L’arrondissement de Saint-Léonard installe une clôture pour tenter d’empêcher ceux qui fréquentent le Centre islamique Badr de nuire à la circulation

Adresse originale : http://www.progresstleonard.com/Vie-de-quartier/2013-08-12/article-3347368/Discorde-devant-la-mosquee/1

Auteure : Josianne Desjardins
Référence : Progrès Saint-Léonard, 12 Août 2013

Titre original : Discorde devant la mosquée

Une clôture installée devant une mosquée pour empêcher des musulmans de traverser la rue au mauvais endroit sème la discorde dans le quartier.

La clotûre, qui couvre une partie du terre-plein du boulevard Langelier face au Centre islamique Badr, entre les rues Paul-Émile Lamarche et Belherbe, vise à forcer les citoyens à traverser la rue aux intersections. Elle a été aménagée à la fin juillet par l’arrondissement de Saint-Léonard.

Des centaines de personnes traversent le boulevard les vendredis dès 13 h, jour de la prière, entravant ainsi la circulation. Depuis plusieurs années, des citoyens se plaignent de cet achalandage auprès de l’arrondissement.

En guise d’explication, l’administration a répondu par courriel que « le Poste de quartier 42 a recommandé à l’arrondissement d’ériger un obstacle empêchant la traverse de piétons à cet endroit précis, particulièrement devant le Centre islamiste Badr » puisqu’il s’agit « d’un enjeu de sécurité ».

La clôture inciterait donc « les citoyens à adopter un comportement sécuritaire et à employer les passages piétons existants », poursuit l’arrondissement dans le courriel. Il s’agit d’une installation temporaire, indique Maude Chartrand, chargée de communication à l’arrondissement de Saint-Léonard, précisant qu’aucun échéancier n’a été fixé pour retirer la clôture.

L’installation temporaire n’a pas couté un sous, nous informe-t-on, puisqu’elle avait déjà été utilisée ailleurs dans l’arrondissement.

Par ailleurs, le PDQ 42 prévoit assurer une présence policière dans cette zone afin de « connaître les résultats de cette mesure sur le comportement des piétons ».

Discriminatoire?

Kamal Lichou, un résident du secteur de confession musulmane, considère que cette mesure est discriminatoire et va même jusqu’à parler d’un « mur de la honte », étant donné que la clôture a été érigée tout juste devant la mosquée où il se rend pour prier.

« Il n’y a pas seulement que les gens qui vont à la mosquée qui passent par le terre-plein. Pourquoi ne pas avoir prolongé la clôture vers le sud où se trouvent les cafés? », s’interroge-t-il. Celui-ci croit que d’autres solutions auraient pu être envisagées, tel qu’en marquant au sol les passages piétons.

Hicham El Khoudr, propriétaire de Zakiya, boucherie halal et épicerie fine située face la mosquée, est aussi consterné par la situation. « C’est se moquer des gens d’avoir installé cette clôture! Je trouve vraiment qu’il s’agit d’un manque de respect. C’est frustrant », peste-t-il.

Malgré leur mécontentement, MM. Lichou et El Khoudr se disent conscients que plusieurs fidèles dérogeaient au règlement en traversant le boulevard par le terre-plein, même après avoir été avertis par les autorités policières.

Tout de même plus sécuritaire

« L’imam a consacré un sermon entier pour conseiller les gens de traverser aux bons endroits et éviter de se mettre en danger », renchéri Mohammed, fidèle du secteur, rencontré à la sortie d’une cérémonie. Vêtu de son qamis (tenue traditionnelle musulmane), celui-ci croit que l’installation de la clôture est une bonne chose puisqu’elle protégera les gens et évitera que certains fidèles écopent d’une amende.

« Ce n’est pas très esthétique [la clôture], mais je pense que c’est une bonne idée en général, surtout avec tous ces gens qui traversent en même temps », considère Paolo Triassi, copropriétaire du Café Victoria, situé à proximité de la nouvelle clôture.

Une responsable du Centre islamique Badr, Nihem, n’a pas retourné nos appels. Cependant, notre journaliste Amine Esseghir s’est rendu sur les lieux et s’est entretenu en arabe avec un bénévole de la mosquée, Beniamina Mohamed. Ce dernier voit d’un bon œil l’existence de cette clôture: « Macha Allah! (Que c’est magnifique!) Ça évite aux gens de traverser n’importe comment. Nous avons des bénévoles qui conseillent aux gens de traverser aux intersections, mais personne ne les écoute », affirme-t-il.

Rappelons que le Centre islamique Badr opère ses activités illégalement sur le territoire de l’arrondissement de Saint-Léonard, puisqu’il contrevient au règlement de zonage en étant un lieu de culte. L’arrondissement a remis plusieurs avis de non-conformité à ses principaux responsables au cours de la dernière année. Le dossier, qui a été remis devant la justice, n’a toujours pas fait l’objet d’une décision.

En collaboration avec Amine Esseghir