Un pur plaisir à lire…
La British Broadcasting Corporation, une organisation parrainée par l’État mais gérée de manière indépendante, s’est attirée de vives critiques pour son « double standard » dans sa couverture des attentats de Mumbai. La plupart du temps, les reporters de la BBC ont désigné les terroristes qui ont attaqué Mumbai comme des «militants» ou des «bandits armés ».
MJ Akbar (photo ci-contre), le penseur de renom et rédacteur en chef du magazine Covert, a pris la chose au sérieux. Depuis le 27 novembre, Akbar refuse d’accorder des interviews à la BBC sur les attentats de Mumbai.
De nombreux politiciens britanniques ont également soulevé la question auprès de la direction de la BBC. Steve Pound, un député britannique qui représente North Ealing, a publié une déclaration critiquant fortement la politique biaisée de la BBC qu’il a qualifiée de «pure hypocrisie».
Akbar est allé plus loin et a envoyé un email bien senti à Richard Porter, directeur des contenus à la BBC World News. Le 6 décembre, Akbar a écrit à Porter: «Je veux simplement vous faire savoir qu’après des décennies d’amitié et d’association avec la BBC, j’ai refusé de donner une interview à la BBC sur l’assaut terroriste contre Mumbai. La raison en est simple: je suis consterné, stupéfait et livide face à votre incapacité à décrire les événements de Mumbai comme l’œuvre de terroristes. Vous les avez appelé des bandits armés comme s’il s’agissait de gardes de sécurité en cavale».
Akbar a en outre fait valoir que «lorsque la Grande-Bretagne découvre un groupe d’hommes en train de comploter dans un laboratoire domestique, votre gouvernement n’a aucune hésitation à susciter une tempête internationale, et la BBC n’a pas hésité à les appeler des terroristes. Quand près de 200 vies indiennes sont perdues, vous ne pouvez pas trouver de mots plus convaincants dans votre dictionnaire que «bandits armés».
Akbar a exprimé les vues de nombreux fans indiens de la BBC quand il a dit: «Non seulement êtes-vous pathétiques, mais vous êtes devenus totalement partiaux dans vos reportages. Puisqu’en Inde nous croyons à la liberté de la presse, nous ne pouvons pas faire plus que de protester, mais laissez-moi vous dire que votre crédibilité, construite au fil de longues années grâce à des journalistes indépendants et courageux comme Mark Tully (j’ai le privilège de le décrire comme un ami), est en ruine et ces lambeaux ne seront pas réparés tant que des non-journalistes biaisés comme vous et vos supérieurs seront en charge des décisions. Honte à vous et vos semblables».
Le e-mail d’Akbar n’a pas été ignoré par la BBC. Un réponse courtoise et très britannique est arrivée dans sa boîte aux lettres le 11 décembre. Porter a répondu: «Les lignes directrices au personnel sont très claires, nous n’interdisons pas l’emploi du mot terroriste, mais nous préférons utiliser d’autres mots. Il y a un jugement inhérent à l’emploi du mot terroriste, jugement qui est absent quand nous employons un langage plus précis. «Bandit armé» ou «tueur» ou «poseur de bombes» sont des descriptions précises qui ne comportent pas de jugement. Le mot «terroriste» n’est toutefois pas interdit, et il est fréquemment utilisé dans nos productions, habituellement lorsqu’il est attribué à une personne. Je l’ai entendu à de nombreuses reprises dans notre couverture de Mumbai». Les employés de la BBC sont régis par des directives consignées dans un document public.
Sans entrer dans le détail, Porter a affirmé qu’«Il n’y a pas d’incohérence entre la manière dont la BBC a rapporté les attentats de Mumbai et les événements au Royaume-Uni. Si nous voulons sérieusement respecter notre politique, nous ne pouvons pas faire de différence entre les pays».
En Inde, la plupart des critiques ont fait remarquer que la BBC n’avait pas hésité à qualifier de « terroristes » les auteurs des attentats de juillet 2005. Alors que dans le cas de Mumbai, la BBC a parlé de «bandits armés» et parfois de «présumés terroristes».
Toutefois, Porter, un journaliste de 27 ans d’expérience, a dit : «Cette politique n’est pas biaisée, c’est tout le contraire … mais c’est une politique difficile à faire respecter et elle fait l’objet de nombreuses discussions au siège de la BBC. Nous en avons évidemment discuté à nouveau dans la foulée des attentats de Mumbai, et des commentaires comme les vôtres sont pris très au sérieux par mes collègues de l’équipe éditoriale».
En bref, la BBC veut que ses téléspectateurs et ses lecteurs fassent appel à leur intelligence. Porter a écrit: «Je crois que le public peut former sa propre opinion sur les auteurs des attentats de Mumbai. Les gens n’ont pas besoin qu’on leur donne une étiquette pour se faire une opinion».
De toute évidence, Akbar n’a pas accepté ces arguments. Après avoir remercié la «courtoisie» du e-mail que Porter lui avait adressé, Akbar lui a demandé: «Mais votre réponse ne répond pas à ma question: pourquoi la BBC trouve-t-elle facile de définir un terroriste quand des trains et des bus sont attaqués à Londres, mais doit recourir à des termes non empreints de jugement quand il y a une manifestation flagrante de terrorisme meurtrier à Mumbai? Êtes-vous sérieux quand vous dites que vous laissez le public former sa propre opinion? Alors, pourquoi n’avez-vous pas laissé le public se faire sa propre opinion après le 11/9?»
Akbar a écrit: «Je suppose que ceux qui décident des politiques de la BBC comprennent l’anglais. Il y a une distinction claire entre des bandits armés et des terroristes. Les criminels utilisent des armes à feu, et on peut les appeler des bandits armés. Les criminels utilisent des armes à feu dans le but de commettre des crimes. Les terroristes utilisent des armes à feu, et pire, pour tuer de manière aléatoire des innocents pour faire avancer leur agenda politique ou personnel. Les tueurs qui sont venus au Taj et au Oberoi et à la gare de Chatrapati Shivaji et dans une maison où résidaient des Juifs ne sont pas venus pour voler des œuvres d’art, des biens ou de l’argent. Ils sont venus avec l’objectif déclaré de commettre des meurtres et de semer le chaos».
Quand Akbar était à Londres, de nombreuses manchettes des tabloïds portaient sur des jeunes qui s’étaient fait poignarder. Akbar a dit: «c’était des crimes commis par des hommes armés de couteaux. Al Capone était un bandit armé et je suis sûr que le East End de votre ville produisait autrefois des bandits armés qui commettaient des crimes».
Akbar a dit à Porter: «C’est une honte que la BBC ne voit pas la différence entre un criminel et un terroriste, et ce faisant, choisit de protéger les terroristes en les présentant comme des criminels. Ce n’est pas une question de sémantique. Les terroristes sont toujours heureux de brouiller la définition».
Voir aussi:
États-Unis – L’avocat de djihadistes demande la suppression du mot “djihad”, trop incendiaire