Bien que deux représentants du Centre culturel islamique de Québec (CCIQ) se soient présentés devant les médias en février 2012 pour défendre le déménagement de la mosquée de Limoilou à Saint-Sauveur, c’est l’organisation islamiste Bel-Agir qui contrôle la mosquée à son emplacement actuel.
Précédents articles de Point de Bascule concernant l’établissement d’une mosquée radicale dans le quartier Saint-Sauveur de Québec
5 mars 2012
Le CCIQ, le Hamas et le projet de nouvelle mosquée dans le quartier Saint-Sauveur de Québec
Le 10 avril 2012, Radio-Canada a rapporté que le projet d’aménagement d’une mosquée dans le quartier Saint-Sauveur de Québec pourra aller de l’avant (Également sur Yahoo!) puisque la question du zonage a été réglée.
Dans un reportage précédent, Radio-Canada a mentionné que les responsables de la mosquée de Limoilou désiraient la déménager dans le quartier Saint-Sauveur pour cesser d’être locataires.
Le 17 mars 2012, Annie Mathieu du Soleil (Québec) précisa qu’Idriss Bashir deviendra l’imam de la nouvelle mosquée.
Bien que deux représentants du Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), Nadia El-Ghandouri et Boufeldja Benabdallah, se soient présentés devant les médias pour défendre le changement de zonage en février 2012, c’est une autre organisation islamiste qui contrôle la mosquée à son emplacement actuel. À Limoilou, ce sont le nom, le logo et le numéro de téléphone de l’organisation Bel-Agir (Al-Ihsane en arabe) qui sont affichés sur la devanture de la mosquée.
Contrairement au CCIQ, l’organisation Bel-Agir/Al-Ihsane ne fait pas directement partie de l’infrastructure des Frères Musulmans bien qu’elle soit influencée par eux.
Le fondateur des Frères Musulmans, Hassan al-Banna (1906-1949) a déclaré que le rôle d’une mosquée consistait à être le «centre de la révolution islamique». En 1997, un allié des Frères Musulmans, le premier ministre turc Recep Erdogan, a comparé la mosquée à une «caserne» dans un poème devenu célèbre depuis : «Les mosquées sont nos casernes, les minarets nos baïonnettes, les dômes nos casques et les croyants nos soldats».
Les liens de Bel-Agir avec l’organisation marocaine Al Adl Wal Ihsane
Bel-Agir est rattaché au mouvement islamiste marocain Al Adl Wal Ihsane (Al Adl = Justice et Al Ihsane = Bel-Agir, Bienfaisance). L’organisation marocaine traduit cependant son nom comme Justice et Spiritualité sur ses sites français et anglais.
Le site de la mosquée de Québec (à Limoilou) gérée par Bel-Agir suggère également des liens vers des sites associés aux Frères Musulmans : IslamOnLine, l’ancien site de Youssef Qaradawi, guide spirituel des Frères Musulmans, celui de Tariq Ramadan et celui de Harun Yahya, un auteur fréquemment cité par les organisations des Frères Musulmans.
L’organisation Al Adl Wal Ihsane a été fondée par Abdessalam Yassine en 1973. Aujourd’hui, c’est sa fille Nadia qui en est une des principales porte-parole. Au Canada, Bel-Agir présente Abdessalam Yassine comme un «savant» et un «guide spirituel». Il reproduit plusieurs de ses textes sur son site internet et organise des rencontres pour populariser ses idées. Le site de la mosquée de Québec (à Limoilou) géré par Bel-Agir suggère également des liens vers le site d’Abdessalam Yassine et celui de sa fille Nadia.
Le modèle iranien
Au moment de la victoire du Hamas aux élections de 2006, Nadia Yassine a affirmé que «la victoire du Hamas va donner un nouveau souffle et aura, pour les peuples musulmans, à peu près le même effet que la révolution en Iran». (Aujourd’hui Le Maroc – 1 février 2006)
La révolution islamique iranienne sert également de modèle aux Frères Musulmans. En 2008, à Tripoli (Libye), lors d’une rencontre commanditée par le régime Kadhafi, Ibrahim Abu-Rabi, un intellectuel des Frères Musulmans, a déclaré que la révolution iranienne était le seul modèle de révolution islamique qui ait réussi dans le monde musulman contemporain. Abu-Rabi a dirigé la chaire d’Études islamiques de l’Université de l’Alberta jusqu’à sa mort récente :
(Traduction PdeB) Dans le cas de l’Iran, le clergé et les oulémas (exégètes musulmans) contrôlent l’État et la société.
