ORIGINAL ENGLISH VERSION ON RAYMONDIBRAHIM.COM
TRADUCTION FRANÇAISE DE POINT DE BASCULE
Auteur : Raymond Ibrahim
Référence : RaymondIbrahim.com, 16 mars 2017
Titre original : More Evidence that McMaster Shares Obama’s Views on Islam and Terror / WebArchive – Archive.Today
Le nouveau conseiller en matière de sécurité nationale de Donald Trump, le lieutenant-général H. R. McMaster, a prononcé des remarques troublantes à l’effet que «L’État islamique n’est pas islamique». On s’attend à ça de l’establishment à Washington. Cependant, l’endossement bien senti qu’il a donné à un livre publié en 2010 démontre que l’ensemble des positions de McMaster sur les enjeux de sécurité sont pires que la simple répétition de clichés politiquement corrects sur l’islam.
Le livre en question c’est Militant Islamist Ideology: Understanding the Global Threat [L’idéologie islamiste militante : Comprendre la menace globale]. Écrit par le commandant [CDR] Youssef Aboul-Enein, il a été publié par Naval Institute Press en 2010. Je l’ai lu et je l’avais commenté en 2012. J’avais souligné que ses conclusions (dont plusieurs ont été suivies par l’administration Obama avec des résultats désastreux) étaient incorrectes et problématiques.
D’abord, Aboul-Eneim affirme que seulement les «islamistes militants» (ceux du genre ISIS qui décapitent, crucifient, massacrent et brûlent des gens vivants) sont des ennemis. Par contre, les «islamistes non militants» ne le sont pas :
Youssef Aboul-Enein / p.2 : «Ce sont les islamistes militants qui sont nos adversaires. Ils représentent une menace immédiate pour la sécurité des États-Unis. Ils ne doivent pas être confondus avec les islamistes.»
Ce thème est omniprésent dans le volume. Parfois, l’auteur l’évoque de façon tordue. Ainsi (p.176), il demande au lecteur de reconnaître «les divisions entre les islamistes militants et entre les islamistes militants et les islamistes». En réalité, tous les islamistes partagent le même objectif d’établir une hégémonie islamique planétaire. Ils se distinguent les uns des autres seulement par la méthodologie qu’ils utilisent et non dans le constat que nous sommes l’ennemi à abattre.
Au premier rang des «islamistes non militants», on retrouve les Frères Musulmans. Ils conçoivent l’infiltration progressive et la subversion subtile des États occidentaux infidèles comme étant plus efficace que le terrorisme pur et simple comme le rappelle un de leurs mémorandums internes. [Voir Note 1]
On a bien vu ce qui est advenu de la coopération avec les «islamistes non militants» durant le printemps arabe. L’administration Obama a écarté une politique américaine d’appui aux autocrates arabes laïques suivie depuis plusieurs décennies pour se rapprocher des Frères Musulmans. Ce qui s’en est suivi est bien connu : le printemps arabe a rapidement dégénéré en un ‘hiver islamique’. Cela a culminé avec la montée de l’État islamique, en grande partie imputable aux politiques d’Obama, autant de façon active (l’appui aux terroristes islamiques dépeints comme des ‘combattants pour la liberté’ en Libye et en Syrie) que de façon inactive (retrait des forces américaines d’Irak malgré les avertissements et l’abandon de Moubarak, un allié des Américains depuis trente ans, en faveur des Frères Musulmans en Égypte.)
Aboul-Enein recommande de plus que les forces armées américaines manifestent un respect basé sur la charia envers l’islam et les musulmans. Ainsi, il suggère que si un soldat américain profane un Coran, l’état-major américain doit non seulement le relever de ses fonctions mais présenter des «excuses inconditionnelles» aux musulmans. Il doit imiter le major-général Jeffrey Hammond qu’Aboul-Eneim présente comme exemplaire : «Je me présente devant vous [musulmans] pour vous demander pardon avec la plus grande humilité. Aujourd’hui, je vous regarde dans les yeux et je vous prie de pardonner à moi et à mes soldats» suivi d’un baiser sur un nouveau Coran présenté «cérémonieusement» aux musulmans.
Non seulement un tel double standard n’est pas américain (est-ce qu’un militaire serait puni pour avoir ‘profané’ n’importe quel autre livre religieux?) mais l’idée même que des musulmans suprématistes puissent être amadoués par un apaisement servile est contraire à la réalité, sinon à la nature humaine elle-même. De telles conduites abjectes suscitent le mépris et encouragent plus d’agression et de demandes des musulmans.
