C’est le constat que fait Bruce Thornton, professeur d’université en Californie, dans son dernier livre. Il donne une interview à National Review où il partage ses observations sur l’épuisement civilisationnel qui frappe l’Europe et l’empêche de défendre ses valeurs et ses idéaux. La mort lente pourrait s’étaler sur des décennies, et donner lieu à de grandes violences.
L’Europe est en mauvaise posture. Et tout solide qu’il soit, Nicolas Sarkozy ne risque pas de la sauver d’elle-même. C’est ce qu’argumente Bruce Thornton qui braque un spot brillant mettant en lumière les tendances suicidaires outre-Atlantique. Thornton, un professeur d’humanités classiques à la California State University à Fresno présente ses arguments dans son nouveau livre Decline and Fall: Europe’s Slow-Motion Suicide.
KATHRYN JEAN LOPEZ: Quel a été le premier signe que l’Europe était suicidaire?
BRUCE THORNTON: Si l’on prend la période juste après la Deuxième Guerre mondiale, je dirais que la collaboration au communisme et l’appui à l’Union soviétique de la part de nombreux intellectuels et hommes politiques européens, de pair avec un anti-américanisme hystérique, était un signe important que la civilisation européenne était intellectuellement et moralement en faillite. Le fait de ne pas voir la vraie nature du communisme – qu’il s’agit d’une idéologie diamétralement opposée à tous les idéaux de la démocratie libérale dont jouissent les Européens – témoigne de l’effondrement suicidaire de la certitude dans la justesse des réalisations de la civilisation occidentale, en particulier le respect de l’individu, les droits humains et la liberté politique. Plus récemment, la réponse placide à la terreur djihadiste et aux attaques par les musulmans européens contre ces mêmes idéaux est également un signe d’une civilisation épuisée qui refuse de se défendre et qui exprime du ressentiment pour ceux qui le font, comme les États-Unis.
LOPEZ: Quelle sera le dernier signe? Quelle est la lenteur de ce suicide au ralenti?
THORNTON: L’établissement de grands pans de sociétés européennes remis au contrôle des musulmans et de la charia sera un signe. Un éloignement croissant des États-Unis et de ses politiques, et des efforts diplomatiques plus actifs contre les États-Unis et ses intérêts, en sera un autre. Peut-être le signe le plus évident sera l’apaisement face à une attaque terroriste contre l’Europe à l’échelle du 11/9. Si l’Europe reprend la honteuse réaction de l’Espagne après l’attentat de Madrid – blâmer l’Amérique et donner aux djihadistes ce qu’ils exigent – alors vous saurez que l’Europe est finie.
Le suicide est au « ralenti » parce que les forces qui érodent la civilisation européenne travaillent elles-mêmes au ralenti, comparativement aux guerres cataclysmiques du 20e siècle. La crise démographique – l’échec de l’Europe à se reproduire – et les problèmes économiques – une économie atone sous le fardeau des prestations sociales coûteuses – et le problème des immigrés – non assimilés, maussades, sous-employés mais avec des musulmans féconds mûrs pour le recrutement djihadiste – prendra un certain temps pour parvenir à un point de crise. Mais il est probable que ce soit une question de décennies, pas de siècles.
LOPEZ: Est-il excessif de dire que l’Europe a «abandonné Dieu et nation»?
THORNTON: Certainement pas, si l’on parle, comme je le fais, de l’élite politique et culturelle européenne. Refuser de reconnaître, dans la Constitution européenne, le fait historique du rôle du christianisme dans la création de l’Europe est assez dramatique. Ainsi que les cathédrales vides à travers le continent. Et la création de l’Union européenne, qui exige la cession d’une certaine souveraineté nationale, est un signe dramatique du discrédit de l’État-nation et du patriotisme. Le temps nous dira si ces attitudes de l’élite de l’UE rejoindront les masses européennes.
LOPEZ: Qu’est-ce qu’Eurabia et où est-ce?