(…) Il est clair que la seule révolution islamique qui ait réussi jusqu’à maintenant a été menée par Khomeini et, à ma connaissance, l’Iran est le seul État dans le monde musulman contemporain où les élites religieuses exercent un contrôle politique ferme. Ce n’est pas le cas au Pakistan et pas même en Arabie saoudite.
Dans le passé, l’Agence de presse coranique internationale (IQNA en anglais), une agence officielle du régime iranien, a rapporté un concours d’apprentissage du Coran organisé par Bel-Agir et l’ouverture de l’École de l’Excellence (al-Farabi) associée au CCIQ.
IQNA (30 janvier 2012) : Une agence iranienne officielle annonce un concours d’apprentissage du Coran par la mosquée de Québec
IQNA (2007) : Une agence iranienne officielle annonce l’ouverture de la première école musulmane à Québec
L’agence iranienne déclare que son travail d’information est motivé par «(l)es enseignements du Coran, de l’Imam Khomeiny et des martyrs de la Révolution Islamique».
Concernant les relations entre les Frères Musulmans (sunnites) et l’Iran (chiite), elles se sont considérablement refroidies ces derniers mois suite à la répression exercée par le régime Assad de Syrie (soutenu par l’Iran) contre l’opposition principalement sunnite.
Point de Bascule (28 février 2012) : En quittant la Syrie, le Hamas confirme ses liens avec le réseau des Frères Musulmans
Comme à Québec, les Frères Musulmans se sont alliés aux supporteurs de Yassine au Maroc
Au Maroc, les Frères Musulmans sont regroupés au sein d’une organisation distincte du mouvement Al Adl Wal Ihsane de Yassine, soit le Parti de la justice et du développement (PJD). C’est ce parti qui a remporté les dernières élections marocaines en novembre 2011.
GMBDR (4 décembre 2011) : Qaradawi (guide spirituel des Frères Musulmans) félicite les islamistes marocains pour leur victoire électorale (Qaradawi Congratulates Moroccan Islamists On Parliamentary Win)
Observatoire de l’islamisation (25 novembre 2011) : Pourquoi les Marocains votent islamiste – Résultats d’un sondage de 2007 qui mesurent l’adhésion des Marocains à divers aspects de la charia
L’organisation de Yassine et le PJD s’entendent cependant sur un objectif commun qui est l’instauration d’une république islamique basée sur la charia. Leurs divergences portent sur les tactiques à utiliser pour y arriver. Depuis que les Frères Musulmans ont été violemment réprimés après avoir organisé des attentats terroristes pour prendre le pouvoir en Égypte (années 1940-50), en Syrie (années 1970-80), en Tunisie (années 1980-90) et ailleurs, ils ont accepté de participer au processus électoral. Yassine et son organisation continuent de s’y opposer.
À l’instar des Frères Musulmans du CCIQ et des supporteurs de Yassine à Bel-Agir qui se sont alliés pour établir une mosquée à Saint-Sauveur, leurs homologues marocains ont su unir leurs efforts en 2000 pour s’opposer aux modifications que le roi du Maroc désirait apporter au Code de la famille (moudawana) en vue d’améliorer la condition de la femme. Cette alliance d’islamistes marocains a combattu les réformes car elles étaient contraires à la charia. Une des réformes promue par le roi reconnaissait à la femme une autonomie pour choisir son époux (article 25) en la dispensant de devoir recourir à un wali (tuteur) comme l’y oblige la charia. Une autre haussait l’âge minimum auquel les femmes peuvent se marier à 18 ans (article 19) contrairement à la charia qui le permet à 6 ans, etc.
En 2009, une situation semblable s’est développée au Mali. Les parlementaires adoptèrent par un vote très majoritaire (117 oui – 5 non – 4 abstentions) une réforme du Code malien de la famille qui aurait amélioré la situation légale de la femme dans ce pays. Les islamistes alliés des Frères Musulmans organisèrent des manifestations et intimidèrent les dirigeants maliens en menaçant de recourir à la violence. Le président capitula et refusa de ratifier le projet de loi.
