le ressentiment face à ce mode de vie et à ceux qui l’incarnaient.
* – La modernisation apparente était superficielle, elle ne s’était pas accompagnée d’une véritable modernisation des schémas de pensée. Les écoles et même les universités se préoccupaient uniquement de bourrage de crâne, les sciences au même titre que le coran étaient apprises par cœur, la curiosité intellectuelle, les idées et l’innovation sont demeurées restreintes.
* – La lenteur et la difficulté rencontrées par certains pays tel que l’Égypte, la Syrie, l’Irak et l’Iran à se réapproprier leur passé et à en faire, en dehors de l’islam, un élément significatif d’identité culturelle.
* – L’absence de démocratie, les régimes à parti unique, les restrictions sur la liberté d’expression, le non respect des droits et libertés et la répression politique ont décimé l’opposition démocratique laissant le champ libre à l’opposition religieuse qui en a largement profité.
* – La persistance à l’intérieur des régimes à parti unique de mesures de discrimination à l’égard des minorités religieuses particulièrement chrétiennes et généralement associées à l’occident.
* – La propagande anti-occidentale de source gouvernementale particulièrement dans les pays arabes professant le socialisme d’état et l’anticolonialisme.
* – La défaite arabe à la guerre des six jours en juin 1967 laquelle a exacerbé le sentiment d’humiliation et d’impuissance face à Israël considéré comme avant-poste du monde occidental en terre d’Islam.
* – Le choc pétrolier, le spectacle de la dépendance de l’occident à l’égard du pétrole et l’enrichissement des monarchies pétrolières ont procuré aux musulmans un sentiment de puissance. Les pétrodollars, en particulier ceux provenant de l’Arabie Saoudite, ont alimenté les mosquées, les madrasas, les associations islamiques caritatives, le prosélytisme islamique et ont financé les partis islamistes.
De tous ces éléments le plus important est probablement l’argent du pétrole. Sans ressources financières l’islamisme n’aurait jamais dépassé le niveau d’un mouvement minoritaire.
La table était mise pour la réaction islamique. Munie de ressources financières presque sans limite et portée par le ressentiment qu’elle alimentait contre tout ce qui est occidental, elle a réussi en moins de deux décennies à asseoir son emprise sur le monde musulman en réussissant entre autres à nouer des ententes de non agression et de collaboration avec les régimes que naguère elle dénonçait.
À l’avantage stratégique, la réaction islamique a joint des manœuvres tactiques efficaces alternant et mélangeant l’intimidation à la séduction pour faire rentrer dans le bercail les brebis égarées, la mesure de loin la plus spectaculaire consistait à voiler les femmes. La minorité s’est voilée par conviction ou par fanatisme, la majorité par conformisme sous la pression “sociale” ou comme en Algérie sous la menace.
La tactique la plus efficace consistait à ramener les musulmans dans “leur jardin d’Éden”, en fait une opération à deux volets: le premier consistait à dénigrer le mode de vie occidentale, à mettre en relief l’absence de valeurs morales des occidentaux et à menacer de l’enfer ceux qui s’y conformaient. Le second consistait à endoctriner les gens et leur inculquer l’observance la plus stricte des obligations et des interdits comme seule voie pour accéder au statut de bon musulman et ainsi mériter le paradis.
La réaction islamique a réussi à encapsuler les musulmans, mais tout danger pour l’islam n’est pas écarté pour autant, l’argent qui coule à flot ne tardera pas à manquer dans une trentaine d’années. Les pays musulmans tirant de l’arrière dans tous les domaines ne pourront pas opposer de résistance efficace contre les avances de la civilisation occidentale, les ressources pétrolières taries, les monarchies obscurantistes d’Arabie et du Golfe retourneront à leurs dromadaires. L’islam intégriste qui se nourrit de coran et de dollars aura de la difficulté à se maintenir à l’aide du seul coran. Par conséquent, pour les islamistes il n’y a pas de temps à perdre, la fenêtre d’opportunité de trente ans doit être exploitée pour établir l’islam d’une manière définitive. La seule avenue qui s’offre est d’islamiser l’occident pour enrayer le danger à sa source. Les facteurs aidant sont de nature démographiques, l’immigration et la natalité musulmanes couplées à la dénatalité occidentale. Les facteurs déterminants sont le prosélytisme à outrance et l’exploitation de l’ouverture et de la tolérance de l’occident pour le paralyser en attendant de lui imposer le programme islamique.
Certains expansionnismes naissent de la peur. L’expansionnisme islamique actuel est de ceux-là même s’il se nourrit des fantasmes des invasions musulmanes du septième et du huitième siècle. Le danger qui guette la civilisation occidentale n’a d’égal que sa difficulté à y faire face d’une façon méthodique et structurée. Si le seul fait de reconnaître ouvertement que l’islam pose un problème éveille autant de réactions émotives, à quoi devrions-nous nous attendre si l’on proposait concrètement des avenues de solution au problème?
Les sociétés occidentales par peur du conflit laissent perdurer le problème, leur inaction si elle se prolonge rendra le conflit inévitable, c’est pour cela que le travail de fourmi est essentiel, il consiste à informer les gens et à les inviter à réfléchir.