THORNTON: Eurabia est un état d’esprit, ainsi qu’un ensemble de politiques menées par certains pays européens. Elle représente un marché du diable avec les musulmans du Moyen-Orient, dans lequel l’abandon d’Israël et l’acceptation de la supériorité culturelle de l’islam ont été négociés en échange de main-d’œuvre immigrée, de l’accès au pétrole et aux marchés pour les armes, du développement économique au Moyen-Orient, et de la protection contre le terrorisme. En Europe, Eurabia se manifeste par le refus d’exiger des musulmans qu’ils assimilent les valeurs et les moeurs politiques occidentales, et qu’ils abandonnent celles qui sont en conflit avec les idéaux occidentaux. Elle est accompagnée d’un dénigrement de l’Occident et d’une adulation de la civilisation islamique. Eurabia est ainsi une autre version de ce singulier auto-dégoût occidental et carence de caractère qui suscitent chez les Européens (et de nombreux Américains aussi) l’envie d’enfiler le maillot de la culpabilité post-coloniale et impériale et d’apaiser une culture qui veut les détruire.
LOPEZ: Y a-t-il une vision européenne de la liberté d’expression? Quel est son degré de toxicité?
THORNTON: En général, la vision européenne de la liberté d’expression est beaucoup plus limitée que ce dont nous jouissons aux États-Unis. Comme les professeurs américains politiquement corrects, de nombreux Européens – certainement pas tous – sont tous pour la liberté d’expression qui attaque les États-Unis ou Israël ou le christianisme, mais ensuite ils mettent hors limite toute critique de l’Islam ou des musulmans. Les deux poids deux mesures hypocrites sont toujours toxiques car ils sapent l’autorité du principe en question. Si nous faisons une exception pour un groupe, alors d’autres groupes militeront pour le même privilège. Mais plus important encore, la sensibilité européenne aux sensibilités musulmanes témoigne non pas d’une position de principe, mais de peur: par conséquent, c’est un autre signe de l’apaisement suicidaire.
LOPEZ: En quoi l’UE a-t-elle été dommageable pour l’Europe?
THORNTON: Je pense que l’UE a favorisé l’illusion que l’Europe puisse être une puissance mondiale en cédant l’autorité nationale à une bureaucratie antidémocratique sans visage à Bruxelles, et a ainsi favorisé une dangereuse illusion que l’humanité, ou tout au moins les Européens, ont évolué au-delà de la force et des rivalités nationales vers une utopie où des techniciens politiques résolvent tous les problèmes par des discussions rationnelles et des accords internationaux. Cette idée est dangereuse, car dans un monde dangereux, la menace crédible de la force restera la clé non seulement pour se défendre soi-même, mais pour atteindre des objectifs tels que l’élargissement des droits de l’homme, l’éradication de la pauvreté, etc, – comme l’Europe l’a appris de son humiliation dans les années 90 avec la crise des Balkans – et peut apprendre de nouveau si l’Europe ne fait rien, comme elle le fera, si la Russie intervient au Kosovo. Plus important encore, rien ne donne à penser que les gens peuvent prendre le sens de leur identité d’une bureaucratie plutôt que d’une nation formée de personnes qui vivent et parlent comme eux. Une réponse aux tentatives en ce sens peut être une résurgence nationaliste qui prend des formes xénophobes ou néo-fascistes.
LOPEZ: Sarkozy peut-il sauver l’Europe?
THORNTON: Sarkozy ne peut même pas sauver la France, pas plus que Angela Merkel ne peut faire les changements qui pourraient même commencer à guérir la sclérose économique allemande. Les cotes d’approbation de Sarkozy sont abysmales, et il n’a pas encore vraiment fait quelque chose autre que d’exprimer un soutien pour Israël, l’héritage chrétien, et les États-Unis. Si la rhétorique lui a coûté tant de soutien, imaginez ce que de réels changements de politiques feront pour lui.
LOPEZ: Est-ce que la Grande-Bretagne est dans un pire état?
THORNTON: Certainement en termes de son long apaisement des djihadistes, et de sa volonté de gâter les comportements et la propagande des musulmans hostiles aux meilleurs intérêts de l’Angleterre. Cette tendance est surtout évidente dans les stupides déclarations du Prince Charles sur les gloires supérieures de l’islam, ou la création de l’islamophobie comme un crime haineux qui expliquerait la terreur djihadiste et le mécontentement des musulmans.
LOPEZ: Quels sont les pays qui peuvent être plus facilement récupérés?
THORNTON: Plus récemment, les Danois ont été les plus agressifs dans la défense de leurs principes et idéaux contre l’assaut des djihadistes, et en essayant de resserrer l’immigration. Mais le Danemark ou la Suisse ne sont pas le problème: la France, l’Angleterre et l’Allemagne sont les grands garçons de l’Europe, et même s’ils font du bon travail jusqu’à présent en gardant un oeil sur d’éventuels terroristes, aucun de ces trois pays ne s’attaque vraiment aux problèmes profondément enracinés qui favorisent le terrorisme en premier lieu, le plus important étant un manque de volonté d’affirmer la supériorité de la civilisation occidentale et d’exiger que les immigrants acceptent ces idéaux s’ils veulent profiter de la liberté et de la prospérité de l’Occident.
