Le communiqué de presse a traduit le nom du Muslim Canadian Congress (MCC) comme le «Congrès islamique canadien», ce qui est erroné. Le MCC, une organisation présidée par Farzana Hassan, qui a succédé à Tarek Fatah, est la seule organisation de musulmans authentiquement progressistes au Canada.
Nous endossons entièrement la recommandation de Mme Hassan: c’est au Parlement qu’il appartient de régler la question de la polygamie, quitte à faire appel à la clause dérogatoire, et non aux juges.
Un groupe musulman et deux groupes chrétiens contre la polygamie
Deux organisations chrétiennes évangéliques craignent que les arguments juridiques qui ont ouvert la voie aux mariages de conjoints de même sexe au Canada n’entraînent la légalisation de la polygamie.
L’Institute for Canadian Values et la Coalition de l’action pour la famille au Canada y vont de cette mise en garde «préventive» parce que, selon eux, la polygamie est déjà en train de gagner du terrain, légalement parlant, dans certaines juridictions canadiennes.
Le Congrès islamique canadien, un groupe progressiste qui s’oppose aussi à la polygamie, s’est joint aux deux organismes chrétiens pour une conférence de presse sur la colline parlementaire, mercredi. Mais contrairement aux deux groupes chrétiens, le Congrès islamique, tout en s’opposant à la polygamie, appuie le mariage de conjoints de même sexe.
Les trois organisations disent craindre que les procédures judiciaires en cours contre la secte polygame de Bountiful, en Colombie-Britannique, n’amènent les juges à invalider la loi canadienne actuelle interdisant la polygamie.
«Nous l’avons dit à maintes reprises: dès qu’on redéfinit le mariage une fois, on peut s’attendre à ce que les tribunaux décident de le redéfinir encore deux, trois ou cinq fois, et la prochaine étape pourrait être la polygamie», a soutenu Charles McVety, de l’Institute for Canadian Values. M. McVety a dirigé des manifestations religieuses contre le mariage homosexuel quand celui-ci a été légalisé en 2003.
Farzana Hassan, du Congrès islamique, aborde la question d’un angle différent. Le Congrès islamique canadien a appuyé le droit au mariage de personnes de même sexe, tout en s’opposant à la polygamie, parce que les mariages gais constituent des relations consensuelles, alors que la polygamie est une relation de pouvoir et de domination, a-t-elle expliqué.
Selon Mme Hassan, il y aurait dans la seule région de Toronto environ 100 hommes musulmans polygames.
Des mariages polygames existants prononcés légalement à l’étranger sont déjà reconnus juridiquement en Ontario, à l’Ile-du-Prince-Edouard, au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest, a souligné M. McVety.
Enchâsser la polygamie dans la loi éroderait les lois fédérales sur l’immigration, la famille, l’impôt et le divorce, a fait valoir Brian Rushfeldt, de la Coalition de l’action pour la famille au Canada. «Peut-on imaginer le genre de chaos juridique et moral que cela créerait au Canada?», a-t-il lancé.
La coalition des trois groupes revêt un caractère insolite: les deux organisations chrétiennes font la promotion des «valeurs judéo-chrétiennes» dans les politiques publiques canadiennes, tandis que la charte du Congrès islamique canadien revendique la séparation de la religion et de l’Etat en matière de politiques publiques.
Les trois organisations demandent collectivement au premier ministre Stephen Harper, au ministre fédéral de la Justice, Rob Nicholson, et à tous les autres parlementaires de s’assurer que la polygamie ne soit pas autorisée – même s’il fallait, pour cela, invoquer la clause dérogatoire de la Charte.
Voir aussi:
L’univers secret de la polygamie dans le grand Toronto
Maroc – Combat de femmes contre la polygamie
Canada – Des mormons de Colombie-Britanniques sont accusés de polygamie
Indonésie – Les musulmanes préfèrent le divorce à la polygamie