Quelques mois plus tard, Tariq Ramadan était au Mali pour célébrer la victoire des islamistes. Le CCIQ recommande huit livres de Tariq Ramadan dans la bibliographie musulmane personnelle qu’il suggère à ses militants et à laquelle nous avons fait allusion dans un article précédent.
Point de Bascule a couvert l’épisode malien plus en profondeur dans l’article La «compréhension de l’islam» de Tariq Ramadan. La journaliste Agnès Gruda de La Presse a produit un bon papier sur le sujet (Mali: le difficile chemin vers l’égalité des sexes). Seul point faible : elle ne fait aucunement état des liens qui unissent les islamistes maliens aux Frères Musulmans de l’organisation Présence Musulmane qui opèrent au Canada.
Vue de l’extérieur de la mosquée de Limoilou (1287 1ère avenue) que Bel-Agir veut déménager dans le quartier Saint-Sauveur de Québec. Le logo et le nom de l’organisation islamiste Bel-Agir apparaissent clairement sur la devanture de la mosquée. L’image a été diffusée dans un reportage (01:50) de Radio-Canada le 29 février 2012.
La corporation Mosquée de la Capitale (Saint-Sauveur) bénéficie d’un statut d’organisme de bienfaisance
Le 14 septembre 2011, plusieurs mois avant que la question du zonage n’ait été réglée, la corporation responsable de gérer la future mosquée du quartier Saint-Sauveur avait obtenu le statut d’organisme de bienfaisance autorisé à émettre des reçus pour fins d’impôt de l’Agence du revenu du Canada. Sous le nom de Mosquée de la Capitale, la nouvelle corporation a été enregistrée auprès d’Industrie Canada et du Registraire des entreprises du Québec le 20 juin 2011.
Industrie Canada – numéro de société : 7879873
Industrie Canada – numéro d’entreprise / NE) : 805833514RC0001
Agence du revenu du Canada – numéro d’entreprise / NE : 805833514RR0001
Registraire des entreprises du Québec – numéro d’entreprise / NEQ : 1167576454
Cinq administrateurs de la corporation Mosquée de la Capitale sont identifiés sur le site d’Industrie Canada :
Amjad Ghribi
Le 6 septembre 2007, il annonça l’ouverture de la mosquée de Limoilou au nom de Bel-Agir sur un groupe de discussion de Yahoo! Le 30 janvier 2012, une agence de presse officielle iranienne, l’Agence internationale de presse coranique, l’a identifié comme le responsable d’un concours d’apprentissage du Coran organisé par la mosquée de Limoilou. L’agence iranienne déclare que son travail d’information est motivé par «(l)es enseignements du Coran, de l’Imam Khomeiny et des martyrs de la Révolution Islamique».
Mohamed El Hafid
Le Soleil du 2 mars 2012 l’a identifié comme Mohamed Hafid et précisé qu’il est d’origine marocaine. Dans cet article, M. Hafid attribue les réticences des citoyens de Saint-Sauveur à l’arrivée d’une mosquée dans leur quartier à leurs «préjugés» et au fait qu’ils «sont très ignorants de la religion musulmane».
Bassamat Nourfatane
Meryam Saadouni
Mohammed El Younoussi
Une partie du réseau islamiste de Bel-Agir
Outre la corporation Mosquée de la Capitale (Saint-Sauveur), l’organisation islamiste Bel-Agir gère au moins quatre autres organisations :
Centre communautaire Bel-Agir / Al-Ihsane (Montréal)
Registraire des entreprises du Québec – numéro d’entreprise / NEQ : 1160721115
Site de l’organisation : Association Bel Agir – Mosquée de Montréal
Mosquée de Québec (Limoilou)
Premier site de l’organisation : http://www.mosqueedequebec.net/
Deuxième site de l’organisation : Association Bel Agir – Mosquée de Québec
Mosquée d’Aylmer (Gatineau)
Industrie Canada – numéro de société : 7713177
Industrie Canada – numéro d’entreprise / NE) : 829602002RC0001
Agence du revenu du Canada – numéro d’entreprise / NE : 829602002RR0001
Registraire des entreprises du Québec – numéro d’entreprise / NEQ : 1167287862
Site de l’organisation : http://www.mosque-aylmer.ca/index.php/home
Mosquée de Laval-Ouest