Mario Roy critique la décision du Musée de Nicolet de ne pas avoir présenté toute la vérité sur la question du hijab.
Adresse originale : http://blogues.lapresse.ca/edito/2013/05/28/le-fantome-et-lelephant/
Auteur : Mario Roy
Référence : La Presse, Le blogue de l’édito, 28 mai 2013
Titre original : Le fantôme et l’éléphant
Le Musée des religions du monde, à Nicolet, présente jusqu’en septembre l’exposition «Et voilà! Le voile musulman dévoilé».
L’exposition est modeste. Elle est principalement constituée de photographies – fort belles – de femmes vivant ici et heureuses de porter le voile islamique. Des considérations historiques s’ajoutent : couvrir les femmes n’est pas une invention de l’islam, en effet, et ramène aux coutumes des sociétés anciennes.
L’exposition a deux buts avoués.
Le premier est de combattre les préjugés qui, au Québec, accableraient celles qui portent le voile, préjugés répandus par les médias – cela est plusieurs fois répété sur les présentoirs de l’exposition. Selon le directeur du Musée, Jean-François Joyal (Royal PdeB), l’idée est donc de démanteler les idées reçues, notamment celle à l’effet que «tous les musulmans sont des terroristes».
Le second but visé est de convoyer l’idée que, pour les femmes musulmanes, le port du voile est essentiellement volontaire. «Saviez-vous que les musulmans croient que le port du voile doit être avant tout un choix personnel?», lit-on en présentation de l’exposition.
Ainsi entrent dans le fort élégant Musée des religions de Nicolet un fantôme et un éléphant.
Le fantôme? Les préjugés. Dans les faits, le Québec est une des sociétés les plus tolérantes au monde, y compris vis-à-vis le voile islamique. L’opinion médiatique d’ici est en général sympathique (ou indifférente), non seulement au port du voile, mais à l’islam – notamment par souci de rectitude politique. Et on ne se souvient pas que, jamais, nulle part, quiconque ait déjà affirmé que «tous les musulmans sont des terroristes».
L’éléphant dans la pièce, maintenant.
Dans les faits, encore une fois, le Québec est l’un des endroits par excellence au monde où les musulmanes ont le choix de porter ou non le voile. C’est déjà moins vrai dans beaucoup de «zones» des villes européennes. Et ça ne l’est pas du tout dans nombre de pays à majorité musulmane. Là, des femmes sont harcelées, blessées, parfois tuées, pour ne pas avoir porté le voile (ou ses versions plus lourdes : niqab, tchador, burqa). Cette persécution n’est pas un détail anodin! C’est la brutale réalité, nulle part évoquée dans l’exposition de Nicolet.
Je ne suis pas un spécialiste des règles s’appliquant à la muséologie. Mais, quelque part, doit probablement figurer la notion de vérité.
Références supplémentaires
Point de Bascule (22 mai 2013) : En 2011, le Musée des religions de Nicolet s’est associé aux Frères Musulmans et à Tariq Ramadan comme partenaire d’une conférence universitaire McGill/UdeM prônant d’interdire la critique des religions
Point de Bascule (24 mai 2013) : Réponse à Simon Jodoin du Voir : Il ne faut pas donner de prétextes supplémentaires aux islamistes et aux autres qui détestent la liberté d’expression pour intenter des poursuites qui ne visent qu’à la restreindre