LE CAIRE – Un conservateur, Mohammed Badie, a été désigné à la tête des Frères musulmans égyptiens, principale force d’opposition du pays, a annoncé samedi ce mouvement en proie à de fortes dissensions internes. Il remplace Mehdi Akef, un membre de la “vielle garde” dont le mandat venait à expiration, qui s’était mis lui-même en retrait en octobre dernier en raison des conflits entre conservateurs et réformistes au sein du mouvement.
Mohammed Badie, né en 1943 à Mahalla, dans le delta du Nil, enseigne la médecine vétérinaire à Beni Sueif, une centaine de km au sud du Caire.
Il devient le 8ème “guide” de ce mouvement fondé en 1928 par Hassan al-Bana, qui constitue aujourd’hui la branche la plus ancienne et la plus importante du réseau des Frères musulmans dans le monde.
M. Akef a annoncé lors d’une conférence de presse au Caire que son successeur avait été choisi “par consensus” au sein du Conseil consultatif de la confrérie.
Les conservateurs veulent mettre l’accent sur l’islamisation en profondeur de la société égyptienne, tandis que les réformateurs préconisent une approche plus politique et sont ouverts à des alliances avec l’opposition.
M. Badie, un ancien radical, a de son côté multiplié les déclarations mesurées. « Nous croyons à la réforme progressive par des moyens pacifiques et constitutionnels, nous refusons la violence », a-t-il assuré.
« Les Frères musulmans estiment que tout régime politique doit préserver les libertés individuelles et la démocratie, et ils appuient la séparation des pouvoirs législatif », judiciaire et exécutif, a-t-il poursuivi.
Partisans de l’instauration d’un système fondé sur l’islam et la charia (loi islamique), les Frères musulmans sont toutefois profondément divisés sur la stratégie à tenir.
Ce renforcement du camp conservateur pourrait ainsi marquer un relatif retrait de la confrérie du champ politique, alors que le pays se prépare à des élections législatives à l’automne 2010, puis présidentielle début 2011, estiment des spécialistes.
Le 21 décembre dernier, la confrérie avait déjà annoncé avoir élu un nouveau bureau exécutif à ancrage conservateur et axé sur la religion. Membre dans les années 1960 de la mouvance radicale des Frères inspirée par Sayyid Qutb, exécuté en 1966, Mohammed Badie a plusieurs fois été condamné à des peines de prison.
Les Frères musulmans sont officiellement interdits en tant que parti politique en Egypte, mais relativement tolérés dans les faits, même si leurs membres font régulièrement l’objet d’arrestations.
Ils avaient fait une percée historique aux législatives de 2005, remportant un cinquième des sièges au Parlement avec des députés étiquetés “indépendants”. Depuis, les autorités mènent régulièrement des opérations contre la confrérie, visant notamment ses dirigeants.
Source: (©AFP / 16 janvier 2010 )