Cliquez pour écouter l’entretien de Marc Lebuis avec Dominique Maurais
Le 10 juin 2015, le gouvernement Couillard a présenté deux projets de loi : le projet de loi 59 sur la prévention et la lutte contre les discours haineux et le projet 62 sur le respect de la neutralité religieuse de l’État. Le directeur de Point de Bascule a été invité à commenter ces propositions par Dominique Maurais de CHOI Radio X à Québec. Marc Lebuis a choisi de se concentrer sur le projet de loi 59 parce qu’il avait été peu commenté dans les médias d’une part et par ce que, d’autre part, son adoption risque de grandement compromettre les activités de Point de Bascule et de tous ceux qui commentent sur la menace islamiste au Québec.
Le projet de loi 59 est, en partie, une réponse du gouvernement Couillard à une requête que lui avait adressée la Commission des droits de la personne du Québec (CDPDJ) et son président Jacques Frémont en 2014. À l’époque, M. Frémont avait demandé au gouvernement d’accorder à la Commission qu’il dirige le pouvoir de poursuivre des individus et des organisations que la Commission juge responsable de discours haineux même quand il n’y a pas de victime spécifique.
Voici la requête de M. Frémont au gouvernement Couillard telle qu’il l’expliqua le 2 décembre 2014 à Michel C. Auger, l’animateur de l’émission 15-18 de Radio-Canada :
Jacques Frémont à Michel C. Auger : Il est évident qu’avec la nouvelle disposition que nous proposons, lorsque par exemple il y a un site web, tout simplement, qui déblatère et qui a des propos, des incitations à la haine par rapport à certains groupes particuliers, pensons aux groupes musulmans, on a vu certains de ces sites, actuellement personne a l’intérêt suffisant pour se présenter chez nous et faire la demande. Avec la nouvelle disposition, à ce moment-là, il y aurait moyen pour nous d’enquêter, nous-mêmes, même si il n’y a pas personne qui se présente.
L’article 6 de la Partie 1 du projet de loi 59 répond à cette requête et prévoit qu’en plus d’être habilitée à recevoir des plaintes du public pour des discours qu’elle pourrait juger haineux, «Elle [la CDPDJ] peut également faire enquête de sa propre initiative». L’article 8 prévoit même que la CDPDJ pourrait demander au tribunal de faire cesser la diffusion de propos sous enquête par un site internet ou un média avant même la conclusion de l’enquête qui vise à déterminer si les propos sont haineux.
Article 8 (Partie 1) du projet de loi 59 : La Commission [la CDPDJ] a l’intérêt pour demander à un tribunal la cessation de la tenue et de la diffusion d’un discours faisant l’objet d’une enquête.
Lors d’une deuxième interview accordée à Radio-Canada le 2 décembre 2014, le président de la CDPDJ, Jacques Frémont, est allé encore plus loin quand il a admis à Jacques Beauchamp, l’animateur de Pas de midi sans info, qu’un des objectifs visés par la Commission était d’empêcher la critique de la religion islamique. Interdire la critique de principes religieux c’est interdire la critique d’idées et cela est évidemment incompatible avec la liberté d’expression reconnue dans une société respectueuse des droits individuels.
Question de Jacques Beauchamp à Jacques Frémont : Pour qu’on comprenne encore mieux, donnez-moi un exemple [des modifications que vous souhaitez voir apporter] avec l’effet que ça aurait. Quelle différence ça ferait en me donnant un ou deux exemples?
Réponse de Jacques Frémont de la CDPDJ : Par exemple, je sais pas… sur un site internet ou sur une page Facebook, comme on a vu, comme on voit régulièrement, il y aurait des gens qui écriraient contre, ché pas, la religion islamique et contre les musulmans en disant des propos, pis on en a vu certains, j’ose même pas les répéter tellement c’est outrageant. Alors, à ce moment-là il y aurait moyen que n’importe qui, membre du public, etc., saisisse et fasse une plainte à la Commission en disant : ‘Ce groupe, ces personnes ont écrit sur les pages internet des propos qui incitent à la haine pour un motif interdit de discrimination et, par conséquent, pourriez-vous intervenir’. À ce moment-là, si jamais la plainte est retenue, si ça correspond à tous les processus, ce groupe pourrait être condamné, être trainé devant le tribunal des droits de la personne pour… et condamné pour les propos qui ont été tenus.
