Accommodements: Réveillée à l’aube pour prier
Par Éric-Yvan Lemay
Le Journal de Québec, le 9 décembre 2009
Les accommodements raisonnables sont au coeur d’une situation problématique qui s’est très récemment déroulée à l’Hôpital Charles-Lemoyne, au grand dam d’une femme catholique.
Une patiente de religion musulmane a été réveillée chaque matin à six heures par du personnel de l’Hôpital Charles-Lemoyne pour réciter ses prières à voix haute, au grand dam de sa voisine de chambre.
«Ça a été l’enfer pendant une semaine. Je n’étais plus capable», lance Lorraine Despaties qui a cohabité avec la dame.
Elle s’est plainte à quelques reprises au personnel, mais on lui aurait indiqué que la directive était de réveiller la dame à la demande de cette dernière. «Quand elle se réveillait, elle ouvrait la lumière et commençait à prier», raconte la dame qui était hospitalisée à cause d’une infection qui s’était logée dans son genou après une opération.
«Exagération»
Il a fallu que son mari se fâche la semaine dernière pour que la situation se règle. «Je leur ai dit que s’ils ne sortaient pas ma femme de là, j’allais mettre ma femme ailleurs. Dans le corridor s’il le faut», lance Roger Morand.
Le lendemain, la dame qui récitait les prières a été transférée dans une autre chambre du troisième étage.
Selon lui, l’accommodement de réveiller la dame aussi tôt le matin n’a aucun sens. «C’est de l’exagération», dénonce-t-il. «Si je me mettais à chanter dans l’hôpital, je me ferais mettre dehors».
Des appels à toute heure
Selon lui, la situation a créé un certain malaise chez les employés qui se sont dits obligés d’agir ainsi. Certains d’entre eux auraient d’ailleurs avoué qu’ils n’avaient pas le choix. Une affirmation démentie par l’hôpital qui se défend de faire du favoritisme.
En plus des prières, la dame recevait des appels à toute heure du jour. En plus des appels, elle recevait également plusieurs visiteurs à la fois et parfois en dehors des heures de visites. Roger Morand et sa femme n’ont pas porté plainte officiellement, estimant que cela pourrait nuire au personnel qui s’est dévoué pour prodiguer des soins hors pair.
Le couple croit toutefois qu’on doit tracer une ligne claire sur le respect de la vie privée, surtout dans le milieu hospitalier. «Ma femme, elle est catholique, et ses prières, elle les fait tout bas», conclut Roger Morand.
Des cas exceptionnels, dit l’hôpital
Le personnel n’a pas à réveiller les patients, sauf pour des raisons médicales ou dans des circonstances exceptionnelles, soutient la direction de l’Hôpital Charles-Lemoyne. On se dit toutefois ouvert aux besoins socioculturels de tous les patients.
«Ce sont des cas très, très rares. On essaie de considérer les besoins de chacun dans le respect des autres», dit la conseillère en communication Annie Laroche.
Refusant de parler du cas précis pour des raisons de confidentialité, on indique que l’hôpital fait des efforts pour changer des patients de chambre lorsque la cohabitation est difficile.
Pour ce qui est du réveil, elle indique que c’est normalement pour des raisons médicales, rarement pour des raisons personnelles. Elle donne en exemple un patient qui doit parler à un proche au téléphone outre-mer. La prière ne ferait pas partie de la liste des raisons pour se faire réveiller.
Pour se recueillir, l’établissement compte une chapelle, mais elle n’est pas nécessairement accessible pour une personne à mobilité réduite. «On doit considérer les besoins socioculturels, malgré les contraintes organisationnelles», indique Annie Laroche.
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