AFP / Canoë.ca : «La guérisseuse prend ensuite les petits morceaux [de parties génitales] coupés et les plante dans un citron avec son couteau. Ce geste marque la fin d’un rite censé débarrasser la petite Salsa des péchés et signaler qu’elle est officiellement musulmane.»
Des compagnons de route des islamistes comme Charles Taylor affirment qu’aucune mention sur l’excision n’apparaissant dans le Coran, il serait donc faux d’attribuer une responsabilité à l’islam en la matière. D’autres apologistes insistent que, les mutilations génitales féminines ayant précédé l’arrivée de l’islam, il serait faux d’établir un lien entre l’islam et cette pratique barbare.
Des manuels de charia largement diffusés comme l’Umdat Al-Salik et des textes d’exégètes musulmans de premier plan comme Youssef Qaradawi démontrent que les deux affirmations précédentes sont fausses. Qaradawi explique que les justifications islamiques de la pratique préislamique de l’excision ne sont pas basées sur le Coran mais sur les hadith, c’est-à-dire des déclarations et des actions attribuées à Muhammad, le fondateur de l’islam. Point de Bascule a consacré un article à la question dans le cadre du dixième anniversaire de la Commission Bouchard-Taylor.
Lorsque Tariq Ramadan a annoncé son admission à une organisation internationale d’exégètes musulmans dirigée par Qaradawi, Point de Bascule a présenté plusieurs supporteurs de premier plan de Qaradawi au Canada.
Selon l’article e4.3 du manuel de charia Umdat Al-Salik qui fait autorité dans les cercles des Frères Musulmans, l’excision du clitoris est obligatoire pour l’école d’interprétation shafiiste alors qu’elle n’est que ‘recommandée’ pour l’école hanbaliste et considérée comme une ‘simple courtoisie’ à l’égard du mari par l’école hanafiste.
Point de Bascule (22 juin 2016) : Charles Taylor (2007) : «L’excision n’est pas dans le Coran. Ce n’est pas dans la religion musulmane.»
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Auteure : Olivia Rondonuwu
Référence : AFP / Canoë.ca, 27 mars 2017
Titre original : L’excision, cauchemar des fillettes en Indonésie / Archive.Today
La petite Salsa Djafar porte une couronne en or, un ruban et une robe pourpre pour une fête de famille particulière: la célébration de son excision, dans une région isolée d’Indonésie. Mais pour cette fillette d’un an et demi, comme pour d’autres, c’est un cauchemar.
Dans une modeste maison dans la province de Gorontalo (centre), une guérisseuse recouvre le bébé d’un drap blanc puis passe sa tête en dessous, un petit couteau à la main.
Soudain, elle coupe le capuchon qui recouvre le clitoris de la fillette, ainsi que les petites lèvres, faisant aussitôt hurler l’enfant.
La guérisseuse prend ensuite les petits morceaux coupés et les plante dans un citron avec son couteau. Ce geste marque la fin d’un rite censé débarrasser la petite Salsa des péchés et signaler qu’elle est officiellement musulmane.
«C’est dur de la voir crier comme ça, mais c’est la tradition», dit à l’AFP le père du bébé, Arjun Djafar, un ouvrier de 23 ans, lors de cette cérémonie sur fond de musique locale, un rituel qui se fête en famille.
Les mutilations génitales féminines (MGF) – expression médicale qui désigne l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes d’une femme – sont pratiquées depuis des générations en Indonésie, pays musulman le plus peuplé au monde.
Pour de nombreuses familles, c’est un rite obligatoire. Mais les méthodes ancestrales sont dénoncées avec force par les opposants, qui exigent leur interdiction.
Le gouvernement indonésien a souvent changé d’avis sur les méthodes d’excision à adopter ou non, créant de la confusion. Un temps, il a essayé d’interdire l’excision, condamnée par les Nations unies, mais la forte résistance opposée par les autorités religieuses de cet archipel d’Asie du Sud-Est où l’islam joue un rôle important rendent un tel bannissement impossible. Il essaie désormais plutôt de convaincre de cesser cette pratique, considérée au niveau international comme une violation des droits fondamentaux des filles.