LOPEZ: Que faites-vous des dernières émeutes au Danemark?
THORNTON: Vous voulez dire ces vagues «jeunes» engagés dans un déchaînement de violence? Nous verrons dans les prochains jours si mon estimation du Danemark est correcte. Si nous entendons d’autres platitudes sur les « causes profondes » et la «colère au sujet de l’Irak» et une «absence de perspectives économiques», alors ces émeutes seront un autre signe de la faiblesse de l’Europe. Ce qui est intéressant à propos des émeutes, comme dans celles en France il y a quelques années, est l’absence de volonté du gouvernement et des médias de dire franchement que cette violence populaire reflète à la fois la culture dysfonctionnelle des immigrés musulmans et la combinaison empoisonnée de la négligence et de l’apaisement qui définit une grande partie de la culture européenne en matière de traitement de ses immigrants.
LOPEZ: Quelle est la responsabilité des partis Verts d’Europe dans ce suicide au ralenti?
THORNTON: Ils jouent un rôle important, un rôle qui va croître à mesure que la popularité du culte du réchauffement planétaire et de l’anti-mondialisation augmentera. Le culte néo-païen que les Verts vouent à la nature s’oppose aux fondements de la civilisation occidentale et aux principes qui ont apporté la liberté et la prospérité à un nombre sans précédent de gens ordinaires. Si jamais les partis Verts atteignent assez de pouvoir politique pour mettre en œuvre ces politiques, la haine des Verts pour la technologie et le capitalisme – les moteurs avérés de la liberté et de la prospérité – va accélérer la disparition de l’Europe.
LOPEZ: Vous soulignez l’impopularité de Tony Blair lors de son départ comme un signe que l’Europe n’a pas les nerfs pour combattre le djihad. Y a-t-il des signes alternatifs? Des symboles d’espoir pour la civilisation occidentale?
THORNTON: On a des aperçus ici et là d’Européens ordinaires qui voient ce qui se passe et qui veulent faire quelque chose. Bien sûr, ils sont diabolisés comme «fascistes» ou «xénophobes». Pym Fortuyn, le politicien néerlandais assassiné par un fanatique de la défense des droits des animaux, est un parfait exemple. Avant sa mort, il a été décrié comme un extrémiste de droite simplement pour avoir défendu la culture danoise contre ceux qui voulaient la détruire. J’espère qu’il y a un grand nombre d’Européens qui pensent comme lui et qui, dans les années qui viennent, commenceront à exiger que leurs gouvernements se battent pour les valeurs de l’Europe. Mais malheureusement, ça pourrait prendre un 11/9 européen, ou quelque chose de pire, pour catalyser ce genre de résistance.
LOPEZ: Comment l’Europe pourrait-elle entamer un programme de guérison en 12 étapes? Qui pourrait la mener au bord du précipice?
THORNTON: Hélas, je ne pense pas qu’il existe un programme qui peut rétablir la confiance en soi d’une civilisation et la volonté de tuer et de mourir pour ses valeurs, une fois qu’elles ont été érodées. En particulier lorsque la vie semble, pour l’instant, aller tout à fait bien pour de nombreux Européens et que leur sécurité est souscrite par leurs rustres cousins américains. Je pense que la question n’est pas «qui», mais «ce qui» va rapprocher l’Europe du retour à la raison. Une grave crise économique, ou de plus en plus d’attaques terroristes, pourrait réveiller un nombre suffisant de personnes. Le problème est de savoir quel genre de réaction s’ensuivra? Un regain de violence fasciste n’est pas hors de question. Quelque chose d’autre qui pourrait aider serait pour les États-Unis d’arrêter de faciliter les illusions européennes en lui fournissant la sécurité gratuitement. La dolce vita européenne est subventionnée par l’Amérique, car l’Europe ne consacre tout simplement pas l’argent à la défense qui est nécessaire à l’Occident pour faire la police dans le monde et permettre à l’économie mondiale, qui enrichit l’Europe, de s’épanouir. Un retrait américain de l’OTAN pourrait concentrer merveilleusement l’esprit de l’UE et inciter l’Europe à assumer sa juste part de la facture de la sécurité.
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