Le 7 février 2008, les Chinois quittent une année du cochon de feu pour entrer dans une année du rat de terre. Nous n’étions pas en ligne l’année dernière, année marquée par le phénomène incroyable de la «rectitude politique» envers la minorité musulmane de Chine, qui a valu une interdiction généralisée de toute publicité utilisant des représentations du cochon. Flashback!
Les cochons ont été censurés et toute publicité avec une image ou une dessin de cochon a été bannie de la télévision nationale chinoise CCTV après un ordre de censure qui sème maintenant la confusion.
Cet ordre de censure a fait en sorte que la diffusion de pubs pour les consommateurs de porcs, de saucisses et de hors-d’œuvre n’a pas été autorisées. Le directeur de la marque «Tenlow snacks» dit que les publicités pour les produits de porcs que vend son entreprise avaient pourtant un message positif.
«Les adultes et les enfants croient que les cochons symbolisent la chance et attirent la bonne fortune et la prospérité», a dit Wu Ying, «leur forte taille symbolise la prospérité».
Le dessin animé d’un porc utilisé dans les annonces du Tenlow ne paraît guère subversif. Mais CCTV a ordonné aux grandes agences de publicité de ne pas utiliser des images, des dessins animés ou des slogans avec des porcs «pour éviter des conflits avec les minorités ethniques». Ceci est une référence aux 20 millions de musulmans Chinois, soit environ 2 pour cent de la population du pays.
À l’une des plus importantes mosquées de Shanghai, il y a assentiment général en faveur de cette interdiction. Étant donné le tabou des musulmans sur le porc, ces croyants disent que voir des images de porc à la télévision provoquerait chez eux un sentiment de malaise.
« La Chine construit une société harmonieuse » selon Runsheng Bai Hassan, l’imam de la mosquée. « Nous voyons une telle décision dans le contexte d’une volonté de créer une société harmonieuse entre les Chinois Han et les minorités ethniques ».
Même les grandes multinationales sont conscientes de cette sensibilité. Une publicité de Coca-Cola présente un mignon petit porcelet bravant les rues de la ville pour retourner à la maison pour le Nouvel An chinois. Mais l’entreprise a fait une deuxième version avec des Pandas pour diffusion dans les zones musulmanes.
Ceux qui n’ont pas pris de telles mesures pouvaient anticiper des pertes économiques.
«C’est vraiment jouer dans les plates bandes des activités commerciales», a déclaré Paul French, le représentant d’Acces Asia en Chine. «C’est comme si nous étions dans la deuxième semaine de décembre et qu’on vous disait : Vous pouvez annoncer ce que vous voulez, mais pas d’images du Père Noël ».
French dit qu’il a reçu l’ordonnance mais il y a confusion, «ce n’est pas tout le monde qui ont reçu les mêmes ordres».
French déclare que certaines personnes se sont fait dire « Pas de porcs vivants, mais vous pouvez diffuser des dessins animés ou des dessins de cochons». Et d’autres personnes disent: « Des porcs en aucun cas ».
Pour ajouter encore plus de confusion, une agence aurait partagé à NPR que l’interdiction du cochon dans les publicités aurait été subséquemment révoquée alors que d’autres disent que la mesure est toujours en place. CCTV a refusé d’accorder une entrevue sur l’interdiction de présenter des images de cochons.
Qu’importe la situation, la mentalité derrière l’interdiction est révélatrice.
«La raison sous-jacente est au coeur même de cette vision gouvernementale chinoise qui considère comme sa responsabilité patriarcale de maintenir l’harmonie de la société toute entière» selon Tom Doctoroff, chef de la direction de l’agence de publicité chinoise JWT.
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Il y aussi d’autres interdits, comme faire usage de figures religieuses – par exemple les images de moines bouddhistes ou taoïstes et des icônes nationales comme la grande muraille de Chine – qui doivent être traitées avec précaution. Paul French disait que des ordonnances comme celle de l’an dernier sur les dragons devraient être vues sous l’angle de la montée en puissance de la Chine.
Ces ordonnances reflètent peut-être la façon dont le gouvernement chinois aimerait se voir lui-même: comme le protecteur des groupes minoritaires, le gardien des icônes nationales et l’arbitre ultime de l’harmonie. Mais ce rôle n’est peut-être plus possible.
Une chanson appelée «la chanson du cochon » démontre pourquoi. Cette chanson est consacrée à décrire le museau dégoulinant du porc, sa queue frisée et ses grandes oreilles. Affichée sur l’Internet il y a deux ans, elle est devenue un succès surprise. La chanson a été téléchargée un milliard de fois. Même si Pékin avait voulu l’interdire, la technologie moderne – sous la forme d’Internet – aurait rendu l’initiative impossible.
Vu de l’extérieur, le gouvernement chinois peut paraître monolithique. Mais la saga de l’interdiction du porc démontre comment le gouvernement jongle avec le multiculturalisme, criblé d’insécurité et à la remorque de pressions commerciales, peut-être comme jamais auparavant.