«Les civilisations meurent par suicide, non par meurtre.» — Arnold Joseph Toynbee, historien britannique
Oxford University Press a supprimé des mots comme «allée», «évêque», «chapelle», «empire» et «monarque» de son Dictionnaire Junior et les a remplacés par des mots comme «blog», «transmission à large bande» et «célébrité». Des dizaines de termes se rapportant à la campagne ont également été supprimés.
L’éditeur affirme que les changements ont été apportés pour tenir compte du fait que la Grande-Bretagne est une société moderne multiculturelle et multiconfessionnelle.
Mais des universitaires et des directeurs d’école ont dit que les changements apportés au Dictionnaire Junior de 10 mille mots pourraient amener les enfants à perdre leur patrimoine culturel.
«Notre patrimoine chrétien a marqué notre identité depuis 2000 ans. Prétendre que tout cela est relatif et remplaçable est discutable», a déclaré le professeur Alan Smithers, directeur du Centre pour l’éducation et l’emploi à l’Université de Buckingham. «Les mots choisis sont un reflet très intéressant de la façon dont l’enfance évolue, passant de notre héritage spirituel et du monde naturel vers le monde que les technologies de l’information créent pour nous».
Une analyse des mots choisis par les lexicographes du dictionnaire a révélé que des termes allant de «abbaye» à «saule» ont été supprimés. Ils ont été remplacés par des mots tels que «lecteur MP3», «voicemail» et «document joint».
Lisa Saunders, une mère inquiète qui a soigneusement comparé les éditions 1978, 1995, 2000, 2002, 2003 et 2007 des dictionnaires pour enfants de 7 ans et plus a dit qu’elle était «horrifiée» par le grand nombre de mots qui ont été supprimés, la plupart d’entre eux depuis 2003.
«Le christianisme a encore beaucoup d’adeptes», dit-elle. «L’élimination d’un si grand nombre de mots associés au christianisme aura un effet important sur les nombreuses écoles primaires qui l’utilisent».
Mme Saunders a réalisé que des mots avaient été supprimés quand elle aidait son fils à faire ses devoirs et a découvert que «mousse» et «fougère», qui figurent dans les éditions antérieures à 2004, ne sont plus mentionnés.
«J’ai décidé d’y regarder de plus près et de comparer la nouvelle version avec les anciennes éditions», a déclaré la mère de quatre enfants de Co Down en Irlande du Nord. «J’ai été totalement horrifiée par le grand nombre de mots qui ont été enlevés. Nous savons que la langue évolue et nous ne devons pas trop nous en faire à ce sujet, mais vous ne supprimez pas des centaines de mots importants pour les remplacer par des mots liés aux technologies de l’information».
Anthony Seldon, le maître de Wellington College, une école privée de pointe dans le Berkshire, a déclaré: «Je suis stupéfait que des mots comme “saint”, “renoncule des champs”, “bruyère” et “sycomore” aient tous disparu, et j’en éprouve du chagrin».
«Je pense que le Dictionnaire Junior Oxford doit être prescriptif autant que descriptif. Il doit non seulement proposer les mots qui sont utilisés mais aussi ceux qui doivent être utilisés. Il a le devoir de préserver l’usage de ces mots plutôt que de se prêter aux préférences du public. Nous avons perdu des mots d’une grande beauté. J’aime mieux avoir “pâte d’amande” (marzipam) et “gui” (mistletoe) que “lecteur MP3”.»
Oxford University Press, qui produit l’édition Junior, sélectionne les mots à l’aide du Corpus pour enfants, une liste d’environ 50 millions de mots utilisés dans le langage courant, les livres pour enfants et l’enseignement. Lorsqu’ils font des ajouts ou des suppressions, les lexicographes prennent en compte la fréquence des mots.
Vineeta Gupta, responsable des dictionnaires Junior à Oxford University Press, a déclaré: «Nous sommes limités par la taille que peut avoir le dictionnaire, qui est manipulé par de petites mains. Nous produisons 17 dictionnaires pour enfants avec des choix et des nombres différents de mots».
«Quand on regarde les versions plus anciennes des dictionnaires, il y avait beaucoup d’exemples de fleurs. C’est parce que de nombreux enfants vivaient dans un environnement semi-rural et voyaient les saisons. Aujourd’hui, l’environnement a changé. Nous sommes également beaucoup plus multiculturels. Les gens ne vont pas à l’église aussi souvent qu’avant. Nous comprenons la religion dans un cadre multiculturel, ce qui explique qu’un mot comme “Pentecôte” aurait été là il y a 20 ans mais plus maintenant».
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Voir aussi:
Grande-Bretagne – Oxford bannit le mot “Noël”, pas assez “inclusif”