Opposition croissante
Nulle part ailleurs dans le pays l’excision n’est aussi populaire qu’à Gorontalo, région très conservatrice. La province affiche le taux le plus élevé d’ablations d’organes génitaux. A Gorontalo, plus de 80% des filles âgées de moins de 11 ans ont subi des mutilations génitales, contre 50% environ à l’échelle de ce pays de 255 millions d’habitants, selon une enquête gouvernementale.
Malgré les souffrances causées par ces ablations et l’opposition croissante dans le pays, les habitants de la province, peuplée pour l’essentiel de paysans pauvres, considèrent l’excision comme une obligation.
Pour la guérisseuse traditionnelle Khadijah Ibrahim, qui a pris la succession à Gorontalo de sa mère décédée il y a quelques années, les filles qui ne sont pas excisées risquent d’être atteintes de «problèmes mentaux et handicaps».
Des dirigeants locaux estiment, eux, que cette pratique évite plus tard aux filles de céder aux moeurs légères.
Et les habitants sont nombreux à penser que les musulmanes n’ayant pas subi de mutilations génitales ne seront pas acceptées par Dieu.
L’excision n’est pas seulement une pratique courante dans les régions isolées de l’archipel, elle l’est aussi à Jakarta. Mais dans la capitale indonésienne, la procédure se limite à un geste symbolique: une personne pique une aiguille dans le clitoris de la fillette, évitant ainsi les douleurs liées à une ablation.
Procédures néfastes
Les Nations unies ont déjà adopté deux résolutions encourageant à renoncer à ces pratiques d’un autre âge. L’ONU considère les MGF comme des «procédures néfastes aux parties génitales féminines sans raison médicale». Non seulement elles n’ont aucun avantage pour la santé, mais peuvent au contraire créer beaucoup de problèmes comme l’infertilité et un risque accru de complications à la naissance d’un enfant, souligne l’ONU.
En Indonésie, les débats autour de l’excision ont pris de l’ampleur ces dernières années. Même certaines organisations musulmanes sont désormais contre, telle Muhammadiayh, la deuxième du pays, qui dissuade ses partisans de recourir à cette pratique.
Un avis partagé par Khorirah Ali, une membre de la commission nationale contre la violence faite aux femmes: «Je pense que dans ma religion il n’y a aucun verset qui autorise l’excision féminine, ce n’est pas dans le Coran», a-t-elle déclaré à l’AFP.
Mais la plus importante organisation musulmane indonésienne, Nahdlatul Ulama, et le Conseil des oulémas, la plus haute instance religieuse du pays, restent eux favorables à l’excision.
Malgré les oppositions, la fin de l’excision a peu de chance d’arriver en Indonésie, dit à l’AFP Jurnalis Uddin, expert en mutilations génitales féminines. «Vouloir se débarrasser totalement de cette pratique, c’est comme nager contre le courant».
Lectures complémentaires
Point de Bascule : FICHE Charia / Mutilations génitales féminines
Point de Bascule (14 juin 2016) : Un professeur de l’Université de Montréal décrit au Devoir l’islamisation accélérée de l’Indonésie qu’il observe depuis 2004
Ayaan Hirsi Ali (The Daily Beast – 20 mai 2010) : Pourquoi les médecins américains mutilent-ils les filles?
Point de Bascule (20 juillet 2010) : Quand les «savants musulmans» justifient les mutilations génitales féminines
Point de Bascule (14 février 2017) : L’organisme québécois ‘Ce qui me voile’ vient à la défense de l’islamiste Linda Sarsour après qu’elle ait suggéré d’horribles sévices corporels pour une ex-musulmane déjà victime de mutilations génitales
Point de Bascule (17 mars 2017) : Déporté des États-Unis après sa peine de prison pour avoir infligé des mutilations génitales à sa fillette de deux ans avec des ciseaux