Voici quelques autres exemples de fausses déclarations, de distorsions et de bizarreries d’Aboul-Eneim bien que la liste soit sans fin :
- Il écrit (p.142) que «quand les musulmans constituent une minorité persécutée, le jihad devient un fard kifaya (une obligation optionnelle) pour lequel un imam autorise des expéditions annuelles dans le Dar el Hard (la maison de la guerre), des territoires qui ne sont pas considérés sous influence musulmane.» L’affirmation est fausse à plusieurs égards. Un fard kifaya n’est pas une «obligation optionnelle» (un cas patent d’oxymore) mais plutôt une «obligation communautaire». De plus, ce qu’Aboul-Eneim décrit c’est plutôt le jihad offensif qui vise à subjuguer les non-musulmans et qui est obligatoire dès que les musulmans en ont la capacité et non «quand les musulmans constituent une minorité persécutée», ce qui correspond plutôt au jihad défensif dans la jurisprudence islamique, le fard ain (c’est-à-dire une obligation individuelle).
- Il déclare (p.75) que le mot arabe pour «terrorisme» (irhabi) est introuvable dans le Coran et les hadiths sans se donner la peine de faire remarquer que le verbe associé à ce nom (tirhibun), «terroriser» abonde dans les écritures islamiques (ex : Allah lui-même demande aux musulmans de «terroriser» les opposants de l’islam au verset 8:60 du Coran).
- Il soutient (p.65) que «les islamistes militants rejettent ijmaa [consensus] et qiyas [raisonnement par analogie]» deux démarches de la jurisprudence islamique. Ceci est tout simplement faux. Des groupes comme Al-Qaïda et l’État islamique invoquent fréquemment le concept d’ijmaa (par exemple le consensus que le jihad devient un devoir personnel [fard ain] quand les infidèles envahissent des territoires musulmans) et ils justifient les attaques-suicide en utilisant qiyas (voir The Al Qaeda Reader, p.138).
- Après avoir averti avec raison ses lecteurs de ne pas se fier sur des comptes rendus biaisés sur l’islam et la vie de Muhammad, il recommande à plusieurs reprises (ex. pp.20, 213, 216) les écrits de Karen Armstrong, une apologiste bien connue pour défendre tout ce qui est islamique.
Telles sont le genre d’affirmations, de distorsions et de recommandations qu’on retrouve dans le livre que McMaster a endossé sans réserve en 2010 comme «excellent» et «mérit[ant] un large lectorat», un livre qui soutient que «Les organisations terroristes utilisent une idéologie étroite et non-religieuse pour recruter pour leur cause des gens mal éduqués et qui se sentent exclus», malgré que ce soit une autre excuse usée qui a été maintes et maintes fois invalidée. [Voir Note 2]
Il y a un an, j’ai conclu un article pour Startegika de l’Institut Hoover avec la phrase suivante :
Raymond Ibrahim : «L’avenir nous dira si la prochaine administration [présidentielle américaine] demeurera volontairement ignorante de la nature de son ennemi djihadiste (ce qui est mortel selon l’ancien dicton de Sun Tzu, ‘Connais ton ennemi’) ou si la réalité va avoir le dessus [trump en anglais] sur la rectitude politique.»
Le jeu de mots demeure plus vrai que jamais. Si les recommandations de Militant Islamist Ideology reflètent les vues du conseiller en sécurité nationale de Trump, particulièrement en ce qui a trait à la coopération avec les «islamistes non militants», alors il semble bien que nous soyons de retour à «l’ignorance volontaire» de la réalité.
* * * * *
NOTE 1 : Mémorandum des Frères Musulmans (Comprendre le rôle des Frères Musulmans en Amérique du Nord)
«[Point 4.4] Le processus d’implantation est un ‘processus djihadiste et civilisationnel’ avec tout ce que le terme peut signifier. L’Ikhwan [les Frères Musulmans] doivent comprendre leur travail en Amérique comme une sorte de grand jihad visant à éliminer, à détruire de l’intérieur la civilisation occidentale et à saboter sa misérable demeure par leurs efforts [ceux des non-musulmans] et les efforts des croyants [les musulmans] afin que la religion d’Allah soit victorieuse sur toutes les autres religions.
Sans ce niveau de compréhension, nous ne sommes pas à la hauteur du défi et nous ne sommes pas encore prêts pour le djihad. C’est la destinée du musulman de mener le djihad et d’y travailler où qu’il soit, où qu’il aboutisse jusqu’à ce que l’heure finale arrive. On ne peut échapper à cette destinée sauf pour ceux qui choisissent de se laisser aller.»
NOTE 2 : Voici l’endossement complet de McMaster, tel qu’il apparait sur la couverture arrière du livre
H. R. McMaster : «Les organisations terroristes utilisent une idéologie étroite et non religieuse pour recruter pour leur cause des gens mal éduqués et qui se sentent exclus. Comprendre l’idéologie terroriste est la première étape et peut-être la plus importante pour assurer la sécurité nationale et internationale contre la menace posée par ces organisations. Le livre de Youssef Aboul-Enein est un excellent point de départ pour y arriver. Militant Islamist Ideology mérite un large lectorat chez ceux qui s’intéressent au problème du terrorisme transnational, à l’idéologie qui le sous-tend et à nos efforts pour combattre ces organisations qui posent une menace sérieuse aux générations actuelles et futures de musulmans et de non-musulmans confondues.»
Lecture complémentaire
Point de Bascule : FICHE Charia ‘Musulman modéré’