Le tout nouveau gouvernement turc d’allégeance islamiste est en train de réécrire la constitution de ce pays. Dans cette nouvelle constitution, on a introduit un paragraphe qui décrit les femmes comme «étant un groupe vulnérable qui a besoin de protection».
Des dizaines de groupes de pression féministes sont opposés à cette mise en tutelle constitutionnelle de la femme. Ils affirment que les femmes turques n’ont pas besoin de protection mais d’égalité. Selon ces groupes, si toutes les lois et la constitution sont préparées dans cet esprit, elles auront un impact très négatif sur le statut des femmes en Turquie. On déplore aussi que la nouvelle constitution ne soit écrite que par des hommes.
En 2002, les groupes féministes ont forcé la main du gouvernement pour que des réformes majeures soient instaurées dans le code civil. Rappelons qu’une clause identifiait l’homme comme maître du foyer familial et obligeait la femme à lui demander permission pour quitter la maison.
Les groupes de droits des femmes voient dans la nouvelle constitution un retour à cette mentalité. Le gouvernement veut aussi modifier la constitution afin que les femmes désirant porter le voile puissent le faire lors de leurs études universitaires – ce qui est interdit en ce moment en raison du caractère laïc de ces institutions.
Les féministes demandent à être consultées. Elles veulent que le processus de révision de la constitution devienne une opportunité pour obtenir plus de droits pour les femmes, pas moins. Elles considèrent que c’est la seule façon de sortir le Turquie du bas de la liste des pays européens en termes d’égalité entre les hommes et les femmes.
La Turquie, comme l’ensemble des pays et des communautés musulmanes dans le monde, vit une montée de l’islamisation. Plus de 60% des femmes Turques portent actuellement le voile.
L’analyste politique Ayaan Hirsi Ali décrit la démarche islamiste pratiquée par le gouvernement turc dans son texte « Mon pont de vue sur l’islam »:
«Le troisième groupe se compose de ces musulmans qui soutiennent la propagation et la domination progressives de l’islam dans le monde entier. Ils emploient les libertés offertes dans la démocratie pour miner la modernité sociale. Toutefois, bien qu’initialement opposés à l’usage de la violence, ils prévoient qu’une fois que la masse critique de croyants sera atteinte, les derniers incroyants pourront alors être traités par la violence, et la charia sera universellement mise en application. L’Ayatollah Khomeini a employé cette méthode avec succès en Iran. Erdogan de la Turquie est le suivant puisqu’il suit les traces de l’Ayatollah.»
La Turquie est le seul pays musulman avec une vraie tradition démocratique. Cette démocratie est cependant imposée et maintenue par les militaires, gardiens de la laïcité. Aux dernières élections, les Turcs ont choisi de porter au pouvoir ce parti islamiste. Les analystes financiers de même que les organisations religieuses non musulmanes se disaient optimistes et à l’aise avec ce nouveau gouvernement. Depuis l’inquiétude augmente.
Ayaan Hirsi Ali avait commenté cette élection éventuelle d’un gouvernement islamiste au mois d’aout dernier:
«Les partisans de l’Islam dans le gouvernement turc tel que Recep Tayyip Erdogan, Abdullah Gul et leur parti politique Justice et Développement ont eu un succès remarquable. Ils ont compris et ont exploité le fait que vous pouvez employer des moyens démocratiques afin d’éroder la démocratie. »
Sources:
Sarah Rainsford, Women condemn Turkey constitution, BBC, 2 octobre 2007
Ayaan Hirsi Ali Reflects on Secularism and Islam in Turkey, Armenian Weekly, 4 août 2007
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