Dans son interview à Michel C. Auger, Jacques Frémont a également déclaré que sa requête au gouvernement pour des changements législatifs se fonde sur des résolutions adoptées par des instances des Nations Unies en la matière. Ce que M. Frémont n’a pas mentionné, c’est que ces résolutions avaient d’abord été proposées par l’Organisation de la coopération islamique (OCI), une entité qui établit une équivalence entre la critique de l’islam, la diffamation de la religion et le discours haineux. L’OCI regroupe 57 gouvernements musulmans et, ensemble, ils constituent le plus important bloc de pays participant aux votes à l’ONU.
À ce jour, autant sous des gouvernements libéraux que conservateurs, le Canada a systématiquement voté contre les propositions de censure que l’OCI cherche à faire appliquer par les pays non-musulmans membres de l’ONU et qui sont implicitement endossées par le président de la CDPDJ, Jacques Frémont. En 2008, le Comité sénatorial canadien sur les droits humains (p. 16 / WebArchive – Archive.Today) souligna que «[L]e Canada s’[est] toujours opposé aux projets de résolution condamnant la diffamation des religions parce qu’ils sont axés sur une seule religion, que la liberté de religion est un droit individuel et non l’apanage d’une religion et que ces résolutions n’abordent pas la question de la liberté d’expression».
Si le gouvernement québécois devait réussir à interdire les commentaires qui portent sur des aspects de la religion islamique qui risquent de déplaire à certains, il deviendra quasi-impossible de ralentir la menace islamiste au Québec puisque tout commentaire sur l’idéologie de ceux qui représente cette menace pourrait être traité comme un commentaire haineux qui indispose un des groupes visés par la Charte des droits et ses auteurs poursuivis par la Commission.
Dans sa présentation du projet de loi 59 à l’Assemblée nationale, le premier ministre Couillard a déclaré ce qui suit :
Philippe Couillard : Face à la menace réelle de la radicalisation, de la violence, des discours haineux et du terrorisme, il faut savoir être vigilants mais surtout unis. La crainte de l’autre, les stéréotypes et le rejet des différences n’ont jamais fait avancer la cause de la liberté et de la paix. Ces attitudes ont plutôt donné des armes nouvelles aux criminels qui veulent s’attaquer aux fondements mêmes de nos sociétés. Notre défi est donc de mieux vivre ensemble et de rejeter d’une seule voix les atteintes aux valeurs de respect, d’ouverture et d’inclusion, des valeurs universelles qui sont aussi les nôtres.
Le sens des propos de M. Couillard c’est que ceux qui s’opposent aux ambitions des islamistes leur donne des arguments pour justifier leur hostilité aux valeurs occidentales. C’est un peu comme si on disait que la jeune fille qui porte une jupe trop courte «donne des armes nouvelles» à son agresseur ou que la mère afghane «donne des armes nouvelles» au Taliban quand elle insiste pour envoyer sa fille à l’école et que pour faciliter le «vivre-ensemble», la mère devrait empêcher sa fille d’aller à l’école.
Les islamistes n’ont pas besoin «d’armes nouvelles» ou de justifications supplémentaires pour détester et combattre les droits individuels garantis par la Déclaration des droits de l’homme de 1948. Les pays membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) n’ont pas eu besoin «d’armes nouvelles» pour se doter de leur propre Déclaration des droits de l’homme en Islam en 1990 précisément parce qu’ils rejettent plusieurs des droits individuels protégés par la Déclaration de 1948, dont celui d’abandonner sa religion pour en adopter une autre ou n’en adopter aucune.
Les documents qui attestent d’un projet d’islamisation et de conquête sont nombreux. Il faut les étudier et comprendre leurs implications, plutôt que d’agir comme si ces documents n’existaient pas, plutôt que de poursuivre ceux qui les commentent en les accusant de crimes haineux.
Références supplémentaires
Point de Bascule (12 décembre 2014) : La Commission des droits de la personne du Québec désire une modification des lois pour faciliter les plaintes, notamment, contre les sites internet qu’elle juge ‘islamophobes’
Point de Bascule (19 décembre 2014) : Le président de la Commission des droits de la personne a confirmé à Radio-Canada qu’il désire s’en prendre à ceux qui critiquent des idées, à ceux qui critiquent la religion islamique en particulier
Point de Bascule (20 janvier 2015) : La Commission des droits de la personne du Québec, l’Arabie saoudite et l’Iran ont condamné l’attaque contre Charlie Hebdo tout en appuyant les restrictions à la liberté d’expression promues par l’Organisation de la coopération islamique
Point de Bascule (23 janvier 2015) : En novembre 2014, Jacques Frémont participa à un forum qu’inaugura le roi du Maroc en déclarant que l’universalité des droits de l’homme n’est pas ‘l’expression d’une pensée et d’un modèle unique’